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Le monstre en nous

Le TNC présente Monster, véritable prouesse de mise en scène et d’interprétation.

Georgia Gleason

Le Tuesday Night Café a dévoilé son premier spectacle de l’année,  Monster, au Morrice Hall cette semaine. Ce projet est le fruit de deux ans de discussions et d’explorations, tandis que la production a commencé depuis seulement un mois. Laura Orozco et Dilan Nebioglu — les deux metteures en scène — se sont rencontrées en première année d’université, et partagent un grand intérêt pour les problématiques qui entourent la santé mentale. Avec ce spectacle, elles explorent les épreuves d’une jeune personne, mais aussi l’influence des parents sur la construction et le développement identitaire de leurs enfants.

Monster emploie un ton noir et un humour pince-sans-rire. Adam, le narrateur, raconte les histoires de Janine, Mr. Boyle, Joe, Ron, Tina, Al, et de plusieurs autres. Chaque histoire traite d’un thème sombre et troublant, un fils qui assassine son père, un ancien toxicomane qui rechute, un homme isolé qui, enfant, fût maltraité, pour citer quelques exemples.  Laura Orozco incarne à elle seule tous ces personnages de manière formidable, et c’est peu dire. La représentation d’Adam — un personnage traditionnellement masculin — en femme ajoute une nuance supplémentaire au spectacle. Orozco s’assoit en se recroquevillant, ses sourcils créent des rides,  elle bouge ses bras d’une manière à la fois subtile et emphatique tout en parlant. 

Certains moments de la représentation tranchent et secouent le public. Le combat de Joe, le toxicomane qui rechute, contre son addiction est cinglant de brutalité. Après un verre, c’est tout le spectacle qui devient plus fluide : Orozco parle plus vite, et ses gestes deviennent de plus en plus dramatiques. Elle évoque parfaitement l’expérience et l’impression qu’une ivrogne lambda pourrait nous donner. De la même façon, la musique, jusqu’alors entrainante et festive, se fait lente, segmentée, électronique. 

Adam pense que les films noirs nous émanciperaient  du marché capitaliste qui échappe à notre contrôle puisqu’ils nous donnent la liberté de penser. De plus, nous aimons et apprécions l’humour pince-sans-rire. Ces films, et ces actions motivées par la revanche, plaisent à nos côtés obscurs, à notre pulsion de mort. Adam nous humilie, nous  indigne. Il nous confronte avec la réalité. 

De cette façon, Monster fait ressurgir les questions que nous écartons et négligeons. Elle nous fait nous questionner notre nombrilisme et notre perpétuelle quête de bien, en nous confrontant à des personnages fragiles aux marges de notre société. 


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