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Désinvestissement McGill inspiré par Harvard

Que retiennent les activistes mcgillois de la réussite de la campagne pour le désinvestissement à Harvard ?

Parker Le Bras-Brown | Le Délit

Le 10 septembre dernier, l’Université Harvard annonçait la fin de ses investissements dans le secteur de l’énergie fossile, le résultat tant attendu de la campagne étudiante Fossil Fuel Divest Harvard (FFDH) (Désinvestissement Harvard, ndlr) depuis presqu’une décennie. L’Université Laval en 2017, Concordia en 2019, l’Université de Victoria en 2021 et Harvard le mois dernier : toutes se sont engagées à retirer leurs investissements dans les énergies fossiles. 

Dans les cinq semaines qui ont suivi l’annonce de Harvard, plus de 10 universités américaines, notamment l’Université de Boston et Dartmouth, se sont engagées à faire de même. Après plus d’une décennie de lutte, le groupe militant Désinvestissement McGill (Divest McGill, ndlr) continue dans l’espoir de réussir à pousser son université au désinvestissement. 

Un espoir incontestable

« [L’annonce] envoie un message important aux compagnies d’énergies fossiles, mais aussi aux campagnes étudiantes universitaires qui militent encore vers cet objectif », commente Zahur Ashrafuzzaman, un membre de Désinvestissement McGill. Selon lui, « [l’annonce] reste très prometteuse et encourageante » pour l’organisation mcgilloise, l’une des plus vieilles campagnes étudiantes de désinvestissement. 

À McGill, le Comité consultatif chargé des questions de responsabilité sociale (CAMSR) a rejeté deux fois (en 2013 et en 2016) les pétitions faites par Désinvestissement McGill. En 2020 également, le groupe a essuyé un troisième refus du CAMSR, un sous-comité du Conseil des gouverneurs de McGill. La réussite du groupe de Harvard redonne espoir à Désinvestissement McGill que son combat peut être gagné face à l’administration mcgilloise.

L’administration de McGill continue de défendre sa stratégie de diminution de l’empreinte carbone globale de ses investissements, qualifiant le désinvestissement comme « un geste symbolique ». Or, les revenus que tire l’Université de ses investissements ne sont pas symboliques ; conséquemment, la manière dont elle investit son capital ne peut être qualifiée de symbolique.

Désinvestissement McGill souligne que cette stratégie de décarbonation d’investissements doit s’accompagner du retrait complet des actifs financiers du secteur de l’énergie fossile et d’un réinvestissement dans des fonds qui ont un effet positif, plus responsable ou plus éthique sur le plan environnemental. Autrement dit, le désinvestissement vient définancer les industries du secteur de l’énergie fossile. 

« Les tactiques plus directes et novatrices de FFDH, comme l’interruption du match annuel de Harvard contre Yale en 2019, ont inspiré le groupe étudiant Désinvestissement McGill à utiliser à leur tour des moyens qui relèvent du coup d’éclat »

Des différences de tactiques et de structure

En mars 2021, le groupe FFDH a déposé une plainte auprès de l’État du Massachusetts, où se trouve l’Université Harvard. L’objet de la plainte était que les investissements de Harvard ne respectent pas la Uniform Prudent Management of Institutional Funds Act 2009 (UPMIFA), qui stipule que les institutions à but non lucratif, telle Harvard, ont une obligation d’investir dans un but altruiste plutôt que profitable. Quelques mois plus tard, le groupe étudiant a publié un guide pour déposer une plainte pour que d’autres ajoutent leur voix à celle de FFDH.

Les tactiques plus directes et novatrices de FFDH, comme l’interruption du match annuel de Harvard contre Yale en 2019, ont inspiré le groupe étudiant Désinvestissement McGill à utiliser à leur tour des moyens qui relèvent du coup d’éclat

Cependant, l’un des plus grands obstacles de la campagne de Désinvestissement McGill est la structure administrative de l’Université. Le Sénat, un organe directeur de McGill, est « contrôlé par [le Conseil des gouverneurs], l’administration centrale », remarque Gregory Mikkelson dans un entretien avec Unfit to Print en 2020. Toutes les décisions du Sénat sont assujetties à l’autorité du Conseil des gouverneurs.

En revanche, à Harvard, ​​l’administration est très décentralisée, avec les deux conseils de direction qui doivent se consulter avant toute décision exécutive. Ainsi, à son agenda pour 2021, Désinvestissement McGill a comme priorité de continuer ses efforts d’activisme en s’inspirant notamment des stratégies qui ont réussi à Harvard.


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