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S’interroger gentiment

Un animal (mort) nous guide vers une douce transformation.

Nans Bortuzzo

Le metteur en scène Félix Antoine Boutin revient au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui du 8 au 26 mars avec Un animal (mort). La pièce, inspirée d’un conte indochinois, invite à une réflexion sur ce que nous étions, ce que nous sommes et ce que nous devenons. 

On entre dans une petite salle tamisée à l’ambiance intime. Les lumières s’éteignent et le premier acte commence, avec vous. C’est un moment que l’on vit comme un rêve, avec des personnages qui nous parlent et nous interrogent, le 4e mur n’existant plus. C’est une histoire simple mais dont découle beaucoup de réflexion et de poésie. Le jeu est délicat, touchant et comique et rend la pièce rafraîchissante. On assiste à la rencontre de deux amants, la naissance de leur amour, mais aussi au doute qui naît entre eux dû à une tierce personne. Les générations se confondent ensuite et c’est un discours sur la transmission qui conclut le spectacle. 

Nans Bortuzzo

L’Homme caméléon

La beauté de cette pièce et sa poésie résident dans sa capacité à interroger le concept de relation entre deux personnes. Il semblerait que nous ne soyons chez nous nulle part, même avec soi, jusqu’à ce que nous tombions amoureux. L’autre devient alors miroir de soi et c’est en lui que l’on se rencontre. Felix Antoine Boutin nous pose comme immigrant de nulle part, dépendant de l’Autre pour s’aboutir. La mort dans ce conte théâtralisé devient alors une étape dans l’accomplissement de soi. C’est une opportunité de rédemption, une renaissance qui viendrait toujours avec le regard de l’autre.

« L’autre devient alors miroir de soi et c’est en lui que l’on se rencontre »

L’illusion d’un soi isolé 

Dans un deuxième temps, Un animal (mort) aborde l’héritage que nous laissons derrière nous aux prochaines générations. Le plus frappant est la tendresse qui se dégage du discours entre les personnages. Celle-ci aide à soutenir l’idée que nous sommes une des parts d’un patrimoine qui appartient à tous. Une histoire qui se partage, qui se transmet et qui ne peut être contenue par nos corps respectifs. Ce n’est pas notre vie que l’on vit, mais la vie. « La vie passe en nous comme le vent dans le bleu du ciel », dit l’un des acteurs pour peindre l’idée.

L’esthétique du dernier spectacle de Félix Antoine Boutin, ainsi que les thèmes abordés font de Un animal (mort), une œuvre de qualité. Des questions sont levées mais avec humour et poésie et c’est ce qui fait le charme de cette création. Finalement, le discours qu’entretiennent les comédiens avec les spectateurs pose la question de la relation entre le public insatiable et les acteurs qui prennent vie grâce à celui-ci.  Ils naissent car nous les faisons naître.  La pièce rappelle ainsi que l’on est tous plus que le rôle que l’on nous donne. Il est alors possible de se retrouver à l’infini car la mort dans la fable devient une occasion de renaître toujours meilleur et plus proche de soi. 


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