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Ton corps t’appartient-il ?

Une réflexion sur l’appropriation sensible et profonde de notre corps.

Laurent Forget

Ambiance cabaret, sans coulisse, sans distance avec le public. Une convivialité et un partage avec les spectateurs s’installent dès le début, grâce à ce décor intime. 4 acteurs, 4 interprètes, une multitude de jeux de rôles et par-dessus tout, des remises en question. Sans masque et sans filet, Ton corps t’appartient-il ? est une pièce de la jeune troupe Minuit Moins Une Théâtre. Une équipe talentueuse et dynamique qui a su, de mains de maitres, éveiller les esprits en jouant une mosaïque de textes contemporains et classiques, traitant de la conception du corps humain et des différentes façons de se le réapproprier.

Provoquer la sensibilité et la réflexion 

Suis-je réellement maitre de mon corps ? Qui suis-je, que suis-je si je ne suis pas mon corps ? À qui, ou à quoi, appartient ce corps ? C’est moi, ma pensée, mon esprit ou encore mon âme. On distingue, de cette façon, en un seul être, un sujet et un objet car que signifie « appartenir » sinon être un objet, un bien, une propriété ? Cette dualité du sujet entraîne immédiatement des enjeux éthiques et bioéthiques : si mon corps m’appartient, j’ai le droit d’en user et d’en abuser comme je l’entends. J’en aurais ainsi un usage absolument libre. Nul autre que moi n’aurait le droit de s’en servir, du moins sans mon consentement préalable. Si cette affirmation semble de prime abord tout à fait acceptable, on peut néanmoins se rendre compte qu’elle peut très vite aboutir à des questions très polémiques. En effet, que penser de l’avortement ou de la prostitution ? Après avoir assisté à trois représentations de cette pièce depuis l’année dernière, je suis toujours aussi touchée — si ce n’est davantage avec le temps — par les sujets controversés traités avec finesse par les acteurs. 

Sexualité, séduction, virilité, féminité ou encore avortement furent quelques-uns des grands thèmes traités lors de ce puzzle théâtral. Grâce à un jeu aussi naturel que touchant, cette troupe a pour premier objectif — et pas des moindres — de provoquer la sensibilité du public pour l’inciter à la réflexion, voire même à la prise de position. But atteint avec brio grâce à une grande qualité des textes joués, allant de ceux de Georges Feydeau à François Archambault, en passant par quelques-uns de la plume des directrices artistiques elles-mêmes : Anaëlle Boyer-Lacoste et Celia Laguitton. 

« Nous ne sommes pas seulement corps, ou seulement esprit ; nous sommes corps et esprit tout ensemble. » George Sand

À vous la parole

Un échange avec les spectateurs vient ensuite clore chaque représentation de la troupe. « C’est essentiel pour nous d’entendre ce qu’a ressenti le public, d’avoir leur point de vue », déclare Célia Laguitton, directrice artistique et actrice. Quelle partie de votre corps préférez-vous ? Y‑a-t-il de nos jours un renouveau dans le regard que nous portons au corps ? Comment définissez-vous la féminité, la virilité ? Pourquoi a‑t-on tant besoin d’étiquettes ? Un point de convergence dans l’opinion s’est résumé au fait que la femme se respecte si elle-même est respectée. Si dans notre monde moderne, les termes féminité et virilité ont des significations floues sinon inexistantes, à mi-chemin se trouve l’humanité qui peut transcender ces concepts. 

Ainsi, mon corps ne m’appartiendrait donc pas : je suis mon corps. Mais cette affirmation ne doit pas aboutir à une forme de réaction contre la libération du corps, notamment libération sexuelle, au prétexte de principes moraux rigides. Elle doit aboutir à repenser une société qui offre le respect de chacun et l’auto-détermination de son corps, comme de sa volonté.

Si vous aussi vous désirez avoir la chance de découvrir cette troupe engagée et passionnée, allez sans plus attendre vous abonner à leur page Facebook pour suivre leurs prochaines représentations : à ne pas rater ! 


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