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Brett Kavanaugh et la misère du monde

« A scary time » comme l’a si bien dit le président Donald Trump.

Béatrice Malleret | Le Délit

Résumons l’affaire Kavanaugh pour les gens qui ne seraient pas au courant : le tout nouveau juge (donnant à l’affaire son propre nom) à la Cour suprême des États-Unis fut admis au sein de cette mythique institution malgré les allégations de viol de quatre femmes, dont une ayant témoigné devant la cour, Christine Blasey Ford. Le vote des sénateurs américains fut serré : 51 pour, 49 contre.  Oui, serré. Peut-être ce mot vous parait-il difficle à avaler, ou encore résonne-t-il comme les cloches de l’église lors de funérailles. 

Serré ?

Donald Trump a été élu et gardé au pouvoir sans trop de questions a posteriori malgré la vingtaine d’allégations, que l’on aurait pu croire être une pluie acide, mais qui vraiment ne fut que bruine qui froisse une belle coupe de cheveux, et qui, comble du malheur, n’est que frustration de tous les jours. J’ai cru à tort, dans les derniers mois, que la situation politique paraissant aussi contagieuse que la peste nous divisait plus que le « cours normal » des choses l’aurait voulu. Mais rien ne nous divise sauf nous-mêmes, en tant que société, et si on en croit les mots de Foucault, « le sens n’[est] probablement qu’une sorte d’effet de surface, un miroitement, une écume, et (…) ce qui nous travers[e]profondément, ce qui [est] avant nous, ce qui nous sout[ient] dans le temps et dans l’espace, c’[est] le système […]» (Foucault, 1966). Mots plutôt difficiles à digérer si l’on a le désir contestataire de mettre le poids des événements sur le dos du«système ». Malheureusement, on peut marcher vers on-ne-sait-quoi en regardant nos pieds indépendamment de ce système politique corrompu, même si ce dernier le nourrit indéniablement. Ainsi, il me semble important de bien prendre toute la mesure de cette société aux allures surréalistes dans laquelle nous évoluons afin de considérer que le vote qui a fait entrer Brett Kavanaugh à la Cour suprême n’est peut-être pas aussi serré que ce que les apparences portent à croire, et ne relève pas du hasard.

Un chiffre

Entre 51 et 49, effectivement, il y a un faible écart numérique. Mais, à mon sens, le mur ridiculement haut de l’ignorance s’étend plus loin que ce que l’imaginaire aurait pu nous faire entrevoir et c’est peut-être ce qui nous surprend dans cette affaire. Comment 51 personnes peuvent-elles croire qu’un individu ayant très fort possiblement agressé d’autres individus soit en mesure de prendre des décisions d’envergure nationale, surtout si l’on considère le degré majeur desdites décisions… Si on ne peut respecter un être humain à la plus petite échelle singulière, comment peut-on s’attendre à être respecté en tant que société ? Enfin, ce que je tiens à exprimer, plus trivialement, tient en cela : si l’on élit des agresseurs, on se fera agresser collectivement. Si l’on ne peut mettre notre humanité en action et faire preuve d’empathie, comment peut-on espérer un jour se sensibiliser ? 


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