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… et autres racines électroniques

Projection électrisante du documentaire Kraftwerk Pop Art à la SAT.

Thomas Simonneau

En parallèle à la performance de Kraftwerk au Métropolis et dans le cadre du 32e FIFA (Festival International du Film sur l’Art) de Montréal, le documentaire Kraftwerk Pop Art était projeté le jeudi 27 mars à la SAT (Société des Arts Technologiques) du boulevard Saint-Laurent. Ce film, réalisé par Hannes Rossacher et Simon Witter, et paru en 2013, retrace le parcours du groupe de musique mythique qu’est Kraftwerk.

Peu connu du grand public mais grandement reconnu par les critiques musicaux, ce groupe d’origine allemande voit le jour en 1968 suite à la rencontre entre Ralph Hütter et Florian Scheider lors d’un cours d’improvisation au conservatoire de musique de Düsseldorf. Principalement influencé par le krautrock, un dérivé du rock psychédélique et expérimental d’outre-Atlantique, la formation livre son premier concert officiel en 1970 et signe ainsi l’acte de naissance de la musique électronique. Leur premier succès commercial est marqué par la sortie de leur album Autobahn en 1974, premier hit aux États-Unis à cette période.

Au-delà de la grande structure musicale et des mélodies captivantes de leur musique, le documentaire présenté souligne l’aspect à la fois visionnaire, critique et révolutionnaire qu’a eu Kraftwerk sur notre société. Visionnaire car le quatuor avait prédit l’avènement d’un monde ultra connecté, surveillé et critique car leurs titres illustrent la coexistence difficile entre l’être humain, la nature et la technologie, tout en indiquant qu’un excès de cette dernière peut devenir déshumanisant. Comme l’affirme Ralph Hütter dans une entrevue datant de leur visite à Montréal en 2004 et republiée dans le journal Cult MTL le 25 mars dernier, « il faut se souvenir que lorsque nous avons commencé, c’était les jours du rock en Allemagne, des orchestres classiques et des grandes fanfares. Aujourd’hui, plusieurs de nos prédictions sont devenues des réalités. » Vu d’une perspective plus large, le groupe aurait donc révolutionné toute l’histoire de la musique occidentale. À un commentateur apparaissant dans le documentaire de renchérir : « Affirmer que le son de Kraftwerk est plus influent, plus important, plus beau que celui des Beatles ne paraît plus aussi absurde qu’à une époque. En fait, on l’a toujours pensé mais aujourd’hui, on l’admet. »

Dans un second temps, cette grande capacité d’innovation, couplée à une maîtrise technique digne des grands de la musique classique a influencé de nombreux artistes tels que David Bowie, Depeche Mode, Daft Punk ou encore la mélodie de la chanson « Talk » de Coldplay, inspirée du titre « Computer Love » (Kraftwerk, 1981). Avec du recul, il est même possible d’affirmer que Kraftwerk est à l’origine de mouvements comme le glitch-hop, la techno minimale, le dubstep, et la pop mainstream. Un accomplissement remarquable lorsqu’on contraste cela avec la prétendue rigidité de la musique électronique et l’idée qu’elle serait froide et sans âme. Bien au contraire, il y a quelque chose de très funky dans la musique de Kraftwerk, qui n’est pas pour déplaire aux amateurs de soirées dansantes, d’ailleurs nombreux à la SAT jeudi dernier. Et pour cause, la projection était suivie d’une soirée animée par trois DJ (Alex Ortiz, SoundShaper et Mathieu Beauséjour) venus rendre un bel hommage aux pères de leur musique.


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