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Pluie de brume

Évangéline Durand-Allizé

Sous les lampadaires,

Pluie de brume.

La lune est grise et l’ombre des lampadaires fume.

Les étincelles des boulevards,

Les grandes avenues,

Petite pluie fait grise mine dans la rue nue.

     

Une lumière grandit…

Qu’est-ce ? …Ah ! Un autobus.

Le goudron sale est blanchi.

La lumière croît et les pneus crissent,

Sur le pavé mouillé même la lumière glisse.

La porte s’ouvre, les reflets bougent :

Talon noir et robe rouge.

L’autobus repart ; une odeur fleurie,

La dame se couvre la tête, le lampadaire rougit.

Parapluie,

Pluie en bruine,

Bruit de pluie.

Lui ne dit rien, acier gêné.    

Il voit dans le reflet d’une flaque la dame se poudrer le nez.

Son cœur brûle, inondé de napalm.      

Il veut la prendre dans des bras qu’il n’a pas.

Il fait briller plus fort sa lampe ; c’est son âme qui luit.

Alors d’un coup, elle s’appuie contre lui.

Il tient tellement à elle qu’il va devenir fou,

Se concentrant pour qu’il rende l’acier mou.     

Il étreint cette dame de son âme, cette dame qui la fait brûler.

Il lui demande poliment s’il peut l’embrasser.

Elle répond malicieuse et pose la main sur lui.

Leurs âmes s’embrassent et ne font aucun bruit.

Elle s’apprête à partir ; tout s’est passé si vite.

Seul un cheveu brun sera rescapé de sa fuite

Coincé entre deux morceaux d’acier rouillé.

Le lampadaire est tellement gris de pluie, qu’il en est mouillé.


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