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Mystérieusement vôtre

Retour sur la folle époque qui a tant marqué Montréal.

Monica Morales | Le Délit

Au début du 20e siècle, Montréal affirme son statut de métropole provinciale et nationale avec une extension urbaine rapide et une croissance économique soutenue, mais c’est surtout pour sa vie nocturne que Montréal va devenir célèbre. Dès les années 1920, la prohibition, qui est en vigueur aux États Unis, s’étend progressivement à tout le Canada. Seule une exception demeure, le Québec, qui crée en 1921 la Commission des Liqueurs du Québec (ancêtre de la SAQ) afin de régulariser la production et la consommation d’alcool dans la province.

La cité du vice

Montréal attire alors des touristes de tous les horizons, combinant animation newyorkaise et glamour parisien. Les Américains sont sous le charmes et lui donnent le surnom de « petit Paris d’Amérique ». La ville devient alors la capitale de la fête, des jeux, du jazz, de la luxure et autres plaisirs interdits. On y croise des vedettes de tout le continent telles que Louis Armstrong, la chanteuse Alys Robin, le pianiste Oscar Peterson, le chanteur Jacques Normand ou encore la sulfureuse Lili Saint-Cyr, célèbre stripteaseuse et sacrée « reine de Montréal ». 

Avec plus de trois cents clubs, ouverts pratiquement vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la ville, sous la plume du journaliste Al Palmer, gagne sa réputation de Las Vegas nord-américain, ce dernier écrivant dans son livre Montreal Confidential : « Officiellement, le couvre-feu à Montréal débute à deux heures du matin… Mais n’y prêtez pas trop attention. » La rue Sainte-Catherine brille de milles feux grâce aux enseignes néons des boîtes de nuits, les speakeasy locaux surnommés « Bling pigs » pullulent et la prostitution explose. Bien sûr, Montréal ne tarde pas à attirer gangsters et autres mafiosi, à l’image du gangster new-yorkais Vincenzo « Vic » Cortoni. Rackets, paris clandestins et règlements de compte sont monnaie courante, alors que les autorités policières et municipales paraissent impuissantes ou trop heureuses de fermer les yeux.

Scandales et déclin

Cependant, cette inaction finit pas agacer l’opinion publique qui appuie la création de « l’escouade de la moralité » au sein de la police de Montréal. Dans sa lutte sans relâche contre les criminels l’unité est dirigée par l’avocat Pacifique Pax Plante. Ce dernier sera toutefois démis de ses fonctions par le chef de la police Albert Langlois en 1947.

Devenu journaliste au Devoir, c’est donc à coup d’articles sensationnels, dénonçant le crime organisé et la corruption que l’avocat continue sa croisade contre le vice.

Cela conduira l’administration provinciale à créer, en 1950, la Commission d’enquête sur le vice commercialisé à Montréal présidée par le juge Caron. Après trois ans d’enquête, la commission condamne dix-huit policiers dont le directeur Langlois.

Jeune procureur lors du procès, Jean Drapeau sera élu maire en 1954 sur la promesse de nettoyer la ville et réformer l’administration. Ainsi s’achève l’époque des folles nuits de Montréal et de ses nombreux divertissements nocturnes. 


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