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Désinvestissement : pour bientôt ?

Le Sénat fait pression sur McGill pour désinvestir des énergies fossiles.

Le mercredi 12 septembre marquait la première réunion de l’année académique 2018–2019 du Sénat de McGill. Celle-ci a permis de présenter quelques comptes rendus, de faire le point sur l’institution ainsi que sur sa place dans le réseau universitaire, mais surtout d’aborder la question du désinvestissement de McGill des énergies fossiles.

Quelques mises à jour

L’incident diplomatique entre le Canada et l’Arabie Saoudite s’étant essoufflé,  Madame Fortier tient à souligner que la situation des étudiants concernés semble être retournée à la normale. « Tout le monde a travaillé dur pour minimiser le plus possible les impacts sur ces étudiants », affirme-t-elle. 222 des 223 étudiant·e·s concerné·e·s sont ainsi revenus pour le semestre d’automne.

La principale mentionne aussi, dans l’attente des prochaines élections provinciales, le 1er octobre, que des réunions avec chacun des chefs de partis ont été planifiées, dans l’optique de maintenir une continuité avec les récentes politiques de subventions universitaires.

Quel rôle pour le Sénat ?

Pendant près d’une heure, des discussions animées. Dans le contexte de la possibilité pour McGill de retirer tous ses investissements dans les énergies fossiles, le Sénat s’interroge sur son rôle dans la prise de cette décision ; en substance, celui-ci n’a pas le pouvoir de trancher, constituant toutefois un des corps politiques les plus importants de McGill. Ainsi, le comité directeur (chargé de planifier les discussions du Sénat et les motions qui y seront débattues), pose une question à l’assemblée : « Tenant compte de la division des autorités attribuées au Conseil des gouverneurs et au Sénat, celui-ci devrait-il  […] exprimer une opinion sur un enjeu déjà discuté par le Conseil[…]»? Christopher Manfredi, vice-principal exécutif et vice-principal aux études, y répond négativement ; certains objets entrent dans la juridiction du Conseil et d’autres dans celle du Sénat ; l’un ne devrait pas intervenir pour l’autre. Ici, la question du désinvestissement tombe dans les mains du Conseil. Manfredi affirme que : « Les sénateurs ne devraient pas intervenir, ils n’ont pas l’expertise nécessaire ».

Nous demandons aujourd’hui d’aider à remettre McGill du bon côté (de l’Histoire)

Les répliques fusent ; un représentant de la Faculté d’arts et sciences rappelle qu’au nom de la liberté d’expression le Sénat devrait être en mesure d’exprimer une opinion sur une décision cruciale, qui concerne tout le monde. De plus, un autre sénateur soulève l’opacité de la prise de décision des gouverneurs, leurs sessions étant presque toujours closes. Finalement, la question est posée : le Sénat devrait-il prendre position ? La motion passe, la réponse est oui.

Désinvestissement : une réalité ?

Le Sénat se met ainsi à discuter de l’intérêt de désinvestir. Le sénateur Gregory Mikkelson présente le cas de l’université d’Édimbourg, qui a supprimé tous ses investissements liés au charbon, au pétrole et au gaz. 140 universités ont à ce jour pris la même décision ; McGill devrait selon lui être la prochaine. Divest McGill, le groupe étudiant qui lutte depuis 2012 contre les investissements dans les énergies fossiles, a longtemps démontré les bénéfices environnementaux, sociaux et même économiques d’un tel désinvestissement ;  en 2016, c’était toujours non. « Cela nous a placé du mauvais côté de l’Histoire. […] Nous demandons aujourd’hui d’aider à remettre McGill du bon côté » déclare le sénateur. En adoptant cette décision, selon une autre sénatrice, McGill adopterait une position de leadership politique en matière de gouvernance responsable, et ferait sans doute l’objet d’une couverture médiatique positive qui redorerait son image.

La principale Fortier et Christopher Manfredi se défendent : « Il serait faux de dire que nous ne prenons pas cela au sérieux. […] Mais il faut garder en tête la complexité de la situation.» Manfredi tient à réitérer que la discussion présente est une grave erreur de gouvernance et que le Sénat ne devrait pas discuter de ce sujet. Selon lui, bien des universités prestigieuses, comme Yale, n’ont pas désinvesti. Il continue : « Nous ne faisons d’ailleurs que très peu d’investissements directs ».

Ce dernier compte ainsi parmi la petite minorité qui a voté contre la motion « d’informer le conseil des gouverneurs que le Sénat se porte en faveur, en principe, de la décision de désinvestir de toutes les sociétés dont l’activité principale est l’extraction, la distribution et/ou la vente de carburants fossiles […]». À suivre. 


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