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Éloge de la délicatesse

Le huitième roman de David Foenkinos déjoue dans un style léger et drôle tous les pièges des clichés amoureux, et aborde avec tendresse l’histoire de Nathalie, une jeune femme qui, comme l’annonce le quatrième de couverture, sera « surprise par un homme. Réellement surprise. »

Nathalie rencontre François dans la rue, alors qu’il l’accoste pour aller boire un café. De cette rencontre inattendue naît une histoire d’amour parfaite, interrompue brutalement lorsque François se fait renverser par une camionnette. Nathalie, anéantie par ce vide intolérable, met sa vie entre parenthèses pendant de longs mois, jusqu’à ce que son corps et son esprit se réveillent au contact de Markus, un Suédois qui rentre un jour dans son bureau et l’attire indéniablement. Avec cet homme qui n’est pas beau et ne possède a priori rien de particulier, Nathalie débute une « deuxième vie sentimentale », sous les regards médusés de ses collègues et amis.

Joyeux éloge de la délicatesse dans la relation amoureuse, ce récit est raconté de manière presque désuète, voire un peu prude, par un narrateur habile et omniprésent. Avec une admirable légèreté, celui-ci joue avec le lecteur à travers les nombreuses digressions et anecdotes qui ponctuent son histoire. Par exemple, lorsque Nathalie pense à l’enfant qu’elle n’aura pas avec François, elle invente la discographie de John Lennon, s’il n’était pas mort en 1980. Cette discographie imaginaire, le narrateur nous la transmet en détail et avec humour : « Still Yoko (1982), Yesterday and Tomorrow (1987), Berlin (1990), Titanic Soundrack (1994)». Par la suite, lorsque Nathalie, du haut de ses talons aiguilles, réalise l’inutilité et la laideur de sa moquette, le narrateur en profite pour s’interroger sur son inventeur, et va jusqu’à nous fournir la définition du Larousse. Cet art de la digression permet à Foenkinos d’instaurer avec le lecteur une douce complicité et participe à l’aspect ludique d’un roman qui sait émouvoir et séduire tout en finesse.

À travers ces effets narratifs, ce sont donc les côtés les plus loufoques de l’amour, l’un des thèmes majeurs de La Délicatesse, qui sont traités. À la lecture du roman de Foenkinos se dégage en effet cet amour des femmes rappelant François Truffaut, et qui, selon ses propos, relève de « la magnificence un peu prude ». Si Foenkinos déteste les clichés que véhiculent les couples, il aime par contre raconter la fascination des hommes envers les femmes à travers tous les personnages qui habitent son oeuvre.

La Délicatesse fait partie de ces livres qu’on a envie d’offrir après les avoir lus, car on y sent la jubilation d’un auteur dans l’écriture, jubilation qui saura d’ailleurs être partagée par le lecteur. Et comme le dit avec humour David Foenkinos : «(…) si on n’aime pas le livre on aura au moins appris la recette du risotto aux asperges ou le nombre de Krispoll vendu en 2002. » 

La Délicatesse
David Foenkinos
Éditions Gallimard
29,50 $


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