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Messages politiques de l’AÉUM

Après plusieurs controverses, le conseil législatif encadre les messages politiques de l’association étudiante.

Mahaut Engérant | Le Délit

Au cours du semestre d’automne 2020, l’Association étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a publié plusieurs messages à dimension politique, dont deux traitant de solidarité internationale. Ces derniers, abordant respectivement la situation à Hong Kong et la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ont chacun suscité la controverse. À la suite de ces évènements, Brooklyn Frizzle, vice-président·e aux Affaires universitaires, a proposé deux motions pour encadrer les messages politiques de l’AÉUM lors du conseil législatif du 3 décembre dernier.

La première motion, adoptée à treize voix contre six, stipule que le comité exécutif devra obtenir l’accord du conseil législatif avant de publier un message politique ou de signer une pétition ou une lettre ouverte au nom de l’AÉUM. La seconde motion concerne spécifiquement les communications de solidarité internationale et établit treize principes, ayant trait notamment à la démocratie et aux droits humains, au nom desquels l’association étudiante pourrait émettre des messages de solidarité internationale. Brooklyn Frizzle a expliqué que ces principes ont été établis à partir des documents de gouvernance de l’association, des positions que la société a prises par le passé et des positions d’organisations internationales « progressistes ». Cette motion a été le centre de plus de quatre heures de questions et de débats au sein du conseil. 

N’ayant pas fait campagne sur des positions politiques, plusieurs conseiller·ère·s ont fait valoir qu’il·elle·s ne pouvaient ratifier une telle liste de principes sans consulter au préalable leur électorat. Pour le conseiller Gundermann, cette motion est une tentative de positionner l’AÉUM sur le spectre politique. Comme lui, d’autres conseiller·ère·s se sont demandé si l’AÉUM devrait continuer à publier des messages politiques. Le représentant du caucus du sénat Darshan Daryanani a aussi rappelé que l’AÉUM avait reçu une pétition signée par 630 membres de la communauté est-asiatique. Les signataires disaient avoir subi des expériences de racisme à la suite de la publication par l’association étudiante du message en soutien à 12 jeunes Hongkongais. Le représentant a demandé si cette motion ne serait pas une source de division supplémentaire au sein de la communauté mcgilloise. 

« Il serait préférable d’avoir des principes desquels dériver les positions de l’AÉUM, plutôt que de s’aligner sur la volonté de la majorité des étudiants »

Maheen Akter, vice-présidente à la vie étudiante

Pour Brooklyn Frizzle, ne pas ratifier une telle motion consisterait à fuir les responsabilités politiques de l’AÉUM. Selon iel, il en relève de la responsabilité des conseiller·ère·s et des exécutant·e·s de l’association d’être des chef·fe·s de file en matière de justice sociale et de droits humains, et l’AÉUM devrait être une association progressiste servant d’abord et avant tout les groupes marginalisés. La vice-présidente à la vie étudiante Maheen Akter a ajouté qu’il serait préférable d’avoir des principes desquels dériver les positions de l’AÉUM, plutôt que de s’aligner sur la volonté de la majorité des étudiant·e·s.

La proposition la plus controversée de la motion concernait le caractère anticapitaliste de l’association étudiante. Aux yeux de Brooklyn Frizzle, l’AÉUM serait une organisation anticapitaliste de par ses précédentes prises de positions, les services qu’elle offre et les organisations anticapitalistes avec lesquelles elle collabore. À l’inverse, pour le conseiller Reed, cette caractérisation serait hypocrite de la part de l’association, l’AÉUM disposant elle-même de fonds d’investissements.

Finalement, la motion a été amendée pour retirer les références à la démilitarisation, à l’anticapitalisme, aux frontières ouvertes et au démantèlement des classes sociales. La Charte québécoise des droits et libertés de la personne a aussi été ajoutée comme référence en matière de droits humains, aux côtés de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Déclaration universelle des droits humains. La motion ainsi amendée a été adoptée à 18 voix contre 2.


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