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Ah ! comme la neige a neigé !

Pourquoi diable sommes-nous surpris à chaque année par la première tempête ? Pourquoi chiââââââle-t-on constamment sur les conditions climatiques québécoises ? La Floride est-elle encore notre Eldorado collectif ? Et que faire pour combattre ce froid ?

Ces vers d’Émile Nelligan nous reviennent souvent à l’esprit à chaque bordée de neige : « Ah ! comme la neige a neigé, ma vitre est un jardin de givre ! Ah ! comme la neige a neigé ! Qu’estce que le spasme de vivre ? Ah ! La douleur que j’ai, que j’ai ! ». Cette célèbre strophe évoque plutôt bien l’état d’âme de nombreux Québécois vis-à-vis de notre hiver. Alors que plusieurs y voient une occasion de sortir leurs skis et leurs patins, beaucoup maudiront les excès de Dame Nature. Ils se plaindront de la mauvaise qualité de déneigement de la ville de Montréal qui cause l’enlisement de voitures, ils regretteront le verglas qui crée maints accidents sans le moindre avertissement, les températures extrêmes qui ralentissent leurs déplacements. Alors, notre relation avec l’hiver québécois, c’est de l’amour ou de la haine ? Court arrêt sur la psyché québécoise et sa relation avec l’hiver.

Chiâleurs, ces Québécois !

Il faut tout de même avouer que les Québécois ont une réputation mondiale d’experts en « chialâge » collectif. En été, le mercure est toujours soit trop haut, soit trop bas. Quand il pleut trop, comme l’été dernier, ce sont les vacanciers qui se plaignent, alors que quand le temps est sec, c’est le tour des agriculteurs. La saison froide n’échappe pas non plus aux critiques des Québécois. Si les amateurs de sports d’hiver tels que les skieurs et les raquetteurs accueillent à bras ouverts l’annonce d’une accumulation de trente centimètres de neige, les automobilistes, au contraire, ragent, prennent leur mal en patience et leurs balais à la main.

Mais qu’y a‑t-il de si mauvais avec le froid ? Au fond, pour se garder au chaud, il suffit de porter plus de couches de vêtements, bref, de s’habiller en oignon ! En été, pendant les canicules, une fois nu, on ne peut plus rien enlever ! Simple logique. Le meilleur moyen d’apprécier l’hiver est donc de s’équiper d’une façon appropriée : chandails de laine, foulard, mitaines, chapeau, bottes et, sa popularité vous le garantira, la meilleure façon d’affronter les rudesses de l’hiver est le manteau en duvet d’oie Canada Goose, encore faut-il qu’il soit attaché !

Les nouveaux arrivés

« Ce qu’on m’a raconté lorsque j’étais en France était horrible ! Qu’il faisait ‑40 tous les jours, qu’on ne voyait le soleil que quelques heures par jour ! J’étais bien contente de voir que ce n’était que des exagérations ! » raconte Alice Jennings, étudiante française en première année. Ainsi, il ne faut pas se fier aux rumeurs. La féérie et la magie qu’apporte l’arrivée de la neige aux étudiants qui vivent l’hiver pour la première fois est une expérience inoubliable. « C’était si beau ! Et froid ! », témoigne Sasha D’lima, étudiante d’origine indienne. La plupart s’entendent pour dire que la première bordée est magnifique. Mais avec le temps, plusieurs changent d’opinion. « La première journée, j’adorais la neige. Maintenant, je la déteste ! », explique Zohaib Wahid, étudiant du Pakistan. Guanyi Ho, originaire de Singapour, raconte qu’avant d’arriver au Canada, sa famille et ses amis lui disaient que l’hiver était terrible, très froid, bref, plus un désagrément qu’autre chose. Il avait toutefois vu plusieurs photos et vidéos de l’hiver canadien dans les médias, et s’attendait à une expérience merveilleuse. Qu’en pense-t-il à présent, la première tempête étant passée ? Il adore. « J’avais vu la neige pour la première fois à l’âge de douze ans. Neuf ans plus tard, j’ai toujours hâte que tombe de la neige fraîche. J’ai surtout hâte de voir ce que ça donne à l’extérieur de la ville. » 

Le stéréotype de la Floride

Plusieurs Québécois, pris au désespoir et près de la dépression, ne voient qu’une solution au long hiver québécois : se ressourcer dans le sud ! Ces centaines de retraités quittent ainsi la belle province au profit de la Floride, et souvent les membres de leur famille les rejoignent pendant la semaine de relâche.

La Floride est ainsi entrée dans l’imaginaire québécois comme un bout de chaleur et d’espoir au milieu d’un long hiver rigoureux. Cependant, avec le temps, elle a pris une connotation péjorative puisque les plus nantis préfèrent l’Amérique centrale ou bien les îles des Caraïbes, la Floride étant réservée aux Québécois « quétaines ». Pensons à Elvis Gratton… Cette perception a d’ailleurs été accrue par la sortie en 1993 du film La Florida, qui rappelle la lente américanisation du peuple québécois. Cette satire de George Mihalka raconte l’histoire d’une famille montréalaise tannée de la brutalité de l’hiver qui décide d’acheter un motel délabré de Hollywood Beach et d’en faire un objet d’ambition grandiose et irrationnelle. Cependant, leur rêve américain sous le soleil de la Floride fini par échouer lamentablement.

Alors comment survivre à l’hiver québécois ? Bien s’habiller et bien se tenir occupé ! On ne cessera de maudir notre existence dans ce pays de neige si nous n’acceptons pas la réalité climatique. Comme l’explique Bernard Arcand dans son essai Abolissons l’hiver, « il est assez inquiétant de songer au sort d’un peuple qui chante : “Mon pays, c’est l’hiver” et qui, du même souffle, ajoute que cet hiver est détestable. » 

Afin de mieux apprécier cette saison mal-aimée Le Délit vous suggère cinq choses à faire cet hiver pour apprivoiser le froid québécois :
Danser au rythme de différents DJs les jeudis, vendredis et samedis du mois de janvier organisés par Igloofest au quai Jacques-Cartier du Vieux-Port de Montréal. www​.igloofest​.ca
Skier sur différentes montagnes du Québec et du Vermont avec Express-Ski, un service d’autobus amical qui ne coûte qu’un peu plus que le billet de remonte-pente. www​.express​-ski​.com
Visiter la capitale et monter sur le taureau mécanique en plein hiver pendant le Carnaval de Québec du 29 janvier au 14 février. www​.carnaval​.qc​.ca/​2​0​1​0​/fr
Optimiser les plus longues nuits de l’année avec les différents spectacles du Festival Montréal en Lumière, du 18 au 28 février. www​.montrealenlumiere​.com
Ou, plus simplement, aller à la Patinoire du Bassin Bonsecours, faire une excursion jusqu’au haut du Mont-Royal pour contempler la ville enneigée, se réchauffer au chalet de la montagne et lire Vivre l’hiver au Québec de Normand Cazelais et terminer la journée avec un bon chocolat chaud de Juliette et Chocolat ou de Suite 88 Chocolatier sur St-Denis ou tout autre artisan de chocolat de la métropole.


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