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La frappe d’Alpha

Retour sur le premier album fort attendu d’Alpha Wann.

Courtoisie d'Alpha Wann

Le 20 septembre, à 18h, Alpha Wann a sorti son premier album UNE MAIN LAVE L’AUTRE, UMLA, sur son label Don Dada Records. Membre de L’Entourage, et 1995, originaire du 14ème arrondissement de Paris, Alpha Oumar Wann de son vrai nom, est un cas à part. Ayant pu très tôt s’imprégner d’une culture rap new-yorkaise, grâce à une partie de sa famille habitant là-bas, ses débuts sont l’occasion d’étaler par les rimes et les  fringues une attitude résolument east coast : technicité, polos rayés, lunettes Cartier. Avec 1995, il a fait partie d’un retour à un rap old school, basé sur des samples, des rythmes simples, et de ce fait, a longtemps été décrit comme rappeur « à l’ancienne ». Son premier projet, Alph Lauren, en 2014, a cette fibre-là. Du rap détendu, technique mais simple. Les deux autres volets de la trilogie Alph Lauren, en 2016 puis 2018, marquent une transition progressive vers un son de plus en plus défini, en gardant des samples, mais en intégrant des sonorités nouvelles. Hologram Lo, le beatmaker de 1995, avec qui Alpha a beaucoup collaboré, marque beaucoup le son du rappeur.

Rime, samples et flow

UMLA est la suite logique de l’oeuvre d’Alph Lauren. Après plus de trois ans de travail, des featurings jetés – un avec Joke et un avec Nekfeu, de multiples freestyle et une mixtape, l’attente était très grande ; et elle en valait le coup. 58 minutes, 17 titres, calibrés et variés, un fil conducteur : un album complet. Tous les sons sont très travaillés, Philly Flingue [surnom d’Alpha Wann, ndlr] pouvant pleinement exprimer sa technique, avec sa versification et ses schémas rythmiques, répondant pleinement à l’instrumental. Différents beatmakers ont travaillé sur le projet, Hologram Lo’ sur la majorité des morceaux, mais aussi VM The Don et Diabi, du label Don Dada, JayJay et Lama on the beat du collectif Eddie Hyde. Mais il y a pourtant une véritable unité musicale sur tout le projet. Seulement cinq featurings, avec Sneazzy d’1995 sur PARACHUTE CHANEL, Doums de l’Entourage sur LA LUMIÈRE DANS LE NOIR, ainsi qu’Infinit’ et OG L’Enf’, d’Eddie Hyde.

L’album est très varié. On retrouve des morceaux à thème, comme POUR CELLES, dans laquelle il raconte sa vie amoureuse et OLIVE ET TOM, sur la jeunesse du quartier Pernety. Celui-ci commence par un dialogue pour contextualiser le morceau, une forme très classique de rap. On retrouve surtout dans cette dernière une dimension politique forte, portant une critique virulente des politiques sociales françaises à travers tout le morceau, ce qui est rare dans le reste de sa discographie. Mais on trouve aussi de l’égo-trip, comme dans STARSKY ET HUTCH, un morceau rapide, entraînant, assez loin de ses débuts. On le retrouve aussi sur des morceaux plus personnels, comme UNE MAIN LAVE L’AUTRE, un morceau touchant, évoquant spleen, échecs amoureux et peur de la défaite. C’est la force pour moi de cet album, puisqu’il parvient à traiter de vastes sujets, avec des sons variés. On kiffe comme on pleure, et on apprécie une musique très recherchée, calibrée et qui mérite vraiment d’être connue.


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