Je n’aime pas la musique québécoise » : phrase à laquelle je me suis trop souvent butée lorsque je partageais mes goûts musicaux. Cela m’a toujours un peu (beaucoup) irritée, sans savoir comment l’expliquer. J’ai du mal à accepter que la musique québécoise soit réduite à une seule et même catégorie, alors que l’on considère la musique américaine comme un regroupement d’une multiplicité de genres et d’artistes.
Dire « je n’aime pas la musique québécoise » est une généralisation infondée. Les mots « musique québécoise » ne constituent pas un genre, mais plutôt une riche catégorie culturelle, voire géographique. Il s’agit tout simplement de musique produite ici même, au Québec, par des individus revendiquant une appartenance au territoire québécois. Il n’y a pas de musicalité particulière associée à cette catégorie ; le genre musical est ce qui se rapproche davantage des goûts personnels. L’industrie musicale d’ici produit autant de musique pop que de rap, en passant par la musique indépendante, la chanson et le punk. Il y a un monde entre des artistes comme Violett Pi et Lynda Lemay, et pourtant, certaines personnes ont l’audace de les placer dans la même catégorie, justifiant ainsi leur dédain de ce qui se produit musicalement au Québec, alors qu’ils n’ont été exposés qu’au mince échantillon de chansons peu diversifiées qui jouent à la radio.
« L’industrie musicale d’ici produit autant de musique pop que de rap, en passant par la musique indépendante, la chanson et le punk »
Si le malaise réside dans la langue, la musique québécoise est aussi polyglotte. Bien que, politiquement, on essaie parfois de se convaincre du contraire, le Québec est une société diversifiée, remplie d’individus au bagage culturel varié. Les artistes québécois se produisent en anglais ; Patrick Watson, Gabrielle Shonk, Claudia Bouvette et Soran en sont quelques exemples. Les langues autochtones ont également leur place dans ce que je considère comme « musique québécoise ». Des artistes comme Elisapie, Kanen et Laura Niquay façonnent le portrait de la musique d’ici en se produisant dans des langues autochtones ; c’est un des multiples visages du Québec qu’il ne faut certainement pas oublier. L’excuse de la langue ne tient donc pas, et la question persiste : pourquoi rejeter si catégoriquement la musique locale ?
Je ne sais pas exactement comment y répondre, peut-être est-ce vain de tenter de le faire. Plutôt que de comprendre, j’essaierai finalement de convaincre. Il faut s’intéresser à ce qui se fait près de nous. La musique nous permet de mieux nous comprendre ; je n’oublierai jamais à quel point la chanson St. Denis de Ponteix et Louis-Jean Cormier m’a fait chavirer dans mes premiers mois de vie à Montréal. Mais le plus puissant, c’est le pouvoir que la musique a de nous faire comprendre l’autre. « L’autre », dans le cas de la musique québécoise, c’est notre voisine d’en haut, le travailleur du dépanneur, notre professeur. J’ai la conviction que s’intéresser à la musique d’ici, c’est aussi s’intéresser aux réalités d’ici. Peut-être ainsi pourrons-nous mieux vivre entre nous, mieux vivre ensemble.
P.S. – Quelques suggestions d’artistes en rafale pour commencer votre quête d’empathie musicale : Mon Doux Saigneur, Comment Debord, La Bronze et Marilyne Léonard.