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Divest McGill : et maintenant ?

Iyad Kaghad | Le Délit

Si le sentiment d’urgence face au choc climatique se fait ressentir plus intensément de nos jours qu’à n’importe quel autre moment auparavant, l’idée de faire des choix responsables face à l’environnement ne semble plus nouvelle. Que ces choix soient d’envergure restreinte, et concernent l’action individuelle, ou beaucoup plus large, se plaçant sur une échelle institutionnelle, les conversations les concernant semblent maintenant être inscrites dans notre quotidien. 

La possibilité pour McGill de prendre la décision de retirer tous ses investissements dans les compagnies dont l’activité primaire constitue l’extraction, la distribution, ou la vente d’énergies fossiles, n’a non plus rien de nouveau ; le mouvement étudiant Divest McGill tente de faire pression sur cette décision depuis 2012. Mais aujourd’hui, la tâche reste inaccomplie.

Le Sénat qui s’en mêle

En septembre 2018, le Sénat prenait position sur la question de manière inédite ; il n’est normalement pas d’usage pour ce corps politique d’exprimer une opinion, voire d’influencer une décision autre qu’académique. Mais certains sénateurs se sont sentis obligés d’intervenir ; parmi eux, Gregory Matthew Mikkelson, professeur spécialisé en philosophie environnementale. C’est ce dernier qui est à l’origine de la motion du Sénat d’informer le Conseil des gouverneurs, en charge de la décision, que celui-ci favorise, en principe, le désinvestissement des énergies fossiles. Cette motion a été adoptée à la grande majorité ; elle a pourtant été lourdement critiquée, notamment par le vice-principal exécutif et vice-principal aux études, le professeur Christopher Manfredi, la définissant comme une « grave erreur de gouvernance ».

Toutefois, plusieurs autres sénateur·rice·s, professeur·e·s ou étudiant·e·s, tel que Bryan Buraga, sénateur de la faculté d’Arts et Sciences, ont convaincu l’assemblée qu’exprimer un point de vue sur une décision affectant la communauté mcgilloise entière était un droit, voire un devoir du Sénat. 

La décision de nouveau reportée

Dans un récent communiqué aux étudiant·e·s, la Principale Suzanne Fortier a offert un compte-rendu des discussions qui ont eu lieu lors de la dernière réunion du Conseil des gouverneurs. Cette dernière explique avoir informé le conseil, auquel revient la décision finale de désinvestir, de la récente prise de position du Sénat, et rapporte que celui-ci « a accepté de présenter la position du Sénat au Comité consultatif chargé des questions de responsabilité sociale » (CCRS, ou CAMSR, abrégé en anglais, ndlr).

Ainsi, aucun vote n’a été effectué, et la décision est de nouveau reportée à la fin du mois d’octobre, lors de la prochaine réunion du comité. Selon un article du McGill Tribune, cette décision a été influencée par la présidente du conseil, Ram Panda, expliquant « qu’il serait irresponsable de la part du conseil de décider, étant donné qu’il est du rôle du comité consultatif chargé des questions de responsabilité sociale de donner des conseils » sur ses investissements financiers éthiquement ambigus.

La situation semble ainsi toujours stagner, mais peut-être pas pour longtemps ; une nouvelle manifestation de Divest McGill s’est organisée le 22 octobre dernier, à l’occasion de la réunion du CCRS, devant le bâtiment d’administration James. Le comité a déjà découragé la décision de désinvestir deux fois auparavant, en 2012 et en 2016. Il reste maintenant à voir si McGill refusera d’agir pour la troisième fois. Les membres de Divest McGill ont mis en évidence la nécessité de désinvestir des énergies fossiles et de se trouver « du bon côté de l’histoire ».

La décision au CCRS 

Une des membres de Divest McGill a ajouté que McGill a beau être très engagé sur la durabilité en apparence, l’administration n’a pas cessé d’investir plusieurs millions de dollars dans les énergies fossiles. Une étudiante, Violette, explique qu’elle considère l’environnement comme « le sujet le plus urgent » car « si on ne résout pas ce problème on aura pas la chance de résoudre les autres ». Une membre de Divest McGill, Morgen Bertheussen, déclare que « ça fait six ans que nous sommes ici et ça fait six ans que rien n’est fait. » et elle ajoute que si McGill avait fait le choix de désinvestir quatre ans auparavant, « il y aurait déjà eu retour sur investissement ». 


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