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Un campus à réinventer

McGill consultera ses étudiants sur l’avenir de ses bâtiments.

Iyad Kaghad | Le Délit

Prévoir à l’avance comment maintenir et améliorer les bâtiments d’une université de plus de quarante mille étudiants n’est pas une chose à prendre à la légère. Il faut composer avec de nombreuses contraintes d’ordre administratif et financier, en plus d’avoir à s’assurer que les bâtiments de l’université puissent s’adapter aux nouvelles exigences  technologiques. De plus, dans le cas de McGill, il faut être en mesure de préserver le patrimoine architectural de l’université, en partie vieux de plus d’un siècle et demi. 

À McGill, c’est le Bureau de Planification et de Développement du Campus (Campus Planning and Development Office, CPDO en anglais, ndlr), dirigé par l’urbaniste Cameron Charlebois, qui s’occupe d’imaginer l’avenir de l’université. Le CPDO est notamment chargé de produire un plan directeur (un « master plan », ndlr) pour encadrer ce qui se fera au cours des prochaines années en termes d’architecture à McGill. Ce plan directeur et la politique architecturale de McGill en général, seront cette semaine présentés aux mcgillois par les membres du CPDO, à divers endroits sur le campus (voir ci-contre). 

En manque d’espace

Comme on pourrait s’y attendre, l’un des principaux soucis du Bureau est d’augmenter la quantité d’espaces disponibles pour les étudiants. Évidemment, on pense tout de suite aux espaces d’enseignement, comme les classes, les auditoriums et les laboratoires, qui doivent être pris en considération en premier. Actuellement, McGill ne compte pas assez d’espaces d’enseignement pour tous ses élèves et doit ainsi recourir occasionnellement à la location de bâtiments sur la rue Sherbrooke. 

Toutefois, comme l’Université ne peut obtenir de financement du ministère de l’Éducation pour la location d’espaces d’enseignement, ces solutions temporaires sont extrêmement coûteuses pour l’Université, d’où la nécessité de trouver des endroits permanents. En automne 2017, le Bureau a déjà fait l’acquisition du 680 avenue Sherbrooke, un immeuble à deux minutes de marche du portail Roddick. 

À présent, de nombreuses classes s’y tiennent et la librairie universitaire de McGill, le James, a été placée au rez-de-chaussée. De nombreux espaces ont aussi pu être loués à l’Association des Étudiants de l’Université McGill (AÉUM) pour y installer des clubs étudiants (les bureaux du Délit y sont maintenant situés, ndlr). De nouvelles classes vont aussi probablement se tenir dans le bâtiment de l’ancien hôpital Royal Victoria.

À long terme, une autre solution plus drastique pourrait être envisagée. Outre le campus principal, McGill possède un campus satellite à Sainte-Anne-de-Bellevue (sur la pointe occidentale de l’île de Montréal, ndlr) qui héberge actuellement les Facultés d’environnement et d’agronomie. Dans le passé, ce deuxième campus, issu de l’ancien collège John Abbott, accueillait aussi la Faculté d’éducation. L’option de transférer une faculté vers l’ouest de l’île n’est pas retenue pour le moment, mais le CPDO n’exclut pas cette possibilité pour l’avenir.

Un patrimoine encombrant

L’un des principaux éléments avec lesquels le CPDO a besoin de composer est le caractère patrimonial d’une grande partie des bâtiments du campus. Le site de l’université est en effet protégé avec le reste du Mont-Royal et de ses environs par la Ville de Montréal. Ainsi, pour la moindre rénovation, la direction de l’Université doit obtenir l’accord de la Ville de Montréal et passer par un long processus administratif. Évidemment, impossible de penser à détruire ou à modifier fondamentalement un bâtiment !

L’hôpital Royal Victoria, qui a fermé ses portes en 2015 et qui est dans la mire de l’Université pour y installer des salles de classe, est l’un de ces bâtiments qu’il est relativement difficile de transformer. La Ville de Montréal a pris en charge une partie du complexe de l’ancien hôpital, qui comprend plusieurs bâtiments différents. Depuis une semaine environ, l’un des bâtiments a été transformé en refuge temporaire pour 80 itinérants montréalais. Le reste du complexe, qui est maintenant géré par l’Université McGill, devrait servir à pallier le manque d’espaces d’enseignement. Il sera transformé en un nouveau bâtiment universitaire dont la vocation se concentrera sur le développement durable et sur les politiques publiques.

Que la lumière soit

Outre les espaces d’enseignement, McGill compte augmenter le nombre d’espaces communs et de travail disponibles à tous les étudiants. Cameron Charlebois a souligné que ces espaces sont extrêmement importants pour les étudiants qui habitent à une grande distance de McGill, puisqu’ils ne peuvent pas rentrer chez eux facilement durant leurs longues heures de pause. 

Le CPDO mise sur les bibliothèques pour augmenter la quantité d’espaces communs. Des études d’affluence menées au début de semestre dernier ont montré qu’au jour le jour, environ 30% des étudiants entrent ou sortent de l’une des bibliothèques de McGill. Or, il est souvent difficile de trouver des bonnes places pendant les périodes de grande affluence, comme celles des examens finaux ou de mi-session. 

Pour le moment, la majorité de l’espace de toutes les bibliothèques du campus est utilisée pour entreposer des livres. Si McGill ne veut évidemment pas se départir de sa collection unique au Canada, elle compte tout de même transférer certains de ses livres les moins utiles vers un endroit qui est moins convoité. Selon Cameron Charlebois, une fraction importante des livres n’a pas été empruntée depuis dix ans. Numériser tous ces millions d’ouvrages nécessiterait une énorme mobilisation de main d’œuvre et un appareillage spécialisé, et au final coûterait beaucoup trop cher à l’Université.

Dans le cadre du projet Fiat Lux, McGill va donc transférer ses ouvrages les moins consultés vers un entrepôt en dehors du campus. Cela ne rendra pas impossible l’emprunt de ces ressources : selon le CPDO, il sera toujours disponible, grâce à un hypothétique système de navettes, de récupérer dans un délai de quelques heures un livre qui se trouve hors de la bibliothèque.

À l’écoute des étudiants

Pour s’assurer que les changements qu’ils provoqueront auront l’appui de toute la population estudiantine, le CPDO veut faire en sorte que le plus d’étudiants possible soient au courant du nouveau plan directeur et donnent leur avis sur le sujet. Jusqu’ici, les initiatives des membres du bureau ont de leur propre aveu peu porté fruit, certaines réunions ayant même été organisées sans qu’aucun étudiant ne vienne y assister. 

Le Bureau a par conséquent lancé sa campagne Have Your Say, qui repose notamment sur un court sondage en ligne à compléter et surtout sur des sessions d’information qui se tiendront un peu partout sur le campus cette semaine, et où les membres du Bureau s’adresseront directement aux étudiants de McGill.

 

Rafael Miró | Le Délit

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