C’est dans l’amphithéâtre Leacock 132, à moitié rempli, que débute la première assemblée générale du semestre de l’AÉUM, le lundi 29 septembre. Immédiatement, l’ambiance professionnelle de la séance est déstabilisée par des problèmes techniques, et par le grand nombre de sièges vides dans la salle. Cette dernière se remplit néanmoins progressivement à mesure que le programme de l’assemblée s’écoule et que l’on se rapproche du moment clé : le vote sur la motion de grève pour le désinvestissement dans le génocide, porté par l’organisation des Étudiants pour l’honneur et la résistance de la Palestine (SPHR). La motion a été adoptée par une majorité écrasante, concluant une assemblée générale agitée.
Une assemblée mouvementée
Ce vote extrêmement conséquent ne s’est pas déroulé entièrement dans la fluidité. À son approche, un scepticisme ambiant s’est emparé de la salle. La cause : les risques contractuels auxquels l’AÉUM a fait face lors de la dernière grève en avril 2025, pouvant rendre une nouvelle grève difficile à gérer cette fois-ci. Ce scepticisme s’est illustré lors de la séance de questions qui a précédé le dépôt de la motion, lorsqu’un membre du public a remis en question la transparence de l’AÉUM, accusée d’avoir tenté d’empêcher que le quorum soit atteint. Cette prémisse a immédiatement été rejetée par la représentante de l’AÉUM, mais les multiples questions bureaucratiques adressées au président de l’AÉUM, Dymetri Taylor, n’ont fait qu’alimenter l’impression que l’association retardait volontairement le vote. Des doutes qui ont été renforcés par les divers problèmes techniques, qui ont pendant plusieurs minutes empêché les 200 étudiants présents en vision-conférence d’intégrer l’assemblée – bloquant ainsi momentanément le passage au vote.
Malgré ces péripéties, le processus a été respecté. À l’annonce de l’atteinte du quorum, un tonnerre d’applaudissements éclate, avant que Sumayya Kheireddine ne monte derrière le podium pour présenter la motion. Sans mâcher ses mots, elle réitère ce que la grève a pour but d’exiger de McGill. Les demandes se résument par un désinvestissement total de l’Université dans tous les projets de recherche en partenariat avec des fabricants d’armes qui commercent avec Israël. Kheireddine dénonce aussi « les efforts de McGill visant à affaiblir la démocratie étudiante ainsi que d’isoler le mouvement (tdlr) ». Elle affirme que « les universités doivent être un forum de développement de la conscience politique, mais sont devenues des arènes de répression, facilitées par leurs propres administrations ». Le discours s’est suivi d’une courte séance de questions dans laquelle Kheireddine a eu l’opportunité de réitérer la nature non violente de la grève.
Un résultat conséquent, mais peu surprenant
Sans surprise, le résultat du vote est quasi unanime, avec seulement deux abstentions et trois votes contre. La motion passe donc, ouvrant la voie à une grève des étudiants le 7 octobre, exactement deux ans après l’attaque terroriste du Hamas ayant déclenché une guerre d’une terrible violence doublée d’une catastrophe humanitaire à Gaza. La motion a été ratifiée via un vote en ligne le 6 octobre.
Interrogée par Le Délit, Sumayya Kheireddine se dit « très fière du corps étudiant, même si ce n’est pas une surprise. C’est une mesure populaire, souhaitée par une très grande majorité ». Membre de cette majorité, Basil Atari, étudiant palestinien de quatrième année en sciences politiques, « espère que la grève apportera un changement », même s’il y croit peu. Il réitère aussi son souhait que la grève se déroule de manière paisible, pour qu’elle puisse trouver son sens et mieux résonner auprès de la communauté mcgilloise.
McGill inquiétée par de potentielles violences
Cette grève est lourdement connotée ; elle rappelle de mauvais souvenirs à l’Université. En effet, au cours de plusieurs grèves et manifestations en soutien de la cause palestinienne ayant eu lieu au cours des deux dernières années, des confrontations violentes ont été signalées. La possibilité que cela se répète rend McGill craintive. L’Université avait d’ailleurs déposé une injonction controversée pour empêcher toute forme d’intimidation sur le campus, injonction bloquée par un juge de la Cour supérieure du Québec. Certains étudiants craignent également que la grève perturbe la vie étudiante. Souhaitant préserver son anonymat, une des étudiantes ayant voté contre la motion explique que « les partisans de la grève ne comprennent pas à quel point l’insécurité se fait ressentir à travers l’Université ».
Une grève qui divise donc, reflétant les tensions sur le campus. Au moment de l’écriture de cet article, la grève n’a pas encore eu lieu, mais McGill se prépare déjà en matière de sécurité. Elle exigera notamment que tous les membres de la communauté mcgilloise soient munis de leur carte universitaire pour accéder au campus le 7 octobre.