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Échec de La danseuse malade au Théâtre du Quat’sous

Jocelyne Montpetit aborde dans La danseuse malade l’œuvre écrite de Tatsumi Hijika, considérée pendant longtemps intraduisible.

Quand les lumières s’éteignent au Théâtre de Quat’Sous, le silence se fait et le public se prépare à un spectacle de danse d’une artiste qui a fait ses débuts sur la même scène, quelque trente ans plus tôt. Les lumières s’allument sur le corps nu de Jocelyne Montpetit, étendu sur une grande table au centre de la scène. Le chant d’un chœur se fait entendre. Petit à petit, le corps se meut, très doucement, en harmonie avec la musique et la lumière. Une dizaine de minutes passent avant que la danseuse ne se lève, doucement, pour arpenter lentement la salle. Quelques instants plus tard, les lumières s’éteignent, on entend une voix : le texte de Tatsumi Hijika (voix de Francesco Capitano, également conseiller dramaturgique) résonne dans la salle. Il évoque la danse, le corps malade de sa sœur. L’ambiance du spectacle est mise en place : il évoque davantage une pensée sur le corps que sur la danse. Quand les lumières se rallument, Jocelyne Montpetit réapparaît, vêtue d’une longue robe, et continue de se mouvoir sur la scène.

Shin Koseki
Le spectacle continue, pendant une heure, sur ce rythme : la danseuse arpente les planches pendant quelques minutes sur des musiques variées et, quand le noir se fait, la voix de Capitano retentit. À chaque fondu au noir, la danseuse se retire et se change pour revenir parcourir le lieu incessamment, de manière langoureuse. Elle hante la scène, se transforme successivement en différentes figures féminines tout en revisitant symboliquement les morts et les malades chers à l’œuvre chorégraphique d’Hijikata.

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Car il n’est pas réellement question de danse dans La danseuse malade, du moins pas comme on pourrait l’entendre dans une interprétation classique, pas pour les non-initiés dont je fais hélas partie. La danseuse se meut certes avec souplesse et légèreté, mais avec une telle lenteur que l’on se perd à attendre ‑sans résultat- un peu de rythme dans cette réflexion sur le corps qui semble n’être pas destinée à être communiquée au public.

En effet, si les mouvements languissants de la danseuse auraient pu séduire, puisque, après tout, même lenteur extrême a son charme et peut bercer le public, le visage de la danseuse ‑qui garde les yeux clos ou mi-clos pendant la majeure partie de ses apparitions sur scène- empêche toute connexion avec les spectateurs, les mettant à distance d’une expérience qui apparaît dès lors plus comme un exercice physique qu’un moment de partage artistique.

De plus, les costumes de la danseuse (des robes de Rocco Barocco, Issey Miyake, Betsey Johnson), qui auraient pu mettre en valeur le corps de Jocelyne Montpetit et enrichir son rapport à la danse, ne sont pas d’une grande originalité, et le spectateur, distrait par la lenteur du spectacle, finit même par se demander si leur coupe, mal ajustée, est un choix délibéré ou une simple erreur de parcours.

La danseuse malade est donc une expérience plutôt décevante dans l’ensemble.


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