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Dix chandelles (en cire de soja) pour le FVM !

Le Festival végane de Montréal fête ses dix ans d’existence.

Gabrielle Genest | Le Délit

Le Palais des congrès était bondé, les 30 septembre et 1er octobre derniers, à l’occasion de la dixième édition du Festival végane de Montréal (FVM). Plus de 120 exposants, allant d’incontournables comme Aux vivres et BKIND à des entreprises véganes bourgeonnantes telles que Ethically Warm et WOOP4, en passant par des sanctuaires pour animaux de ferme et des organisations militantes, accueillaient les centaines de véganes et végécurieux·ses qui déambulaient entre les kiosques.

L’alimentation végétale à l’honneur

La facette la plus connue du véganisme est sans aucun doute l’alimentation à base de plantes (plant-based) ; il est donc peu étonnant que plus de la moitié des kiosques étaient dédiés à des produits alimentaires. Les bouchées gratuites permettaient au public d’échantillonner des saveurs des plus variées, notamment du tofu façon shish taouk, du tempeh style barbecue, des biscuits au matcha et chocolat blanc, des champignons shiitake en mode porc effiloché, et plus encore. Signe de l’innovation de la scène alimentaire végane, il était même possible d’essayer du poisson végétal : le saumon fumé de BY2048 – à base de carottes – avait la texture et le goût parfaits pour un bagel lox, tandis que le tartare mahi-mahi de WOOP4 était si réaliste qu’il a presque donné la frousse à notre journaliste végane !

« Signe de l’innovation de la scène alimentaire végane, il était même possible d’essayer du poisson végétal »

Les boissons à base de plantes étaient également mises de l’avant durant le FVM, du kombucha au lait de soja. Particulièrement populaire, le kiosque de la Crémerie des Trois- Rivières permettait au public majeur de goûter ses crèmes alcoolisées à base de lait d’avoine, à saveur de chocolat-noisette ou d’espresso. L’alcool végane était aussi au cœur de la conférence de Priya Rao, au sujet des accords entre mets et vins véganes, car – contrairement à la croyance populaire – tous les vins ne sont pas véganes : plusieurs vigneron·ne·s utilisent encore des substances animales (notamment des blancs d’œuf ) dans le collage et la filtration du vin, sans compter l’utilisation de fertilisant animal dans les vignobles ou de cire d’abeille dans les amphores. Certaines bases de données en ligne, telles que The Social Herbivore pour les vins canadiens ou Barnivore à l’échelle internationale, offrent toutefois un répertoire de vins véganes.

Végane de la tête aux pieds

Le véganisme est toutefois loin de n’être qu’un régime alimentaire : ce mode de vie s’applique à tous les aspects du quotidien, de nos vêtements à nos soins corporels. Plusieurs entreprises mettaient ainsi de l’avant des alternatives végétales et sans cruauté aux éléments de notre quotidien, comme Les Pétards avec leurs chandelles à base de cire de soja ou encore Bego et leurs élégantes sandales en cuir d’ananas. Ethically Warm, qui participait à son premier FVM, a particulièrement interpellé notre journaliste avec ses parkas, doudounes et vestes écologiques, biodégradables, éthiquement et localement produits et – bien sûr – véganes. « Notre but, souligne la fondatrice Alexandra Gavrila, était d’offrir une alternative aux Kanuk et Canada Goose, ces manteaux canadiens hauts de gamme auprès desquels, au niveau de l’éthique et du véganisme, on ne trouvait toutefois pas notre compte », ajoutant que les alternatives véganes existantes – à base de plastique – n’étaient pas pour elle la solution. 

BKIND, présentateur officiel du FVM, a également attiré l’attention de notre journaliste : l’entreprise accueillait les festivalier·ère·s à l’entrée du festival avec un immense kiosque accompagné de figures gonflables (représentant notamment Luna, le chien de la fondatrice) ainsi que d’une station de manucures express ! Les produits de beauté et les soins pour la peau de BKIND sont depuis plusieurs années une valeur sûre de la scène végane montréalaise, et l’entreprise est particulièrement reconnue pour la qualité de ses vernis à ongle non toxiques. Pour la fondatrice de BKIND Marilyne Bouchard, cette dixième édition du FVM rend évidente l’évolution du véganisme depuis une décennie : « ce n’était pas cool » de vendre des produits végétaliens et sans cruauté au milieu des années 2010, mais être végane en 2023 est « un outil marketing » inestimable pour les entreprises, et le FVM, tout comme BKIND, ont évolué conséquemment à cette popularité croissante du mouvement végane au Québec.

Pour les animaux

Fondamentalement, le véganisme est une position sociale et politique qui s’oppose à l’exploitation animale. Il aurait donc été difficile de célébrer une dixième édition du FVM sans mettre en valeur le travail des activistes qui luttent, chacun·e à leur manière, pour la cause animale. Du côté des exposants, l’on trouvait notamment Montreal Pig Save, un regroupement qui organise des vigiles devant des abattoirs montréalais afin de commémorer les derniers moments des cochons qui y seront tués, et Plant Based Treaty, une organisation mondiale qui vise à convaincre des acteurs municipaux, nationaux et internationaux à effectuer un virage végane dans le but de mettre les systèmes alimentaires au cœur du combat contre la crise climatique, étant donné les impacts dévastateurs de l’agriculture animale sur nos écosystèmes et la biodiversité. 

Les refuges pour animaux – tant locaux qu’internationaux – étaient eux aussi à l’honneur. Le Sanctuaire pour animaux de ferme de l’Estrie (SAFE) bénéficiait d’un kiosque entouré de porte-parole et de festivalier·ère·s enthousiastes ainsi que d’une conférence touchante donnée par la fondatrice du SAFE, Catherine Gagnieux. Cette dernière a raconté en toute humilité les grandes difficultés auxquelles elle fait face dans le cadre de sa mission, du manque de financement et de bénévoles au fardeau émotionnel qui accompagne l’obligation de refuser de nouveaux résidents, faute de place. Elle endure ces défis grâce à la beauté indicible du lien qui peut unir les animaux humains aux animaux non humains, puisque même si ces derniers n’ont pas de voix, « ils parlent, et il faut juste apprendre à les écouter ». 

Gabrielle Genest | Le Délit

Dans sa propre conférence, Sarah Heiligtag abondait dans le même sens, soulignant la force du pouvoir de connexion entre les animaux humains et non humains : « Lorsque des enfants viennent au sanctuaire et regardent un cochon dans l’œil, cela change tout (tdlr). » La philosophe suisse a fondé une école d’éthique au sein même de son sanctuaire pour animaux, et elle accompagne des propriétaires de fermes dans la transformation de leurs fermes animales en fermes véganes, une méthode d’agriculture éthiquement et écologiquement durable connue sous le terme de TransFARMation.

« [D]ans la mesure où elle implique des violences et des dommages non nécessaires, […] l’exploitation animale est injuste et moralement indéfendable »

Déclaration de Montréal

Sarah Heiligtag n’était pas la seule philosophe à donner une conférence : Martin Gibert, Valéry Giroux et François Jaquet ont également participé au FVM afin d’aborder la Déclaration de Montréal. Ce texte, qui célèbre son premier anniversaire le 4 octobre 2023 (soit la Journée mondiale des animaux), déclare principalement que « [d] ans la mesure où elle implique des violences et des dommages non nécessaires, […] l’exploitation animale est injuste et moralement indéfendable ». Signée à ce jour par plus de 550 chercheur·se·s en philosophie morale et politique, ce document « signifie au grand public qu’un groupe conséquent d’expertes et d’experts s’accorde sur cette conclusion », selon François Jaquet, et constitue un outil de taille pour les activistes de la cause animale. 

→ Voir aussi : L’éthique animale sous la loupe avec François Jaquet


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