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Antonio Gaudí : l’architecte du mythe

Avec des images envoûtantes et des prises de vue à couper le souffle, Hiroshi Teshigahara illustre dans le film Antonio Gaudí la singularité de l’œuvre de l’architecte catalan.

Pour qu’un cinéaste parvienne à sincèrement évoquer l’univers merveilleux de Gaudí, il lui faut sortir du cadre documentaire traditionnel et adopter une façon moins conventionnelle de filmer l’œuvre architecturale. En 1984, le réalisateur japonais d’avant-garde Hiroshi Teshigahara décide de relever le défi, consacrant plus d’une heure de pellicule à de longs plans séquence sans dialogue évoquant les principales réalisations de l’architecte catalan.

De la Casa Battlo à la Sagrada Familia, en passant par la Pedrera, le Parc Güell et le Colegio Teresiano, Hiroshi Teshigahara retrace le parcours créatif et les influences de Gaudí. Ainsi, le spectateur assiste à l’évolution entre l’influence mauresque, avec ses arabesques et ses minarets, (notamment dans la Casa Vicens), l’influence néogothique, plus austère et religieuse (comme le palais épiscopal d’Astorga), et enfin l’influence moderniste, éclectique et surprenante, qui fait de Gaudí un architecte du renouveau catalan reconnu et apprécié.

Quiconque observant attentivement des images d’œuvres modernistes de Gaudí se surprend à y reconnaître des traits biologiques ou humains, comme les squelettes sur les balcons de la Casa Battlo (d’ailleurs surnommée « la Maison des Os »), et la peau écaillée de dragon sur le toit du même édifice, ou encore les lézards du Parc Güell. Partout, la courbe et la couleur dominent l’œuvre.

Né dans la ville catalane de Reus en 1852 et mort tragiquement écrasé par un tramway à Barcelone en 1926, Gaudí étudie à l’École d’architecture de Barcelone où il s’attire la foudre de certains professeurs qui ne partagent pas sa vision si particulière. Grâce à l’appui d’Eusebio Güell, qui devient son plus grand mécène, Gaudí se voit confier le contrat le plus important de sa carrière : la réalisation de la Sagrada Familia. Gigantesque église, cette œuvre inachevée est construite au même rythme que les grandes cathédrales du Moyen-Âge, soit sur une période de plus de cent ans. Ainsi, à sa mort, Gaudí n’en voit que les balbutiements, mais laisse à ses successeurs des plans minutieux quant à sa complétion. Lorsque Hiroshi Teshigahara réalise son documentaire en 1984, la façade principale et les tours de l’édifice ne sont pas encore achevées. La fin des travaux est prévue pour le centenaire de l’anniversaire du décès de l’architecte en 2026.

Pour l’œil du néophyte, le film peut sembler long et lassant, car il n’y trouve ni texte ni explication sur les prises de vue présentées, et que les rares dialogues y sont traduits du catalan au japonais, sans sous-titres français ou anglais. De plus, la trame sonore, omniprésente, devient agressante par moments. Cependant, la qualité du montage et de la photographie, ainsi que la sélection soignée des œuvres présentées font du film Antonio Gaudí un bonbon architectural pour les amateurs de l’artiste. Il en incitera plus d’un à visiter la Catalogne pour y admirer le travail du prodige du modernisme espagnol.


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