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Une messe avec Monsieur Cohen

You want it darker vient s’ajouter à la longue discographie de Leonard Cohen.

Monica Morales

Si vous avez besoin de calme et d’inspiration, ou juste d’un moment de recueillement, You Want it Darker, le dernier album de Leonard Cohen, sorti le 21 octobre dernier, est de loin ce que  vos oreilles attendent après la tempête des examens de mi-session. 

On y retrouve les signatures classiques de M. Cohen : l’organe rock, les chœurs féminins et les paroles métaphoriques dont il ne s’est jamais séparés depuis les années 60, et bien sûr sa voix grave et chaleureuse, caractéristique de son œuvre depuis les années 80. 

Cohen innove

De ses œuvres précédentes, on y retrouve des thèmes souvent abordés : la rédemption, la fatalité, l’humilité, les adieux, les effets du temps sur l’Homme, sur l’amour, et sur la vie. On y retrouve aussi la progression lisse des morceaux, l’atmosphère modeste et nostalgique, ainsi que l’humble empreinte réconfortante du chanteur. 

Cependant, avec cet album, Leonard Cohen innove : presque tous les morceaux incluent un élément électronique (ou électrique pour certains effets de guitare). En effet, certaines composantes rythmiques, très certainement produites par un dj pad  (basse ou batterie en générale), s’associent prodigieusement avec les notes orientales, les mélancoliques accords de piano et les cordes larmoyantes des violons et violoncelles. Sa voix, de son authenticité touchante et de sa puissance profonde, vient couronner la richesse instrumentale, délivrant ainsi ce genre d’ouvrage qui vous dérobe quelques larmes. 

Morceaux choisis 

Parmi tant de morceaux si raffinés, il est difficile de prédire lesquels seront les préférés du public. You Want it Darker et  It Seemed the Better Way  créent une atmosphère religieuse à la fois inquiétante et envoûtante. Treaty, Leaving the Table, et  If I Didn’t Have Your Love continuent d’ancrer l’album dans la thématique du sacré et de la résignation, tout en créant l’immuable intimité que l’univers de Cohen a toujours suscitée. L’excellent  On the Level  est le morceau qui se rapproche le plus de ce que l’on a pu entendre dans ses travaux les plus récents : Popular Problems (2014) et Old Ideas (2012). Traveling Light évoque ses titres mythiques des années 80 : Everybody Knows (1988) ou encore Dance me to the End of Love (1983). De tout l’album, c’est aussi le morceau qui pousserait les profanes qui ne l’avaient pas encore fait à enfin sortir leurs paires d’écouteurs pour apprécier pleinement le panning (répartition des instruments dans le champ auditif), ainsi que la profondeur et les vibrations de chaque élément de la composition. 

Le magnifique String Reprise/Treaty clôt l’album sur une note particulièrement brumeuse, cependant illuminé par le morceau précédent, Steer Your Way, empreint d’une insouciance et d’un optimisme plutôt rare dans l’album.

Une fois encore, Leonard Cohen nous offre un album exceptionnel, qui associe l’héritage propre de l’artiste avec son infatigable capacité à contribuer à la musique actuelle. Bien que le poète affirme « I’m ready my Lord », l’espoir d’entendre toujours plus de Cohen est décuplé.


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