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Le meilleur véhicule souverainiste

De Fait -

À l’approche de possibles élections provinciales, il convient d’aborder l’argument du « meilleur véhicule pour la souveraineté » mis de l’avant par le Parti Québécois (PQ). Selon cet argument, tout souverainiste devrait voter pour le PQ puisqu’il s’agit du seul parti souverainiste pouvant être élu majoritairement, donc le seul pouvant adopter une loi prévoyant la tenue d’un nouveau référendum. Chiffre à l’appui, on démontre que, si les électeurs de Québec solidaire (QS) et d’Option nationale (ON) avaient voté pour le PQ, ce dernier serait élu majoritaire. L’existence de QS et d’ON semble alors absurde. Cependant, la théorie du meilleur véhicule souffre de deux problèmes : elle élude l’importance des questions sociales et elle se base sur une compréhension incomplète du comportement de l’électorat.

D’abord, la théorie du meilleur véhicule élude tous les débats sociaux qui ne sont pas à saveur souverainiste. Elle prévoit que l’électeur souverainiste devrait avant tout voter pour le parti le plus à même de tenir un référendum, sans se soucier, par exemple, de son opinion sur la Charte des valeurs québécoises, sur le nouvel accord de libre-échange ou sur la hausse des frais de scolarité. Une telle réduction du débat électoral risque d’entacher l’expression démocratique en permettant l’élection d’un parti souverainiste avec une plateforme sociale éloignée des valeurs de son électorat. Or, plusieurs années s’écoulent entre l’élection d’un gouvernement et la tenue d’un référendum. Durant ce temps, le parti au pouvoir doit traiter de ces questions sociales. Il est même possible que le gouvernement souverainiste au pouvoir ne tienne pas de référendum –comme c’est le cas présentement. Il est donc nécessaire qu’on accepte que les questions sociales soient soumises au vote démocratique durant des élections formelles.

Ensuite, il n’est pas garanti que l’électeur de QS ou d’ON voterait pour le Parti Québécois si ces partis n’existaient plus. Il est faux de penser que la majorité des électeurs hiérarchisent leurs opinions politiques au point d’orienter leur vote vers un parti politique avec lequel ils n’ont en commun qu’une seule proposition. Dans son article « Le virage souverainiste des Québécois », Richard Nadeau révèle que même l’appui à la souveraineté est corrélatif de l’état des questions sociales. L’existence de Québec solidaire démontre que les souverainistes ne se satisfont pas d’un vote envers un parti souverainiste, mais qu’ils veulent également se faire entendre sur les questions sociales quand le principal parti souverainiste ne les représente pas. Il est fort à parier que les électeurs de Québec solidaire ne voteraient pas pour le Parti Québécois, même si la promesse d’un nouveau référendum offrait une réalisation imminente et concrète.

Au final, l’argument du « meilleur véhicule » offre peu de résonance dans la réalité électorale du Québec. D’ailleurs, il semble que les têtes dirigeantes du Parti Québécois l’ont réalisé puisqu’elles tentent désormais visiblement de séduire l’électorat de la Coalition Avenir Québec plutôt que celui de QS ou d’ON.


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