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Les partis à l’écoute de la jeunesse

L’Institut du Nouveau Monde organise le Dialogue jeunesse où les chef·fe·s ont répondu à des questions soumises par des jeunes. 

Béatrice Malleret | Le Délit

Vendredi 17 août  avait lieu le premier Dialogue jeunesse des chefs, un évènement rassemblant les quatre chef·fe·s des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale. Cette soirée, animée par le directeur du quotidien Le Devoir Brian Myles, a été organisée conjointement par l’Institut du Nouveau Monde (INM) et Le Devoir. Le tout a eu lieu au pavillon Hall de l’Université Concordia.

Environ 700 personnes étaient présentes pour assister à l’évènement, dont 400 faisant partie de l’École d’été de l’Institut du Nouveau Monde, qui avait pour thème « Deux millions à changer le monde », en référence au poids démographique des 18–35 ans, qui représentaient 28% de l’électorat québécois en 2018.

Questions-réponses

La soirée n’était pas axée sur des échanges directs entre les chef·fe·s, mais plutôt sous un format « questions-réponses ». L’animateur Brian Myles a pigé 20 questions parmi celles qui avaient été préalablement soumises par des jeunes des quatre coins du Québec, chaque question étant adressée à un·e seul·e des quatre chef·fe·s, de façon aléatoire. Étaient présent·e·s le premier ministre Philippe Couillard du Parti Libéral du Québec (PLQ), Jean-François Lisée du Parti Québécois (PQ), François Legault de la Coalition Avenir Québec (CAQ) ainsi que Manon Massé de Québec solidaire (QS).

Les questions ont été précédées d’un discours d’introduction livré par Julie Caron-Malenfant, directrice générale de l’INM, ainsi que d’une allocution d’ouverture de chacun·e des chef·fe·s.

Les sujets abordés par les questions étaient variés, passant de l’indépendance du Québec à l’évasion fiscale, de la protection du français aux cryptomonnaies ou encore au bonheur de la population.

Économie et santé 

Le thème ayant suscité le plus de question était sans doute celui de l’économie. François Legault a répondu à des questions concernant le fardeau financier du vieillissement de la population et l’inclusion économique des jeunes. Le chef de la CAQ a mis en avant l’importance de l’éducation en rappelant le plus faible taux de diplomation d’études secondaires du Québec en comparaison avec l’Ontario. Il a également proposé le dépistage des troubles d’apprentissage dès l’âge de trois ans.

Pour sa part, Jean-François Lisée a dû répondre à des questions concernant les achats étrangers d’immobilier local ainsi que la gestion des mines de cryptomonnaies. Le chef du PQ s’est dit à l’affut de situations comme celle prévalant en Colombie-Britannique ou en Ontario, où la valeur des logements a fortement augmenté durant les dernières années, et s’est dit prêt à imposer des limites, si nécessaire. Il a également mis en garde contre l’achat étranger de terres agricoles.

Manon Massé a répondu à des questions concernant l’évasion fiscale ainsi que le Fonds des générations. La co-porte-parole de QS a mentionné la possibilité de taxer le commerce en ligne, évalué à 700 millions de dollars par année, et a déclaré que l’indépendance permettrait au Québec de posséder tous les leviers  en ce qui a trait aux « lois complaisantes ». Pour ce qui est du Fonds des générations, Manon Massé a plutôt mis l’accent sur l’importance de gérer la « dette environnementale ».

« Si dans 30 ans il n’y a plus de planète, il n’y a plus de dette ! » s’est-elle exclamée.

De son côté, le premier ministre Philippe Couillard a surtout eu l’occasion de s’exprimer sur la santé, notamment avec une question concernant le salaire des médecins et les conditions de travail des infirmières. Une autre question portait sur la santé mentale des étudiants post-secondaires. Le chef du PLQ a mis l’accent sur un financement concret et soutenu des services de premières lignes et a mentionné un projet visant à réduire le temps supplémentaire obligatoire pour les infirmières tout en se gardant d’aborder le salaire des médecins. De plus, il s’est engagé à mettre en place une politique nationale en matière de santé mentale pour les étudiant·e·s de niveau post-secondaire.

Désaccord sur la francisation 

Le thème de l’immigration et de l’inclusion est celui qui a provoqué le plus de réactions au sein de l’assistance. En effet, interrogé sur le déclin du français au Québec, François Legault a mis l’accent sur l’importance de la francisation des immigrant·e·s tout en évoquant la possibilité de ne pas accorder la citoyenneté aux immigrant·e·s échouant un test de français après trois ans. Une partie de la foule a immédiatement répondu sous forme de huées, si bien que l’animateur Brain Myles a dû appeler au respect après la question. La mesure a également été dénoncée par les trois autres chef·fe·s en point de presse après l’évènement.

Sous ce même thème, Philippe Couillard a dû s’exprimer sur la question de la reconnaissance des diplômes étrangers et l’inclusion professionnelle des immigrants. Il a eu l’occasion de critiquer indirectement l’approche du chef caquiste en préconisant plutôt l’apprentissage du français sur le lieu de travail. Il a également proposé la mise en place d’un commissaire à l’accès à la profession pour favoriser l’accès aux ordres professionnels aux nouveaux·elles arrivant·e·s.

Les réactions au débat

La soirée a gardé un ton plutôt convivial, voire décontracté, à l’approche du déclenchement officiel des élections, les intervenant·e·s se permettant des blagues à plusieurs occasions.

Questionnée par Le Délit, Manon Massé a exprimé un avis positif sur la soirée. « Premièrement, ils [les jeunes] ont entendu les partis parler de leurs propositions et non pas [des adversaires]. Ça, c’est déjà une dimension très positive. Pour moi, la formule est vraiment à refaire puisque qu’elle nous oblige, nous les leaders de parti, à se laisser interpeller par les préoccupations de ceux et celles qui font le monde et qui vont le faire dans le futur », a‑t-elle expliqué au Délit.

De son côté, Jean-Martin Aussant, candidat du Parti Québécois et fondateur du défunt parti souverainiste Option nationale, maintenant fusionné avec Québec solidaire, s’est également exprimé en faveur de ce genre de soirée. « Chaque débat, surtout ceux-ci, où il y a tous les de parti réunis, des médias et des étudiants, est important pour faire connaître les plateformes de chaque parti, parce que je pense qu’un des maux modernes des élections, c’est que les gens votent souvent sans avoir une idée du contenu de chaque plateforme, ils votent sur des impressions, des sondages, etc. […] C’est la première édition, mais il faut que ça devienne une tradition », s’est-il exprimé au Délit.

Si l’évènement a reçu généralement des accueils positifs de la part des chef·fe·s invité·e·s, tou·te·s n’étaient pas ravi·e·s par l’organisation de la soirée. En effet, une vingtaine de manifestant·e·s du Parti Vert du Québec étaient présent·e·s pour critiquer la non-invitation de leur parti et de leur chef Alex Tyrell.

« Au Parti Vert du Québec, on est le parti avec le plus grand pourcentage de jeunes candidats et candidates de tous les partis au Québec. J’ai moi-même, comme chef de parti, 30 ans. Et donc, d’exclure le parti qui représente tellement bien la jeunesse d’une conversation autour des enjeux jeunesse, on trouve que c’est complètement ridicule. » a déclaré M. Tyrell au Délit.

La campagne électorale est officiellement déclenchée aujourd’hui le 23 août.

 


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