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Un Nazi ovationné à l’Assemblée

Le président de la Chambre des communes du Canada démissionne.

Rose Chedid | Le Délit

Le 22 septembre dernier, lors de la visite d’État du président ukrainien Volodymyr Zelensky, la chambre des communes du Canada a ovationné Yaroslav Hunka, alors présenté comme un vétéran ayant combattu pour l’indépendance de l’Ukraine contre la Russie pendant la seconde guerre mondiale. Lors de l’ovation, l’ensemble des députés et Volodymyr Zelensky se sont levés pour applaudir l’homme. Cette décision d’ovationner l’ancien combattant avait été prise par Anthony Rota, président de la Chambre des communes depuis 2019, et député libéral de la circonscription de Nipissing-Timiskaming (Ontario). À la suite de cette ovation, des découvertes sur le passé de Yaroslav Hunka ont troublé la classe politique et choqué la société canadienne. 

Un ancien soldat SS ?

Rapidement après cette ovation, plusieurs médias et de nombreuses associations, comme le journal Forward, ont dévoilé
la réelle identité de Yaroslav Hunka. En effet, plusieurs preuves montrent que ce dernier a combattu pour la 14e Division Waffen Grenadier de la SS. Créée en 1943 par l’administration militaire nazie, cette division était essentiellement composée de recrues et volontaires ukrainiens de la région de Galicie (ce qui lui vaudra le nom « SS Galicie »), située dans l’ouest de l’Ukraine. Cette unité avait pour but de combler les pertes parmi les troupes nazies, qui s’affaiblissaient dans un conflit enlisé à Stalingrad.

Bien qu’elle ait été formée à la fin de la guerre, la division n’a pas été exemptée de commettre des crimes. Il est à noter que la SS Galicie a tout de même fait partie de la Waffen SS, la branche militaire principalement utilisée par le troisième Reich pour commettre des crimes de guerre, crimes de génocide et crimes contre l’humanité durant la seconde guerre mondiale.

L’association Les Amis du Centre Simon Wiesenthal pour les Études de l’Holocaust (ACSW), une association consacrée à la mémoire de la Shoah, a considéré cet événement comme « choquant ». Et à travers un communiqué adressé le 24 septembre, l’association a voulu rappeler que « cette unité [la SS-Galicie, ndlr] a été responsable du meurtre de masse de civils innocents, d’un degré de brutalité et de malice inimaginable (tdlr) ».

Des excuses à la démission

Le 25 septembre, le lendemain de la révélation, le président de la Chambre des communes a présenté ses premières excuses. Malgré cela, l’embarras provoqué ne s’est pas dissipé et les premiers appels à la démission d’Anthony Rota ont commencé.
Le Nouveau Parti Démocrate et le Bloc Québécois ont premièrement réclamé cette démission, avant d’être rejoints par des membres de la même famille politique que le président (Parti Libéral du Canada). Mélanie Joly par exemple, la ministre des affaires étrangères du Canada, a affirmé le 26 septembre : « Ce qui s’est passé vendredi était inacceptable, embarrassant pour la Chambre et pour les Canadiens. Je pense que le président devrait écouter les membres de la chambre, et résigner. » De son côté, l’association ACSW a appelé Rota à résigner « pour la crédibilité des institutions du parlement ».

Finalement, le 26 septembre, quatre jours après l’ovation, Anthony Rota a présenté sa démission du poste de président de la Chambre des communes, en affirmant qu’il assumait « la responsabilité totale » de ses actions. Plusieurs partis ont réagi, comme le NDP, affirmant qu’ils « ne s’en réjouissaient pas » mais que c’était la « bonne décision à prendre ».

« Bien que la polémique semble toucher à sa fin, les conséquences de voir Volodymyr Zelensky applaudir un ex-soldat nazi vont marquer l’image de ce dernier encore quelques temps. » 

À la suite de cette démission, Le Délit a interrogé une source anonyme, membre du Parti Libéral du Canada. Selon cette source, « lorsqu’on a un rôle aussi important, on est responsable même de ce dont on n’est pas au courant ». La source a par la suite ajouté que « c’est triste parce que c’est quelqu’un [Anthony Rota, ndlr] qui est sincèrement dédié aux institutions, par contre une erreur très grave a été commise, donc il était de son devoir de quitter ».

Bien que la polémique semble toucher à sa fin, les conséquences de voir Volodymyr Zelensky applaudir un ex-soldat nazi vont marquer l’image de ce dernier encore quelques temps. En effet, depuis le début de la guerre en Ukraine, le gouvernement de Vladimir Poutine a mené une propagande massive caractérisant le président ukrainien de Nazi. Cette erreur de la part de Mr. Rota, faisant paraître la Chambre de communes et M. Zelensky comme gratifiant un Nazi, ne va donc que conforter Poutine dans l’établissement de sa propagande.


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