Sous-sol animé, musique forte, gobelets rouges partout. Clic-bip ! Un petit objet argenté émet un flash brutal : sourires figés, texture granuleuse, yeux rouges partout. C’est le retour des caméras numériques.
Ces appareils compacts très populaires dans les années 2000 ont vite été remplacés par les appareils photo intégrés aux téléphones intelligents que l’on connaît aujourd’hui. Pourtant, une vague de popularité pour ces machines a vu le jour dans les dernières années, s’inscrivant dans la mode Y2K (an 2000). Et peut-être aussi dans une réaction aux esthétiques trop lisses des derniers temps, comme la tendance clean girl, idéalisant une apparence nette et minimaliste.
Une tendance nostalgique
En plus d’être un accessoire distinctif, l’appareil photo numérique apporte quelque chose que le multifonctionnel iPhone ou tout autre téléphone cellulaire n’offre pas : une réponse à un certain besoin de nostalgie. Miya, étudiante à l’Université de Montréal, se reconnaît dans ce sentiment : « J’avais une caméra numérique quand j’étais toute jeune, à cinq ou six ans, avec laquelle je m’amusais beaucoup, sans trop me poser de questions quant à la qualité des images ou de mon cadrage. Le fait de réutiliser aujourd’hui cette même caméra évoque une douce nostalgie. Les photos prises avec une caméra digitale, veut, veut pas, me rappellent l’enfance, et transforment des images parfois banales en souvenirs empreints d’émotions. »
Le coût de la technologie ultra-performante – qui offre une qualité de photos exceptionnelle et une utilisation tellement simple qu’elle en devient automatique – semble être celui de l’authenticité.
Plutôt que de reproduire l’image exactement telle qu’on la voit, on valorise, en choisissant l’appareil numérique, l’émotion derrière la scène. La qualité brute, le flash intense, le grain, le mouvement flou des sujets ; toutes ces imperfections font le charme des photographies. Le hasard trahit une sincérité. Lhassa, étudiant à l’Université McGill, comprend pourquoi ces appareils sont attirants : « Ils donnent un aspect vintage et granuleux aux photos, qui pourrait presque se comparer à l’argentique, mais justement sans les coûts importants de l’achat de pellicules et de leur développement. »
Les technologies rétro comme refuges
Ce retour au rétro n’est pas qu’esthétique : il traduit un mouvement culturel plus large. De plus en plus de personnes réalisent l’ampleur de leur dépendance aux téléphones cellulaires et autres appareils intelligents. L’utilisation grandissante d’appareils photo numériques peut être une échappatoire à cette dépendance, comme l’est celle d’objets dits « analogiques », tels que les vinyles ou les téléphones pliables (flip phones).
On peut aussi expliquer la résurgence des appareils photo numériques par l’état actuel du monde : crise climatique, instabilité politique, évolution fulgurante de l’intelligence artificielle… Les derniers millénariaux, la génération Z et la nouvelle génération Alpha, en début de vie adulte, semblent se tourner vers ce qui leur rappelle leur enfance et le « bon vieux temps », alors qu’ils affrontent un futur incertain.