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Haut les seins !

Je n’ai jamais été le type de petite fille qui jouait avec des barbies. J’avais plutôt tendance à leur raser la tête, à leur  attacher une longue corde à une jambe et à les lancer de la fenêtre du deuxième étage pour voir si elles survivraient à mon bungee « improvisé ». Mes parents ont très rapidement compris qu’ils feraient mieux de me trouver un autre jouet. Mais s’ils m’avaient acheté la Barbie de la Gendarmerie Royale du Canada (GRC), aurais-je été aussi cruelle ? Elle est si charmante avec ses longs cheveux détachés, ses trois tonnes de maquillage et le joli manteau rouge qui sied si bien sa taille de guêpe.

Évidemment, ma première question a été : pourquoi ? Qu’est-ce qui a bien pu motiver la GRC à produire 1200 exemplaires d’une poupée aux proportions surhumaines à leur effigie ? Pourquoi Barbie plutôt que Ken ? Peut-être pour valoriser la femme au sein de cette organisation. Mais quelle idée ridicule ! Pourquoi créerait-on un jouet qui représente tous les stéréotypes féminins et le schéma des sexes tant décrié depuis les 10 dernières années ? Pourquoi mettre ainsi de l’avant l’apport de la femme dans la sécurité de notre ô combien magnifique pays ? Un jouet comportant plus de cerveau que de seins n’aurait-il pas été plus approprié ?

Tout ça fait beaucoup de questions et peu de réponses, et pourrait en amener plus d’un à se demander : Mais qu’est-ce que cela peut bien changer ?

C’est une question valable. Ce n’est après tout qu’une barbie de plus parmi tant d’autres. Mais l’est-ce vraiment ? Est-ce que le fait qu’un gouvernement finance une barbie est si anodin ? N’avons-nous pas autre chose de mieux à faire avec notre argent – celui du précieux contribuable – que de le dépenser pour faire des barbies ? On nous répète constamment qu’on doit couper ici (financement de la recherche) et là (financement des médias nationaux) ou encore là (financement des parcs nationaux), mais de l’argent pour nos agents (miniatures), ça on en a en masse.

Donc si vous voulez mon avis, ça change quelque chose. Outre le fait que nous voyons disparaître cet argent qui semble se faire si rare dans les coffres de l’État, il est, en plus de cela, utilisé de manière à renforcer la déformation de l’image de la femme contre laquelle on s’efforce autant que possible de mettre un frein.

Alors je m’indigne. Juste un petit peu, juste un tout petit peu. Mais que voulez-vous, quand mes yeux se sont arrêtés sur la section insolite du journal et y ont découvert une barbie coiffée du fameux chapeau Stetson, je n’ai pas pu m’empêcher de me demander si Miss GRC aurait survécu à une chute du deuxième étage.


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