Archives des Montréal - Le Délit https://www.delitfrancais.com/category/actualites/montreal/ Le seul journal francophone de l'Université McGill Thu, 15 Feb 2024 16:05:08 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.4.4 « Arrêtez l’esclavage ouïghour! » https://www.delitfrancais.com/2024/02/14/arretez-lesclavage-ouighour/ Wed, 14 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54662 Manifestation contre le génocide des Ouïghours devant le consulat chinois.

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Le dimanche 4 février, environ 50 personnes se sont retrouvées à 13 heures devant le Consulat général de la république populaire de Chine pour commémorer les victimes du massacre de Ghulja (ville aujourd’hui nommée Yining Xian par les autorités chinoises), survenu le 5 février 1997 et ayant fait 167 morts et plusieurs centaines de blessés. Plus généralement, la manifestation avait pour but de protester contre le génocide du peuple ouïghour, qui prend place depuis 2015 dans la province du Turkestan oriental [officiellement appelé Xinjiang, ndlr], fief historique de la culture ouïghoure en Chine.

Afin d’approfondir notre analyse de la situation, Le Délit s’est entretenu avec Michel Tessier, sinologue retraité ayant enseigné à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR) et dans le secteur public.

Le génocide

Dans un pays d’un milliard et quatre cent millions d’habitants, la population ouïghoure est une minorité musulmane de près de 25 millions d’individus, dont 12 millions vivant dans le Turkestan oriental. Comme le montre le massacre de Ghulja, durant lequel plusieurs Ouïghours ont été tués par les forces chinoises après avoir manifesté pour l’indépendance du Turkestan oriental, la répression du peuple ouïghour date de plusieurs décennies. Néanmoins, cette dernière s’est accélérée et aggravée depuis 2015. Au début des années 2010, le gouvernement chinois a annoncé se lancer dans une campagne de « lutte contre le terrorisme (tdlr) » dans cette région. Selon plusieurs organismes défenseurs des droits humains dont Human Rights Watch, cette « lutte contre le terrorisme » s’est surtout exprimée à travers une oppression croissante du peuple ouïghour, qui représente 45% de la population de la région. De nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) comme Human Rights Watch ou Amnistie internationale accusent la Chine de crimes contre l’humanité à l’encontre du peuple ouïghour. Elles dénoncent notamment les arrestations et détentions arbitraires, ainsi que les tortures et la surveillance de masse perpétrées par la Chine contre cette minorité depuis 2010. Aujourd’hui, plus d’un million de Ouïghours sont emprisonnés dans plusieurs camps dans la région du Turkestan oriental.

La manifestation

Devant le consulat, les manifestants – majoritairement des membres de la communauté ouïghoure – ont affronté le froid. Accompagnés de leurs bannières, pancartes et dépliants, ils ont scandé des slogans et dénoncé les actions du régime chinois pendant plus d’une heure. Plusieurs personnes ont pu prendre la parole pour exprimer l’importance de se mobiliser afin de sensibiliser les gens aux actions perpétrées par le gouvernement chinois. Pendant cette période de discussion, Le Délit s’est entretenu avec Kayum Masimov, chef de projet au sein du Projet de défense des droits des Ouïghours. Au cours de notre discussion, Kayum nous a interpellé et nous a posé une question simple mais pertinente relative au message général de la manifestation : « Chaque fois que vous entrez au centre d’achat Costco ou Walmart ; Vous achetez du café ou des chandails qui proviennent de Chine. Ce n’est pas cher n’est ce pas? Il est temps de se poser la question : Pourquoi ça ne coûte pas cher? »

« Chaque fois que vous entrez au centre d’achat Costco ou Walmart ; vous achetez du café ou des chandails qui proviennent de Chine, ce n’est pas cher, n’est ce pas? Il est temps de se poser la question : Pourquoi ça ne coûte pas cher? »

Le groupe de manifestants a par la suite entrepris une marche sur la rue St-Catherine, vers l’arrêt de métro Guy-Concordia, en scandant divers slogans tels que : « Liberté pour le Turkestan oriental! » ; « Fermez les camps de concentration! » ; « Arrêtez l’esclavage ouïghour! » ; « Boycottez la Chine » ; ou encore, « Canada, agis maintenant! Défends les Ouïghours! ». Pour conclure l’événement, le groupe est revenu devant le consulat général. À nouveau, certains ont pu prendre la parole pour s’exprimer.

Une action limitée

Aujourd’hui, l’action internationale pour mettre un terme au génocide des Ouïghours est souvent perçue comme trop limitée. Michel Tessier suppose que ce manque de prise de position radicale s’explique par la place prépondérante de la Chine dans l’économie mondiale. En 2023 par exemple, la Chine comptait pour 30% de la production manufacturière mondiale. Malgré la volonté de boycotter la Chine et les biens qui y sont fabriqués – comme les slogans l’ont d’ailleurs mentionné pendant la manifestation –, agir concrètement contre la Chine et l’exploitation des Ouïghours n’est pas une mince affaire. « La Chine est une des premières économies mondiales, très importante, et aujourd’hui indispensable. Ne plus acheter de produits chinois semble donc difficilement réalisable. »

Le sinologue ajoute néanmoins que si la Chine est aujourd’hui devenue intouchable, c’est en partie parce que les puissances mondiales comme les États-Unis, le Royaume-Uni et d’autres puissances européennes ont délocalisé leurs chaines de production dans les années 1990–2000. Selon lui, en délocalisant leurs chaînes de production, « les pays ont limité leurs possibilités d’action [à l’égard de la Chine, ndlr] ».

À l’échelle canadienne, la mobilisation contre le génocide est aussi limitée selon Kayum Masimov. Ce dernier note néanmoins de réelles mesures prises par le Canada depuis 2015 : « En 2022, le Parlement canadien a fait du Canada le premier pays au monde à reconnaître officiellement le génocide des Ouïghours en Chine, et l’année dernière, on [le Canada, ndlr] a adopté la résolution de rapatrier les réfugiés ouïghours, ce qui est vraiment très positif. » En effet, en janvier 2023, la Chambre des communes du Canada a pris la décision de recevoir 10 000 réfugiés ouïghours par année à compter de 2024. Michel Tessier souligne aussi que « quand on rencontre une motion comme celle votée au Parlement, c’est qu’une bureaucratie se met en place pour les accueillir [les réfugiés, ndlr], pour leur donner un logement, une éducation pour les enfants, un accès à la santé, etc. C’est une vraie avancée ».

Le sinologue nuance néanmoins son propos : « En dehors de ça, qu’est ce que vous voulez que le Canada fasse? Le Canada est un pays de seconde catégorie. Ce n’est pas un pays important sur la scène internationale. Il ne faut pas se faire d’illusions. Une fois qu’on a dénoncé la situation au Turkestan oriental et le génocide qui s’y passe, il n’y a plus rien. Et ce, parce qu’on ne peut pas faire grand chose. »

Une solution : le boycott ciblé

Pour Michel Tessier, « il faut que nous revoyons nos tactiques parce que c’est bien beau de vouloir boycotter les produits chinois, mais il faut être réaliste. Dressons la liste des produits faits par les esclaves ouïghours ; ce sont ceux-là qu’il faut boycotter ». En effet, s’il est difficile de boycotter l’ensemble des produits qui proviennent de Chine, Michel Teissier et Kayum Masimov appuient tous deux la possibilité de boycotter les produits directement liés au génocide, qui sont le fruit de l’exploitation de la minorité ouïghoure.

Cibler l’ensemble de ces produits et ne plus les acheter reviendrait à faire halte au processus génocidaire de production. Une telle mesure a d’ailleurs déjà été mise en place par l’Union Européenne et les États-Unis. Kayum Masimov souligne que « depuis l’introduction de la Force Labor Prevention Act il y 25 mois, elles [les autorités américaines, ndlr] ont interdit [la vente de produits issus de l’esclavage ouïghour, ndlr] et saisi des marchandises totalisant une valeur d’environ cinq milliards de dollars ».

Et à McGill?

Le 19 janvier 2023, L’AÉUM a adopté une motion qui demande à l’Université McGill de désinvestir des entreprises ayant des activités ou des liens directs et indirects avec l’exploitation du peuple ouïghour en Chine. Depuis, l’Université n’a pas entrepris d’action concrète pour répondre à la requête des étudiants.

Afin de sensibiliser à la répression que subit le peuple ouïghour, Sabiha Tursun, étudiante ouïghoure de deuxième année à McGill, a fondé le tout nouveau club étudiant Mcgill Students for Uyghur Solidarity (Étudiants de McGill pour la solidarité avec les Ouïghours, tdlr). Dans une entrevue pour Le Délit, Sabiha explique plus précisément son initiative : « L’un de nos objectifs est de faire pression sur McGill pour que l’Université prenne des mesures de désinvestissement, car certaines des entreprises auxquelles notre fond de dotation est destiné sont complices de l’utilisation de produits issus du travail forcé, de la fourniture et du soutien d’infrastructures de camps d’internement et de camps de travail forcé (tdlr). »

Si l’Université est pour le moment restée muette, la création de cette nouvelle association montre que les étudiants ne sont pas insensibles au sort de la population ouïghoure. Sabiha conclut : « Il est de la responsabilité de McGill d’offrir un environnement éthique à ses étudiants et c’est le moindre qu’elle puisse faire pour le bien de l’humanité. »

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Immersion au sein des grèves étudiantes https://www.delitfrancais.com/2024/02/07/immersion-au-sein-des-greves-etudiantes/ Wed, 07 Feb 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54476 Les étudiants de Concordia et de McGill se mobilisent contre la hausse des frais de scolarité.

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Le 13 octobre dernier, le gouvernement du Québec a annoncé une augmentation de 33% des frais de scolarité pour les étudiants non québécois dès la rentrée d’automne 2024. Dans le but de protéger la langue française à Montréal, le gouvernement compte prélever par le biais de cette mesure, un montant forfaitaire pour chaque étudiant non québécois, et réinvestir ces fonds dans le réseau des universités francophones, telles que l’UQAM ou l’Université de Montréal. Rapidement après cette annonce, des manifestations étudiantes se sont organisées, et les recteurs des trois universités anglophones du Québec, c’est-à-dire l’Université Bishop’s, Concordia et McGill, ont exprimé conjointement leur mécontentement.

En décembre, le gouvernement du Québec est revenu sur sa décision initiale, et a proposé une augmentation plus modérée des frais d’études pour les étudiants canadiens non québécois. Alors qu’ils devaient initialement augmenter de 9 000$ à 17 000$, l’augmentation requise est désormais de 3 000$, soit 12 000$ par an. En revanche, les universités anglophones du Québec devront franciser 80% de leurs étudiants de premier cycle. Ces derniers devront suivre des cours de langue française et atteindre un niveau « intermédiaire » avant la fin de leur diplôme : une mesure excessive et irréalisable selon les recteurs des trois universités concernées. Alors que les étudiants avaient déjà mené une manifestation contre l’augmentation des frais de scolarité fin octobre 2023, ces derniers se sont une nouvelle fois mobilisés pour faire pression sur le gouvernement Legault. Du 31 janvier au 2 février, les étudiants de Concordia et de McGill ont fait la grève, empêchant ainsi la tenue de nombreux cours.

À Concordia : 3 jours de grève

Afin d’éclaircir la situation à Concordia, Le Délit s’est entretenu avec Oli Sinclare, étudiant·e en études interdisciplinaires de la sexualité à Concordia. Oli nous explique que ces grèves étaient bien organisées, et légalement encadrées. Avant le début de ces dernières, les étudiants des nombreux départements des facultés de Concordia ont voté démocratiquement pour tenir ces grèves. « Vous avez certains droits en tant que membre de votre association étudiante. Techniquement, parce que vous êtes reconnu comme un syndicat, si vous faites la grève, c’est comme une grève officielle du syndicat. Vous ne pouvez pas être pénalisé. (tdlr) » Au total, ce sont 11 000 étudiants de Concordia qui ont fait la grève au cours de la semaine.

Bloquer les classes

Au 7ème étage de l’édifice Henry F. Hall de Concordia – l’espace dédié aux actions et associations étudiantes de la faculté des arts et des sciences de Concordia – des blocages de salles de classes ont été organisés pendant ces trois jours. Dans les couloirs, à voix haute, à peine pouvait-on entendre : « Qui veut bloquer une classe de science politique? », ou « Qui veut bloquer l’entrée d’une classe qui commence dans 20 minutes? », que de nombreuses mains se levaient, motivées et assoiffées d’engagement. Par groupes de trois, les étudiants grévistes, appartenant à une grande variété d’associations et de syndicats, se dirigaient alors vers leurs classes attribuées.

Nous avons suivit le groupe d’Oli, afin de mieux comprendre le fonctionnement des blocages. Arrivé devant la salle de classe, le petit groupe s’organise pour réaliser ce qu’ils appellent du « picketing », du « piquetage » en français. Le groupe, équipé de dépliants et de bannières, se positionne devant l’entrée de l’auditorium pour bloquer le passage, et dissuader les étudiants et le ou la professeur d’y entrer. Le but : empêcher la tenue du cours. Oli nous explique : « Nous n’empêcherons pas physiquement les gens d’aller en classe. Si un étudiant est vraiment déterminé à entrer, nous ne le retiendrons pas. Mais nous lui expliquerons qu’il s’agit d’une mesure qui a été votée démocratiquement, et qu’aller en classe revient à ne pas respecter cette décision. »

Un support impressionnant…

La mobilisation étudiante à Concordia a eu un effet très important : pour beaucoup, les cours furent annulés du mercredi au vendredi. Oli nous explique qu’il y a eu un engouement important en faveur de la grève, que ce soit du côté des étudiants, autant que celui des professeurs.

« Les gens veulent vraiment en parler. Beaucoup de gens s’accordent pour dire que c’est [la hausse des frais de scolarité, ndlr] une décision terrible qui va affecter tout le monde. Je pense que les gens sont ravis de voir qu’il y a une mobilisation, que les gens font quelque chose. » Oli ajoute que lorsque les étudiants sont bloqués en dehors de leur salle de classe, « neuf fois sur dix, les gens se disent : “cool, je vais rentrer chez moi” , mais parfois ils restent et discutent avec nous ». Iel nous a aussi fait part des réactions des professeurs, et précise que, même si ceux-ci ont la responsabilité d’au moins de tenter de tenir classe, ils jouent le jeu la majorité du temps, et acceptent d’annuler leur cours lorsque les étudiants grévistes bloquent le passage.

… et contesté

Cela n’a pas été facile de bloquer toutes les classes, certains étudiants et professeurs ont fait part de leur mécontentement à plusieurs reprises. Certains professeurs ont tenu à donner leur cours coûte que coûte, en les remplaçant par davantage d’heures de bureau, ou encore en réalisant leurs cours à distance, via la plateforme Zoom. Si les étudiants grévistes n’ont pas pu bloquer les heures de bureau, ils ont tout de même trouvé le moyen d’empêcher les cours à distance par le biais de « Zoom-bombing », qui consiste à s’introduire dans une conférence Zoom et de gêner la tenue du cours en faisant beaucoup de bruit, en écrivant des messages, ou encore en incitant les étudiants à quitter la conférence.

Si les grèves étudiantes ont eu une ampleur moins importante à McGill, plusieurs cours ont tout de même été bloqués par des étudiants grévistes. Maxime*, étudiant en géographie à McGill, qui a souhaité garder l’anonymat, nous a fait part de ses observations au cours de la semaine : « Ils [les étudiants grévistes, ndlr] ont bloqué l’entrée et ont essayé de nous limiter l’accès à la salle. Ils ne m’ont pas empêché d’y entrer, mais j’ai dû forcer le passage, et me faufiler entre eux. […] Je soutiens la cause, mais je ne peux pas manquer mes cours pour autant. Je pense que c’est un des seuls moyens qu’ils [les grévistes, ndlr] ont pour avoir un impact significatif et je pense que ça a fonctionné, parce que vendredi, il y avait nettement moins de personnes en classe. Alors que d’habitude nous sommes 200, nous n’étions que 50. »

À Concordia, certains étudiants et professeurs se sont également opposés au blocage des cours. Face à cela, Oli répond qu’« en tant qu’étudiants, l’une de nos principales sources de pouvoir est de cesser d’aller en classe. Arrêter de travailler dans le domaine de l’éducation, c’est comme arrêter de travailler pour les travailleurs qui sont en grève. C’est comme si nous pouvions arrêter de contribuer à l’école. »

« En tant qu’étudiants, l’une de nos principales sources de pouvoir est de cesser d’aller en classe. Arrêter de travailler dans le domaine de l’éducation, c’est comme arrêter de travailler pour les travailleurs qui sont en grève. C’est comme si nous pouvions arrêter de contribuer à l’école. »

Oli Sinclare – Étudiant·e de Concordia

Après ces trois jours de grève, les étudiants grévistes sont désormais dans l’attente d’une réponse du gouvernement caquiste. « Après la première mobilisation en décembre, il y a eu des modifications, ils ont donc réduit le montant de l’augmentation des frais de scolarité, et j’espère que cela se reproduira. » Finalement, Oli Sinclare conclut que tant qu’il n’y aura pas davantage de modifications de cette mesure gouvernementale, les étudiants continueront de se mobiliser pour faire entendre leurs voix.

*Nom fictif

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Syndicats et gouvernement Legault : Grèves et nouvelles ententes https://www.delitfrancais.com/2024/01/10/syndicats-et-gouvernement-legault-greves-et-nouvelles-ententes/ Wed, 10 Jan 2024 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=54009 Entretien avec le Professeur Barry Eidlin.

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Du 23 novembre au 29 décembre dernier, plus de 566 000 travailleurs du secteur public sont entrés en grève, perturbant ainsi de façon conséquente le système de santé et le milieu de l’éducation à travers la province. Plusieurs syndicats et fédérations de syndicats dans les domaines de l’éducation, de la santé et des services sociaux ont participé aux grèves. Le plus grand regroupement est celui du Front Commun, composé de quatre centrales syndicates : la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la centrale des Syndicats du Québec (CSQ), la Fédération des Travailleurs et Travailleuses du Québec (FTQ) et l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS). On retrouve également la Fédération autonome de l’Enseignement (FAE), qui compte à elle seule 66 500 enseignants, ainsi que la Fédération Interprofessionnelle de la Santé du Québec (FIQ), rassemblant près de 80 000 travailleurs, deux fédérations qui se sont alliées au mouvement du Front commun durant les derniers mois.

Depuis décembre 2022, les différents syndicats tentent de négocier leurs conventions collectives respectives, c’est-à- dire un contrat avec le patronat établissant les conditions de travail des travailleurs dans le cadre de leur emploi. Les revendications générales des grévistes comprennent une amélioration des conditions salariales et de travail, une plus grande flexibilité des horaires de travail et une amélioration des services publics dans le domaine de l’éducation, de la santé et des services sociaux.

Néanmoins, les négociations n’ont pas avancé à un rythme jugé satisfaisant par les différents acteurs, malgré l’utilisation de nombreux moyens de pression, dont une manifestation qui comptait plus de 100 000 travailleuses et travailleurs du secteur public en septembre dernier. Pour remédier à la lenteur des négociations, les différents syndicats ont choisi l’option de la grève générale, dont cinq jours pour le Front Commun et la grève général illimitée pour d’autres avec un seul objectif : contraindre le Conseil du Trésor de Sonia LeBel (présidente du Conseil du Trésor) à négocier leurs demandes avec urgence.

À la suite de plusieurs semaines de grève, les négociations se sont intensifiées mi-décembre et ont conduit à des hypothèses d’ententes concluantes pour tous les syndicats impliqués. Du côté du Front commun, une augmentation de salaire de 17,4 % sur cinq ans a été conclue, accompagnée d’autres avantages, notamment des améliorations aux régimes de retraite et aux régimes parentaux. De plus, la FAE a mis fin à sa grève générale illimitée à la suite d’un accord de principe, dont les détails n’ont pas encore été révélés.

Interrogé sur les accords conclus entre les syndicats du secteur public et le gouvernement du Québec, Barry Eidlin, professeur au programme de Sociologie de l’Université McGill, a partagé ses réflexions avec Le Délit sur divers aspects de cette grève.

La réaction du gouvernement Legault

Durant les cinq semaines de grève au sein du secteur public québécois, impactant grandement l’éducation des enfants et le domaine de la santé, l’opinion publique, notamment de La part des parents d’élèves, était plutôt favorable à la grève. Syndicats et citoyens se sont alliés pour critiquer la gestion de la grève par le gouvernement Legault, ainsi que la lenteur du processus de négociation avec les différents syndicats. Pour le professeur Eidlin, la forte remise en question de cette gestion de la crise est principalement dû au fait que : « Le gouvernement de la CAQ n’a simplement pas l’habitude de négocier. Ils ont de grandes majorités parlementaires, donc ils vont discuter, prendre vos avis en compte, mais en fin de compte, auront les votes pour passer ce qu’ils veulent. »

Le Professeur Eidlin nous a fait part de l’importance du soutien des citoyens envers le mouvement qui a pris place au cours des dernières semaines. Plus de sept Québécois sur dix soutiennent les travailleurs et travailleuses en grève, selon la maison de sondage SOM. Pour le professeur, une grande partie de la réussite de la grève s’explique par ce support massif : « L’appui du public ne cessait de s’accroître et est plus fort parmi les plus impactés, dont les parents d’enfants d’âge scolaire, et le gouvernement a été obligé de négocier. » Ce soutien massif du public, couplé à la mauvaise gestion de la crise par le gouvernement a donc joué en faveur des grévistes.

« Le gouvernement Legault n’a simplement pas l’habitude de négocier »

Professeur Barry Eidlin

Les hypothèses d’ententes

La crise s’est conclue par plusieurs hypothèses d’ententes. Depuis le début des négociations entre les syndicats et le gouvernement québécois en décembre 2022, un accord sur les salaires a permis de nettes et concrètes augmentations. Pendant une grande partie de l’année, le Conseil du Trésor a offert une augmentation salariale de 9% dans le secteur public, ce qui, selon le professeur Eidlin, équivaut à une baisse de salaire pour les travailleurs et travailleuses du secteur public, si l’on considère l’inflation qui est de 9% seulement en 2023.

Peu à peu, les négociations ont fait augmenter les salaires de 9% à 12,7%, pour finalement aboutir à une entente sur une augmentation de 17,4 % sur cinq ans en décembre 2023 pour le Front Commun. À ce sujet, le Professeur Eidlin mentionne que même si l’offre salariale présentée a augmenté considérablement, « les demandes initiales des syndicats portaient sur une augmentation salariale de 24% sur 3 ans, donc l’accord conclu représente une réduction significative de leurs exigences ».

S’ajoutant aux augmentations salariales, des améliorations de conditions de travail et des avantages sociaux ont été négociés au sein de l’hypothèse d’entente du Front Commun. On y retrouve une amélioration du régime de retraite, une majoration salariale de 10% pour les psychologues dans le secteur public et des améliorations des régimes parentaux en place. Le Professeur Eidlin renchérit sur ces avancées : « Les détails dans ce cas-ci sont très importants et vont changer beaucoup de choses, car le plus important n’est pas nécessairement l’augmentation salariale, mais les conditions de travail, donc les heures supplémentaires, le personnel supplémentaire, etc., qui font une grande différence pour la qualité de vie des travailleurs. »

« C’est le vote des membres qui décidera si c’est un succès. On ne s’attend pas à gagner tout ce qu’on demande : c’est ça le but d’une négociation »


Professeur Barry Eidlin

Une victoire potentielle pour les syndicats

En date du 7 janvier, le Front commun a annoncé les précisions des accords de son hypothèse d’entente avec le gouvernement québécois. Ces détails ont été révélés afin d’informer les membres des plus de 300 syndicats respectifs, qui auront à leur tour, la chance de faire part de leurs opinions sur leurs ententes, lors d’assemblées générales organisées.

Lorsque nous lui avons demandé si ces accords peuvent être considérés comme une victoire pour les syndicats, le Professeur Eidlin nous répond que « c’est le vote des membres qui décidera si c’est un succès. On ne s’attend pas à gagner tout ce qu’on demande : c’est ça le but d’une négociation ».

Les membres des syndicats du Front commun seront appelés à voter d’ici le 15 janvier sur les hypothèses d’ententes conclues fin décembre avec le Conseil du Trésor.

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Désacraliser la guerre https://www.delitfrancais.com/2023/11/29/desacraliser-la-guerre/ Wed, 29 Nov 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53792 Comprendre l’évolution de la « paix » dans le contexte du conflit Israël-Hamas.

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Le 14 novembre dernier, des dizaines de milliers d’américains se sont réunis à Washington DC pour soutenir Israël dans sa guerre contre le Hamas, et pour s’opposer aux appels au cessez-le-feu. Ce rassemblement a réuni des figures politiques américaines des deux côtés, du chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, au porte-parole des républicains au Congrès, Mike Johnson. Au cours du rassemblement, ce dernier a pris la parole : « Ces appels pour un cessez-le-feu sont outrageux (tdlr). » La foule avait répondu à son discours en criant : « Pas de cessez-le-feu! »

Alors que la réponse militaire israélienne aux attaques meurtrières du Hamas du 7 octobre dernier a tué plus de 12 000 Palestiniens, selon le ministère de la santé palestinien, et détruit ou endommagé près de la moitié de la ville de Gaza, les discours sur une potentielle évolution vers la paix peinent à s’imposer dans les débats politiques aux États-Unis et en Europe.

Le Délit s’est interrogé sur l’évolution des conceptions de la paix dans le cadre du conflit qui oppose Israël au Hamas. Pour ce faire, nous nous sommes entretenus avec un ancien professeur d’études religieuses de McGill, Norman Cornett.

Le Délit (LD) : Comment comprendre ce rejet du cessez-le-feu par une partie de la population en Israël et aux États-Unis? La paix n’est-elle plus un idéal?

Norman Cornett (NC) : Quand Mike Johnson a dit qu’un cessez-le-feu était un outrage, ça revenait à dire : « On appuie la guerre. » C’est s’afficher comme des belliqueux et dire que cette guerre est juste. Peut-on parler d’une guerre juste? N’y a‑t-il pas là une contradiction?

Cette approche est dangereusement binaire. C’est soit Israël, soit Palestine. Vous êtes soit pour nous, soit contre nous. Quand on regarde ce qui se passe depuis le début de ce conflit, ceux et celles qui prônent un cessez-le-feu, ou plus, la paix, sont décriés et réduits au silence. C’est comme si la paix revenait à céder au terrorisme, céder au Hamas. La paix, pour ces personnes, c’est la trahison des pauvres innocents et innocentes morts lors des attaques du 7 octobre 2023. Donc, il n’y a pas de marge de manœuvre. Il n’existe aucune zone grise. Comment peut-on arriver à une solution quand tout est noir ou blanc, vrai ou faux, bon ou mauvais? Pour arriver au bout de ce conflit Israël-Hamas, il faut des compromis.

Pour moi, cette approche binaire revient à jumeler la guerre et la sainteté ou la guerre et le sacré. Pour les colons juifs en Israël, il ne s’agit pas d’un simple conflit géopolitique, de même, les combattants du Hamas sont engagés jusqu’à la mort dans une guerre sainte. Pour ces derniers, il s’agit de combattre jusqu’à sa destruction, il s’agit d’éradiquer Israël. Des deux côtés, les extrêmes ont sacralisé les enjeux. Ce phénomène est loin d’être unique à une religion. Dans les religions monothéistes, il y a cette idée centrale qu’on peut marier une cause sacrée avec le militarisme. Évidemment, on pense aux croisades du Moyen Age. C’était la guerre sainte. Il fallait se réapproprier la Terre sainte, Jérusalem, peu importe les pertes en vies humaines, peu importe les coûts. Sitôt qu’une religion vient sacraliser un conflit militaire, on se trouve dans une impasse. Donc, pour arriver à une solution et à la paix, il faut désacraliser.

« C’est comme si la paix revenait à céder au terrorisme, céder au Hamas. La paix, pour ces personnes, c’est la trahison des pauvres innocents et innocentes morts lors des attaques du 7 octobre 2023 »

LD : Vous parlez d’une guerre sacralisée, est-ce que vous pouvez nous en dire plus?

NC : Un cessez-le-feu de quatre jours a été déclaré, mais le cabinet israélien et le premier ministre Netanyahou ont dit : « Nous, on va continuer la guerre. » Au sein du cabinet israélien, plusieurs ministres affiliés à des mouvements d’extrême droite ont dit vouloir une nouvelle Nakba [exode de 800 000 Palestiniens après la défaite des pays arabes face à Israël en 1948, ndlr]. Ça veut dire : « On va se battre, on va les chasser du territoire. » Au début, on croyait que c’était pour répliquer à l’attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre. Maintenant, on nous dit qu’après, il nous faut gérer Gaza. Rappelons que jusqu’en 2007, Israël occupait Gaza et avait des kibboutz, avant qu’Ariel Sharon les obligent à quitter Gaza, tout en maintenant un contrôle complet. Netanyahou dit maintenant : « On va assurer la sécurité d’Israël, peu importe l’issue du conflit. »

Aussi longtemps qu’on a recours aux solutions uniquement militaires, on est pris dans ce cercle vicieux. À quand des pourparlers sur une solution à deux États, avec un État palestinien viable et des frontières contiguës? Sans solution politique, on est pris dans un engrenage de guerre éternelle, où le but n’est pas de chercher une solution autre que de les massacrer.

Quand on parle du conflit Israël-Hamas, c’est un euphémisme ; les deux belligérants sont engagés dans une guerre totale, une guerre où tous les moyens sont mobilisés et justifiés, et où il n’y pas de distinction entre civils et combattants. Il faut garder en tête que quand Netanyahou et les généraux israéliens nous parlent d’attaques précises, de bombardements ciblés, la réalité est toute autre. On est dans la guerre totale. Qui plus est, ce qui est pratiqué actuellement, c’est ce qu’on appelle la politique de la terre brûlée. On ne laisse rien. C’est exactement ce qu’Israël a fait en 2007 quand les colons ont quitté Gaza. Toutes les infrastructures qui étaient en place ont été rasées, pour ne plus rien laisser à la population sur place. Qu’est-ce qui se passe actuellement? La même politique de la terre brûlée. Qu’est-ce qui reste des infrastructures? Que ce soient les aqueducs, les hôpitaux, les centres d’accueil, presque tout a été détruit.

« Il n’existe aucune zone grise. Comment peut-on arriver à une solution quand tout est noir ou blanc, vrai ou faux, bon ou mauvais? »

LD : Alors comment parler de paix?

NC : Il faut démystifier, car la sacralisation du militarisme écarte la paix comme valeur fondamentale. Tant et aussi longtemps que la guerre reste plus grande que nature, qu’aucun compromis n’est permis, il n’y a pas de paix. Et je tiens encore comme spécialiste en sciences des religions, à souligner l’importance de la paix dans les religions monothéistes, en politique et en géopolitique. Chez les juifs, pour se saluer, on dit « Shalom », ce qui veut dire « la paix ». Et quand on salue quelqu’un, en tant que musulman, on dit « As-salaamu alaikum » : « que la paix soit sur vous. » Donc en philosophie et en théologie, on parle de hiérarchie des valeurs. Or, au sommet de cette hiérarchie, dans chacune des religions monothéistes, c’est la paix. Au point qu’elle a infusé la langue et même les liturgies. C’est là-dessus qu’il faut insister.

Il y a des idéaux vers lesquels on peut tendre, des rêves que l’on peut chercher à réaliser. La paix est l’un d’entre eux. Un excellent exemple ici, c’est Nelson Mandela, qui a reçu le prix Nobel de la paix. Retournons dans l’Histoire. Nelson Mandela est jeune, en Afrique du Sud, dans une société avec l’apartheid, et il se joint au Parti Africain en tant que marxiste où il prend les armes. Ça, on l’oublie bien souvent. Il a embrassé le militarisme pour atteindre son but : la fin de l’apartheid. Mais qu’est-ce qui est arrivé alors qu’il était emprisonné pendant plus de 20 ans sur l’île Robben? Il a réfléchi, et il y a eu un changement de cap chez lui. Son message, ce n’était plus la lutte armée pour en finir avec l’apartheid, mais c’était la résistance non violente. Or, vous le savez, l’Afrique du Sud en ce moment a appuyé haut et fort les Palestiniens dans le conflit présent, étant donné qu’ils se sont vus dans cette tentative de se libérer et ils sont conscients de l’héritage de Nelson Mandela et du modèle de son évolution politique.

Depuis le début de ce conflit, le récit qu’il faut suivre de près, c’est celui d’une perspective fataliste, portée par une partie de la classe politique et de la population, que la guerre est inévitable et qu’elle fait partie intégrante de la condition humaine, plus spécifiquement de l’histoire humaine. La question existentielle se pose, est-ce qu’on peut céder à un tel fatalisme? Non, mais où doit-on chercher la paix?

Aujourd’hui, Biden est hautement critiqué sur la scène internationale, mais aussi domestique. Parce qu’au lieu d’être un médiateur, il affiche un soutien inconditionnel à Israël dans son offensive. Dans quelle mesure peut-il contribuer à des négociations sur la paix? On assiste peut-être à la fin de la « Pax Americana » des États-Unis comme gendarme du monde. Mais qui a créé l’onde de choc sur la scène diplomatique internationale en mars dernier, en actant le rapprochement de l’Iran Chi’ite, et de l’Arabie Saoudite Sunnite? Il s’agit de la Chine. Nous sommes peut-être au seuil d’un nouvel ordre mondial établi par la Chine, qui vient inaugurer au 21e siècle un autre modus vivendi sur les conflits : la « Pax Sinae ». Finalement, c’est peut-être la Chine qui pèsera sur le processus de paix au Moyen-Orient.

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« Liberté aux prisonniers de guerre! » https://www.delitfrancais.com/2023/11/08/liberte-aux-prisonniers-de-guerre/ Wed, 08 Nov 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53314 Un groupe de manifestants ukrainiens dénonce les crimes de guerres de la Russie.

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Dimanche 5 novembre dernier, Mariia Zaborovska et Vira Seletska, deux Ukrainiennes habitant à Montréal, ont lancé un appel à la manifestation à partir du groupe Instagram @silentprotest_mtl_ua. Une trentaine de personnes ont répondu à l’appel. Réunis aux alentours de midi devant le consulat général de la fédération de Russie, les manifestants ont brandi devant le consulat des pancartes sur lesquelles il était inscrit « La Russie est un État terroriste, tdlr », « Liberté aux prisonniers de guerre » ou encore « Arrêtez les tortures ».

Dans une entrevue avec Le Délit Mariia Zaborovska explique que cette manifestation était une contestation de l’invasion russe, mais que son but était plus particulièrement de dénoncer les crimes de guerre commis par la Russie à l’encontre des prisonniers ukrainiens. En effet, depuis le début de la guerre en Ukraine le 24 février 2022, la communauté internationale, dont le Rapporteur spécial sur la torture aux Nations Unies, ont fait part de leurs inquiétudes quant au traitement des prisonniers de guerre ukrainiens détenus en Russie. Le groupe de manifestants a en particulier dénoncé les crimes de torture et de sous-alimentation, en affirmant notamment que « neuf prisonniers ukrainiens libérés sur dix ont subi de la torture ». Toutefois, on note que l’utilisation de la torture à l’encontre des prisonniers ukrainiens n’a pas pu être vérifiée par les Nations Unies, sachant que la Russie leur a refusé l’autorisation d’inspecter ses prisons. La connaissance de telles pratiques repose donc sur les témoignages de prisonniers libérés.

Par la suite, le groupe de manifestants a commencé à marcher à travers le centre-ville, pour finalement arriver au Square Phillips, aux abords de la rue Sainte-Catherine. Une fois à destination, 15 membres du groupe ont ôté leurs manteaux, pour laisser place à des chandails blancs, chacun arborant au dos une lettre. Une fois les manifestants alignés, le public pouvait lire sur leurs dos : « Ils sont torturés. »

Sortir du silence

Depuis le début de la guerre, le groupe a organisé des protestations silencieuses pour soutenir l’Ukraine et dénoncer l’agression russe dont elle est victime. Depuis maintenant 20 mois, le groupe a organisé et a appelé à participer aux courses de solidarité comme « Run for Ukraine », qui a tenu des stands de récolte de dons, et a réalisé des sit-in dans les espaces publics de Montréal. Mariia Zaborovska explique : « Depuis avril, nous organisons des manifestations silencieuses pour sensibiliser les gens; on essaye d’utiliser des moyens adaptés aux besoins. » Force est de constater que « la couverture médiatique du conflit en Ukraine diminue » face aux nouveaux événements d’actualité, comme la récente escalade du conflit entre Israël et le Hamas, qui depuis un mois occupe une place majeure dans l’actualité. Mariia affirme que c’est pour tenter de pallier cette diminution de couverture médiatique que cette fois-ci, ils ont décidé de faire une manifestation d’envergure et « définitivement pas silencieuse ».

« C’est [la couverture médiatique qui diminue, ndlr] un des plus gros défis auxquels nous devons faire face. Le monde est en feu et je comprends cela […] En tant qu’Ukrainiens, c’est notre devoir premier de parler, d’organiser des manifestations, et de sensibiliser les gens […] Notre but est simplement d’inciter les gens à s’informer, à faire des recherches pour rester au courant de ce qui se passe en Ukraine actuellement. On veut pousser les gens à aller voir ce qui se passe et ce qui est écrit dans les journaux comme CNN ou le New York Times. Si après nous avoir vus dans la rue les gens font cela, ça nous suffit amplement. On veut juste rappeler aux gens que ce conflit existe encore. »

Une baisse du support international?

Le 10 octobre dernier, 3 jours après le début de l’escalade entre Israël et le Hamas, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a fait part, au cours d’un entretien télévisé pour la chaîne française France 2, de sa crainte vis-à-vis d’une potentielle baisse du soutien international envers l’Ukraine. En effet, alors que la guerre se poursuit, d’autres conflits ont éclaté depuis février 2022, et les pays soutenant l’Ukraine ont d’autres préoccupations stratégiques et financières. Les États-Unis et l’Union européenne, qui constituent les principaux soutiens à l’Ukraine depuis le début de la guerre, se retrouvent désormais fortement impliqués dans deux conflits à durée relativement indéterminée.Alors que Biden affirmait encore le 1er octobre que le soutien à l’Ukraine ne s’affaiblissait pas, la question se pose désormais, étant donné des divisions récentes au sein du Congrès américain. Mariia rappelle néanmoins que « donner du soutien à l’Ukraine ce n’est pas faire de la charité, ni une cause émotionnelle. Si l’Ukraine est vaincue aujourd’hui, qu’adviendra-t-il des pays baltiques? Que va t‑il arriver à la Pologne? Ces pays sont aussi en danger. Aider l’Ukraine c’est donc plutôt un moyen de prévenir de futures attaques de la Russie. […] Soutenir l’Ukraine n’est pas uniquement lui fournir de l’aide, mais c’est faire barrière et aider l’ensemble des pays qui sont et seront potentiellement à risque ».

En abordant le sujet d’un affaiblissement de l’aide internationale pour l’Ukraine, Mariia a surtout souhaité notifier l’enjeu de futures élections dans le monde entier : la récente élection du parti pro-russe Smer-SD en Slovaquie montre que l’opinion publique occidentale sur la guerre en Ukraine n’est ni unanime, ni intemporelle. Mariia affirme donc que « notre destin est entre les mains de ces pouvoirs qui changent en Europe et aux États-Unis ».

Touchés, malgré la distance

Selon Mariia, 95% des gens présents à la manifestation étaient Ukrainiens. Elle affirme que malgré la distance, les gens sont touchés par la guerre, que ce soit indirectement ou directement. Mariia nous a expliqué que « la première année, c’est comme si l’une de mes moitiés était en Ukraine et l’autre était ici, à Montréal. C’était très dur et troublant de voir la vie normale ici, tout en sachant qu’il y a la guerre à la maison [en Ukraine, ndlr] […] Maintenant les choses sont plus stables, on doit vivre et éduquer nos enfants. Mais il faut qu’on aide le pays comme on peut, justement en faisant des manifestations et des collectes de dons. Ici [dans le groupe, ndlr] par exemple, chacun donne dès qu’il peut ». Depuis le début de la guerre, le groupe récolte des dons à travers ses activités et manifestations. Pour cette manifestation, le groupe a décidé de soutenir une fondation qui soutient les femmes de combattants morts, ou faits prisonniers au cours de la guerre. « Ces personnes n’ont pas simplement perdu quelqu’un de cher, elles ont aussi (souvent) perdu la personne qui pourvoit à leurs besoins ».

Retrouvez plus d’informations sur le compte Instagram @silentprotest_mtl_ua, ainsi que plus de photos à propos de l’action sur le compte instagram de Lana : @lanasvitphoto_mtl.

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Reportage photo https://www.delitfrancais.com/2023/11/01/reportage-photo-2/ Wed, 01 Nov 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53136 Retour sur l’activisme montréalais : Enraciné au sein de la communauté étudiante.

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25 octobre 2023
Manifestation sur le campus de McGill en soutien à la Palestine et aux communautés autochtones.

Margaux Thomas | Le Délit

23 septembre 2022
Marche pour le climat organisée en partie par des étudiants de McGill.

Dominika Grand’Maison | Le Délit

30 octobre 2023
Manifestation contre la hausse des frais de scolarité pour les étudiants hors province, dont ceux à McGill.

Véronique Martel | Le Délit

25 octobre 2023
Manifestation sur le campus de McGill en soutien à la Palestine.

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« On vous ment! » https://www.delitfrancais.com/2023/11/01/mohawk-mothers/ Wed, 01 Nov 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=53139 Les Mères mohawks donnent une conférence à McGill et le procès avance.

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Invité par l’Association des étudiants en anthropologie le 26 octobre dernier, le collectif des Mères mohawks (Kanien’keha:ka Kahnistensera) a tenu une conférence dans un amphithéâtre de McGill. La conférence nommée « On vous ment! » avait pour but d’informer les mcgillois sur le projet du Nouveau Vic, qui prend place sur un espace suspecté de contenir des tombes non marquées d’enfants autochtones. Ces derniers auraient subi les expériences scientifiques du programme MK-Ultra au cours des années 1950. Lors de la conférence, les Mères mohawks ont dit vouloir « rétablir la vérité (tdlr) » sur la responsabilité de McGill et de la Société Québécoise des Infrastructures (SQI) – organisations avec lesquelles le collectif est encore actuellement en procès – dans des travaux archéologiques qu’elles qualifient d’« inacceptables ».

Une conférence pour rétablir la vérité?

Lors de la conférence, les femmes autochtones, accompagné de l’anthropologue Philippe Blouin et d’une des personnes représentant les moniteurs culturels (qui sont présents sur le site du Nouveau Vic lors des travaux) sont revenus sur l’histoire des travaux au Nouveau Vic ainsi que sur la bataille juridique qu’ils mènent depuis plus d’un an contre McGill et la SQI. En s’adressant aux étudiants de McGill, Kwetiio, une des Mères mohawks, a déclaré : « Vous ne voyez que ce qu’ils veulent que vous voyiez, pas ce qui se passe vraiment. » Ces dernières ont dit vouloir répondre aux informations publiées dans les courriels officiels du vice-principal exécutif de McGill, Christopher Manfredi. Dans un courriel adressé à l’ensemble de la communauté mcgilloise, l’Université a affirmé qu’ « aucune trace de la présence de sépultures anonymes n’a été décelée », une affirmation démentie par le comité des Mères mohawks. Dans une publication Instagram sur le compte de l’Association des étudiants en anthropologie, ces derniers affichent leur soutien pour les Mères mohawks et s’adressent aux étudiants de McGill en affirmant : « Nous vous exhortons à faire de même. » La conférence a donc eu lieu dans un bâtiment de McGill réservé pour l’occasion par l’Association des étudiants en anthropologie, indépendante de l’administration de McGill. Contactée par Le Délit pour leur avis sur cette conférence, l’Université n’a pas répondu à nos sollicitations.

« McGill et la SQI ont interprété ce document et les données archéologiques dans leur propre intérêt »

Philippe Blouin, anthropologue et orateur à la conférence

Un soutien palestinien

Sachant que la conférence a eu lieu le même jour que le rassemblement pro-palestinien sur le campus de McGill, les deux mouvements se sont rejoints. Juste après la conférence, les organisateurs et orateurs de ce rassemblement ont invité les Mères mohawks à s’exprimer devant les participants du rassemblement. Kwetiio et sa mère, toutes les deux membres du comité des Mères mohawks, ont fait entendre la cause menée par les populations autochtones, faisant un lien avec la cause palestinienne : « Nos terres sont violées et c’est inacceptable. C’est pour cela que nous sommes là, pour nos terres. »

Des avancées dans le procès

Au mois de septembre, les Mères mohawks avaient déjà eu une audience mais avaient perdu le procès par manque de preuve. Deux jours après la conférence, le vendredi 27 octobre, les Mères mohawks ont assisté à une deuxième audience devant le palais de justice de Montréal. Grâce à cette dernière, le procès contre les promoteurs du projet Nouveau Vic – soit McGill et le gouvernement du Québec – a pu se poursuivre. Le but des Mères mohawks est de retarder les futurs travaux de l’ancien Hôpital Royal Victoria jusqu’à ce qu’une enquête archéologique plus approfondie soit menée. Ceci permettrait de sauvegarder toute preuve potentielle – encore cachée dans la terre – de tombes anonymes. Une des priorités du groupe autochtone est de garantir que les protocoles de Kaianere’kó:was (la Grande Loi de la Paix) soient respectés et compris lors du procès.

« Vous ne voyez que ce qu’ils veulent que vous voyiez, pas ce qui se passe vraiment »

Kwetiio, une des Mères mohawks

Les Mères mohawks affirment avec conviction que McGill et la SQI ne respectent pas les termes de l’accord conclu en avril. Malgré le fait que McGill et la SQI soient engagés à mener une enquête qui serait co-dirigée par les autochtones, les Mères mohawks estiment que cet engagement a été bafoué. Lors de l’audience, la SQI a de son côté soutenu fermement qu’elle s’est conformée à l’accord et accuse les Mères mohawks de tenter de modifier ce dernier. Le point de discorde majeur réside dans la clause 17 de l’accord, qui concerne les « découvertes inattendues » et stipule que dans de tels cas, un comité doit être convoqué. Philippe Blouin, anthropologue et l’un des orateurs de la conférence, considère qu’il y a beaucoup de zones grises dans cet accord : « McGill et la SQI ont interprété ce document et les données archéologiques dans leur propre intérêt. » Une des personnes faisant partie des moniteurs culturels a mentionné le passé des terres sur lesquelles reposent le projet du Nouveau Vic, y compris les horreurs du projet MK-Ultra, et affirme que McGill et le gouvernement québécois « s’entêtent toujours et ne collaborent pas ».

De son côté, la SQI argumente que la seule interprétation plausible d’une découverte inattendue serait la découverte de corps, bien que cette spécification ne figure pas dans l’accord. En revanche, les Mères mohawks soutiennent que la détection par des chiens renifleurs constitue une « découverte inattendue ». Une étude de 2021, présentée lors de l’audience par les Mères mohawks, a révélé que lorsqu’au moins deux chiens renifleurs détectent les mêmes odeurs au même endroit, la probabilité d’un faux positif est inférieure à 0,06%. Cependant, McGill et la SQI rejettent catégoriquement ces résultats, présentant des chiffres divergents, provenant d’une étude datant de 2011. Cette pluralité de sources qui se présente comme expertes complexifie la situation.

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L’insécurité alimentaire à McGill https://www.delitfrancais.com/2023/10/25/linsecurite-alimentaire-a-mcgill/ Wed, 25 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52957 Quelles sont les solutions durables? Une discussion avec des experts.

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Remédier à l’insécurité alimentaire au sein du campus est devenu un enjeu majeur pour la communauté étudiante mcgilloise. Récemment, les coûts exorbitants des repas fournis par les établissements réfectoires de l’Université ont suscité des critiques. Payer 18 dollars pour une salade dans une cafétéria de bibliothèque, ou débourser plus de cinq mille dollars pour un plan de repas en résidence sont des prix immoraux pour Nilly, membre du Groupe de recherche d’intérêt public de McGill (QPIRG). Dans une entrevue avec Le Délit, elle a exprimé que l’administration de McGill privilégie le profit au détriment du bien-être de leurs étudiants. Nilly souligne que les repas proposés sur le campus de McGill étaient autrefois gérés par des coalitions étudiantes, qui ont depuis été remplacées par des grandes entreprises indépendantes comme le café Redpath.

Pour répondre à ces problèmes, des organisations dirigées par des étudiants ont été mises en place au sein de l’Association des étudiants de l’Université McGill (AÉUM), avec pour objectif principal de remédier à l’insécurité alimentaire vécue au sein de McGill. En mars dernier, l’organisation étudiante Let’s Eat McGill a réuni plus de 200 étudiants dans le but de sensibiliser sur les différentes initiatives alimentaires afin de réduire le coût et d’augmenter la qualité des repas sur le campus. L’Association étudiante de nutrition et d’accessibilité (SNAC) (tdlr) de McGill a participé à l’assemblée et continue à apporter des solutions durables et accessibles à la communauté étudiante. Lors d’une entrevue avec Alexa, étudiante en économie et sciences cognitives à McGill et co-présidente de SNAC, elle a souligné les avancées significatives, telles que Good Food Box, réalisées depuis leurs premières rencontres. Cependant, elle a également relevé que cela ne constitue qu’un point de départ, et que SNAC doit aujourd’hui faire face à de nombreux défis, notamment en termes de logistique et de priorisation des personnes les plus vulnérables.

« La solution se trouve dans l’expansion de fermes urbaines dans le centre-ville de Montréal et sur les campus universitaires »


La discussion du Panel


Lundi dernier, le QPIRG a accueilli trois panélistes pour animer une discussion portant sur l’insécurité alimentaire, explorant ses causes, ses conséquences et les solutions possibles. Ayub Alleyne est le directeur des affaires à la Fondation Soeur Sabria, une organisation non gouvernementale montréalaise qui apporte un soutien aux membres les plus vulnérables de la communauté en matière de nourriture et d’hébergement, en particulier auprès des femmes et des enfants, et au sein de la communauté musulmane. Sona Sadio est co-coordinatrice du collectif Sankofa qui vise à aborder l’insécurité alimentaire, touchant selon eux de manière disproportionnée la communauté noire et autochtone. Enfin, le professeur Erik Chevrier de l’Université Concordia est un activiste impliqué dans de nombreux groupes travaillant à construire des modèles économiques favorisant la durabilité de la biosphère.

Les panélistes ont d’abord discuté des causes historiques et sociales de l’insécurité alimentaire. Le professeur Chevrier a souligné que l’insécurité alimentaire est un problème mondial : aujourd’hui, un huitième de la population de la planète souffre de famine. Il est donc indispensable de réfléchir à des solutions qui nourrissent les personnes en besoin à Montréal, mais qui bénéficient aussi à la durabilité mondiale. Dans la région de Montréal, près de 900 000 personnes ont eu besoin d’aides alimentaires en 2022. L’impact disproportionné de l’insécurité alimentaire des communautés immigrées, noires et autochtones de Montréal a été souligné par Mme Sadio. Elle a particulièrement souligné la responsabilité du néocolonialisme et de la surconsommation, dans la perte de compétences agricoles traditionnelles respectueuses de l’environnement.

Les panélistes ont ensuite abordé le choc culturel lié à l’alimentation pour les communautés immigrées au Canada. Mme Sadio a partagé que son premier choc culturel en arrivant à Montréal du Tchad n’était pas le froid ou la neige, mais la nourriture. Le manque d’accessibilité à une variété d’ingrédients culturellement diversifiés constitue une barrière culturelle importante pour les immigrants. Ayub a aussi souligné que le problème de l’insécurité alimentaire ne réside pas uniquement dans la distribution de nourriture, mais aussi dans la qualité des aliments proposés. Comment peut-on nourrir les populations les plus vulnérables à un coût responsable en priorisant la nature et la valeur nutritionnelle des aliments? Le professeur Chevrier a donc relevé le paradoxe capitaliste de l’insécurité alimentaire : afin d’aider ceux qui souffrent d’insécurité alimentaire, il est essentiel de réduire le coût de la nourriture. Toutefois, il est tout aussi crucial de garantir des revenus justes pour les agriculteurs, en particulier ceux qui sont noirs ou autochtones. Les panélistes se sont alors interrogés : « Les prix alimentaires bas sont-ils toujours synonymes d’exploitation des agriculteurs? »


Le panel a donc exploré les solutions que les étudiants et l’administration de McGill peuvent mettre en place pour donner accès à une nutrition durable et responsable. En exerçant une pression sur les gouvernements et les grandes institutions, la communauté étudiante peut influencer les politiques et les pratiques agricoles à l’échelle provinciale et nationale. De plus, se familiariser avec le quotidien des fermiers et aussi les longues étapes nécessaires pour cultiver les aliments est essentiel pour mieux saisir la réalité du travail agricole. Le professeur Chevrier estime qu’observer le processus laborieux de la culture d’une pomme de terre pourrait inciter à en éviter le gaspillage à l’avenir. En outre, l’apprentissage sur l’agriculture permettra de développer des compétences pratiques dans ce domaine, préparant ainsi le terrain pour la mise en place de fermes urbaines. Pour le professeur Chevrier, la solution se trouve dans l’expansion de fermes urbaines dans le centre-ville de Montréal et sur les campus universitaires. Il a affirmé qu’en promettant l’instauration de fermes urbaines sur le campus de McGill, l’Université renforcera non seulement la disponibilité d’aliments saisonniers, mais garantira également une qualité optimale grâce à une supervision directe des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement. De ce fait, les étudiants et l’administration pourront bénéficier d’un accès facilité à une alimentation saine et locale, tout en contribuant activement à la réduction de l’empreinte écologique de l’institution. Enfin, les panélistes ont rappelé que les solutions doivent être de nature communautaire. Ils ont expliqué que en formant des organisations étudiantes et en créant une coalition avec d’autres universités, en partageant nos connaissances et nos expériences et en élaborant des solutions créatives et durables, nous sommes capables d’apporter un réel changement quant à l’insécurité alimentaire à McGill et à Montréal.

« Afin d’aider ceux qui souffrent d’insécurité alimentaire, il est essentiel de réduire le coût de la nourriture. »

Quelles initiatives ont déjà été mises en place pour soutenir les étudiants?

Alexa a souligné que le travail accompli par les organisations étudiantes a eu un impact important : Midnight Kitchen participe à un système alimentaire alternatif qui privilégie l’entraide, les mouvements populaires, les droits des travailleurs, les soins communautaires et la durabilité. Les services offert incluent des déjeuners gratuits le mercredi et jeudi à 13h dans la Salle de bal de l’AÉUM, des services de traiteur gratuits pour les événements en accord avec leur mandat politique, des jardins sur le campus Macdonald, ou encore des cartes d’épicerie d’urgence (actuellement suspendues). SNAC McGill privilégie la durabilité, la nutrition et l’accessibilité au sein du campus, proposant des ateliers de cuisine et des programmes de distribution alimentaire. D’après Alexa, SNAC a déjà aidé plus de 1 100 étudiants, commandant près de 1 000 dollars d’aliments par semaine. Enfin, l’organisme Partage et Solidarité a comme objectif de récupérer la nourriture non vendue des magasins pour la distribuer gratuitement à la communauté de Montréal, au-delà de celle de McGill. Alexa, Mme Sadio, M. Alleyne et le professeur Chevrier encouragent les étudiants de McGill à se renseigner sur les enjeux liés à l’agriculture durable, à la nutrition et aux ressources qui sont à leur disposition pour combattre l’insécurité alimentaire.

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Et si le public proposait les sujets? https://www.delitfrancais.com/2023/10/25/et-si-le-public-proposait-les-sujets/ Wed, 25 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52968 Pivot inaugure sa nouvelle plateforme web : la Salle de nouvelles.

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Créé en 2021, le média indépendant et progressiste Pivot a lancé le 19 octobre dernier la Salle de nouvelles, une plateforme en ligne qui permet à ses abonné·e·s de soumettre des idées d’articles et de commenter les propositions des autres membres de la communauté. Cette initiative a pour but de créer un espace d’échange entre l’équipe éditoriale et les préoccupations du lectorat, qui peut se prononcer sur les sujets qu’il souhaite voir couverts.

Lors de la soirée de lancement agrémentée de numéros d’humoristes, collaborateur·rice·s et grand public étaient convié·e·s pour se familiariser avec le fonctionnement de la Salle de nouvelles. Il suffit de se connecter à la plateforme en ligne –accessible aux abonné·e·s – pour voir apparaître les suggestions d’article, qui seront révisées par l’équipe éditoriale de Pivot et qui, en fonction de leur popularité, pourraient se voir choisies. La personne qui est à l’origine de l’idée d’article serait alors mentionnée dans l’article lors de sa publication, afin de mettre en valeur ce tout nouveau processus collaboratif de production des nouvelles.

Comment se définit Pivot?

La soirée du 19 octobre a aussi été l’occasion de présenter la ligne éditoriale de Pivot, afin de faire connaître ses angles de prédilection dans la couverture de l’actualité. Créé il y a plus de deux ans, Pivot résulte de la fusion du volet francophone de journal multiplateforme Ricochet et du média Majeur, qui proposait jusqu’en 2021 du « contenu d’actualité à contre-courant des intérêts des élites économiques et politiques », comme indiqué sur son site web. Dans la continuité de cette mission, Pivot se présente comme un média ouvertement progressiste qui entend élargir les perspectives journalistiques au Québec, optant pour le traitement de certaines questions d’actualité qui ne sont pas assez contextualisées dans les médias traditionnels.

« Pivot estime que la prétention à l’objectivité ou à la neutralité masque surtout la persistance, consciente ou non, du point de vue, des conceptions et des valeurs dans l’information »

Un article sur la bande dessinée Résister et fleurir qui décrit la lutte contre le déboisement à Hochelaga ou encore un dossier d’enquête sur les conditions des travailleur·se·s au Club Med de Charlevoix ; voici quelques exemples des histoires pour lesquelles certain·e·s membres de l’équipe se sont dits particulièrement interpellés. Éclairant des enjeux locaux, Pivot se consacre également aux enjeux internationaux à résonance locale comme les impacts du conflit israélo-palestinien à Montréal. La couverture de la manifestation pro-palestinienne du 13 octobre dernier au centre-ville aura été l’occasion de recueillir des témoignages à chaud sur la condamnation par les gouvernements provincial et fédéral de toute manifestation pro-Palestine.

Pivot propose un journalisme « factuel » et « critique », selon sa page web dédiée à sa politique éditoriale. On peut également
y lire que « Pivot estime que la prétention à l’objectivité ou à la neutralité masque surtout la persistance, consciente ou non, du point de vue, des conceptions et des valeurs dans l’information », qui interviennent « inévitablement à diverses étapes » de l’élaboration des articles.

La Salle de nouvelles a pour objectif de permettre au public de participer activement au processus de création des nouvelles en évitant pour Pivot de se cantonner à une perspective journalistique unique. Selon Alex Ross, ayant cofondé Pivot et maintenant à sa rédaction en chef, la salle de nouvelles devient une manière de « travailler en collégialité » et de développer « une méthode plus démocratique » par la réinvention des pratiques du milieu. Iel explique que si les biais dans les choix des sujets sont inévitables, la participation des abonné·e·s permettrait un rééquilibrage des perspectives autour de la notion de progressisme de laquelle se réclame Pivot.

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MK-Ultra : les victimes réclament justice https://www.delitfrancais.com/2023/10/18/mk-ultra-les-victimes-reclament-justice/ Wed, 18 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52797 Des expériences illégales menées sur des sujets humains à McGill.

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Le 2 octobre dernier, la Cour d’appel du Québec a accordé l’immunité juridique au gouvernement américain, qui aurait laissé libre cours à des expériences de lavage de cerveau 70 ans plus tôt dans un hôpital psychiatrique de McGill. Le programme de recherche MK-Ultra, créé secrètement en 1953 par la CIA, développait des techniques de contrôle de l’esprit sur des cobayes humains non consentants. Il a pris place dans plus de 80 institutions, dont l’Institut Allan Memorial à McGill. Depuis, plusieurs familles de victimes réclament justice et estiment que des dommages irréparables leur ont été causés.

Cette affaire fait suite à une action collective entreprise en 2019 au nom de toute personne ayant subi des préjudices à la suite des expériences MK-Ultra. Cette action collective poursuit l’Université McGill, l’Hôpital Royal Victoria et les gouvernements canadien et américain.

En vertu de la Loi sur l’immunité des États de 1982, la Cour d’appel du Québec a décrété que le gouvernement américain ne peut être poursuivi en sol canadien, bénéficiant d’une immunité au moment où les expériences MK-Ultra ont été orchestrées. Les avocats du procureur général des États-Unis ont obtenu gain de cause en plaidant que tout procès intenté à l’encontre du gouvernement américain doit avoir lieu dans leur pays. Selon les plaignants, cette décision est invalide parce qu’elle ne tient pas compte d’une application rétrospective de la clause 6A de la Loi, qui établit une dérogation à l’immunité de juridiction dans le cas de « décès ou dommages corporels survenus au Canada ».

Dans quel contexte MK-Ultra a‑t-il eu lieu?

Au début de la guerre froide, la CIA suspectait l’URSS d’avoir découvert une drogue puissante permettant le lavage de cerveau, alors que certains combattants américains auraient été reconditionnés au sortir de leur emprisonnement dans le camp communiste. Durant la « Peur Rouge », un fort sentiment anticommuniste se propage aux États-Unis ; c’est dans ce contexte que la CIA crée le projet hautement confidentiel MK-Ultra, afin de mettre au point des techniques de manipulation mentale. Il est reconnu assez unanimement que le financement des expériences à l’hôpital psychiatrique de McGill provenait en partie de la CIA, sous couvert de fausses associations.

Électrochocs 30 à 40 fois plus forts que la moyenne, administration de LSD-25, coma artificiel et mélange de médicaments : tels étaient les traitements infligés aux patients qui entraient à l’Institut Allan Memorial, dirigé par son tout premier directeur, Donald Ewen Cameron. Co-fondateur de l’association mondiale de psychiatrie (WPA), il est à l’époque psychiatrique de renom et a participé à l’examen du cas dirigeant nazi Rudoplh Hess lors du procès de Nuremberg en 1945.

De 1948 à 1964, Cameron est à la tête de l’hôpital psychiatrique en plein cœur de Montréal. Il y instaure une politique d’« hôpital de jour », considérée novatrice à l’époque, parce qu’elle laisse le choix aux patients de retourner chez eux après avoir reçu leurs traitements dans la journée. Elle permet ainsi d’humaniser les soins et de limiter l’impression d’enfermement.

Une partie des recherches de Cameron mises en œuvre à l’Institut Allan Memorial de McGill portaient sur le traitement de la schizophrénie. Son article co-rédigé en 1958 présente une approche psychiatrique visant la « déstructuration » du cerveau du patient : « L’objectif de la thérapie par électrochocs est de produire, en combinaison avec le sommeil, un état de confusion que nous appelons déstructuration complète. (tdlr) » Cet « état de confusion » mènerait alors le patient à perdre toute notion spatio-temporelle, puis de son identité, afin d’entamer par la suite une période de « reprogrammation » du cerveau en le bombardant de messages à répétition. Ces expériences auraient notamment créé des troubles de la parole, d’incontinence et l’amnésie chez les patients.

Témoignage d’une survivante

Lana Ponting, une Winnipégoise de 82 ans contactée par Le Délit, a subi les expériences de Cameron et a accepté de témoigner de son passage au Allan Memorial Institute. Elle réclame une reconnaissance de ses traumatismes ainsi qu’une compensation financière de la part du gouvernement canadien. Ponting a fait une déclaration sous serment devant la Cour supérieure du Québec, appuyant le procès intenté par les mères Mohawks, puisqu’elle croit que des victimes des expériences MK-Ultra ont bel et bien été enterrées en sol mcgillois.

Pour rappel, le collectif des mères Mohawks a déposé une plainte en mars 2022 contre la construction du Nouveau Vic, alléguant que des tombes non marquées d’enfants autochtones, victimes des expériences du docteur Cameron et de mauvais traitements, seraient présentes sur le site.

De tempérament fugueuse, Ponting a été envoyée à l’hôpital psychiatrique en 1958 alors qu’elle était âgée de 15 ans. « J’avais des problèmes avec ma famille. Mon père et ma belle-mère n’avaient aucune idée de ce qu’était réellement l’Allan Memorial Institute. Et puis j’y suis entrée. On m’a donné beaucoup de drogues, y compris du LSD », explique-t-elle.

Ponting avoue ne pas se souvenir beaucoup de cette époque, en raison de la forte dose de médicaments et de drogues qu’elle ingérait. Elle conserve tout de même le souvenir de Cameron comme d’« un homme très méchant » et définit ses traitements comme de la « torture » qui ont laissé chez elle des traces physiques et mentales.

Elle est l’une des rares personnes qui a pu accéder à son dossier médical, qui consignait des notes sur le contexte des expérimentations illégales. Ce dossier s’avère bien souvent crucial pour récolter des preuves médico-légales de ce qui s’est véritablement passé à l’Institut Allan Memorial. En effet, plusieurs familles de survivants n’ont pas pu mettre la main sur ce dossier pour des raisons de confidentialité, ou encore parce qu’il aurait été détruit dans la foulée de la décision de la CIA d’éliminer en 1973 tout document relié au projet MK-Ultra.

Elle conserve tout de même le souvenir de Cameron comme d’« un homme très méchant » et définit ses traitements comme de la « torture » qui ont laissé chez elle des traces physiques et mentales.

Lana Ponting dit ne pas faire ses démarches légales uniquement pour elle-même, mais bien parce qu’elle désire que « tout le monde sache que cela s’est vraiment passé ». Il est toujours possible que l’action collective se poursuive devant la Cour suprême pour infirmer la décision d’accorder l’immunité aux États-Unis dans l’affaire MK-Ultra.

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Chaque enfant compte https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/chaque-enfant-compte/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52608 Une journée d’action pour la vérité et la réconciliation.

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Chaque année, le 30 septembre marque la Journée nationale de la vérité et la réconciliation, un jour férié fédéral au Canada depuis trois ans. Cette journée honore les survivants des pensionnats autochtones, les enfants qui ne sont jamais rentrés chez eux, ainsi que leurs familles et communautés, afin de commémorer le préjudice intergénérationnel que ces écoles ont causé. Cette année, le Foyer pour femmes autochtones de Montréal ainsi que l’organisation Résilience Montréal ont organisé une marche partant du monument Cartier jusqu’à la place du Canada.

« Nous marcherons ensemble »

Au début de la marche, au pied du Mont Royal, les orateurs se sont succédé au micro pour tenir des discours, entonner des chants traditionnels et partager des témoignages émouvants de plusieurs survivants des pensionnats et de leurs descendants. Beaucoup portaient des chandails oranges, symbolisant les souffrances des peuples autochtones causées par les pensionnats autochtones, et brandissaient des pancartes indiquant « Chaque enfant compte », « Ramenez nos enfants à la maison (tdlr) » ou « Soutien à la Kahnistensera » – le groupe de mères Mohawk qui tente d’arrêter les travaux de forage et d’excavation sur le site que l’Université McGill souhaite réaménager. En passant par la rue Milton où se rassemblent de nombreuses personnes sans-abris, en majorité autochtone, les organisateurs de la marche ont encouragé les participants à donner de la nourriture et des vêtements à ceux qui en avaient besoin.

Victor Bonspille, élu chef du conseil de Kanehsatà:ke, territoire Mohawk, a exprimé lors d’un discours très émouvant, le besoin de se souvenir et d’honorer ces enfants, femmes et hommes perdus à cause du système des pensionnats. Bonspille a abordé la question de la reconnaissance des langues, des croyances et des cultures autochtones. Il a aussi demandé que ne soient pas oublié les traditions, les histoires et le passé, car « dès que nous oublions, nous perdons ». En évoquant directement le gouvernement québécois et canadien, il a déclaré : « Ils ont essayé de nous effacer, par le biais du système des pensionnats, par le biais du système judiciaire, et nous ne partons pas. Nous sommes là depuis des générations et nous n’irons nulle part. » C’est en finissant son discours sur une note d’harmonie et d’unité qu’il a remercié « tout le monde ici, toutes les Premières Nations, tous les non-Autochtones, j’apprécie que vous soyez tous venus et que vous manifestiez votre soutien ».

Margaux Thomas | Le Délit

Résilience autochtone

Lors de la marche, alors que les slogans « Nous sommes résilients pour nos enfants, pour la huitième génération » fusaient, Le Délit s’est entretenu avec David Chapman, directeur exécutif et cofondateur de Résilience Montréal, l’un des groupes ayant organisé la marche. Il s’agit d’un centre de jour pour le bien-être des plus vulnérables et constitue un lieu accueillant et sûr. Les personnes traumatisées des difficultés de la rue y sont honorées, défendues et peuvent accéder à des services qui répondent à leurs besoins. Créé en 2019, ce projet communautaire soutient la population autochtone sans- abri à l’angle des rues Atwater et Sainte Catherine. David Chapman parle des Autochtones comme « la population sans-abri la plus marginalisée ». L’objectif global est de restaurer le bien-être physique, émotionnel, spirituel et psychologique [des individus, ndlr].

« Ils ont essayé de nous effacer, par le biais du système des pensionnats, par le biais du système judiciaire, et nous ne partons pas »



Victor Bonspille,
Chef du conseil du territoire Mohawk Kanehsatà:ke

David Chapman explique qu’il s’agit d’une organisation qui « comble les manques ». Son but premier est d’offrir de l’accessibilité : « Vous pouvez être ivre, vous pouvez avoir un partenaire avec vous, un chien ou un rat de compagnie, personne ne vous posera de questions. » Les travailleurs d’intervention – qui sont pour la plupart des travailleurs autochtones – accueillent les personnes qui franchissent leurs portes et répondent à leurs besoins. Parfois, ils doivent refaire « une pièce d’identité, une carte d’assurance maladie, [ils doivent trouver, ndlr] un moyen de retourner chez eux dans le Nord [territoires autochtones du Nunavik, ndlr], de trouver des billets d’avion, un logement, une place en cure de désintoxication et même de les conduire à l’aéroport à cinq heures du matin », et Résilience Montréal s’en occupe. Ils fournissent également des vêtements, un endroit pour se reposer, l’accès à une douche, à Internet ou au téléphone.

Le problème, c’est que l’organisation manque de moyens financiers : « Certains coûts deviennent astronomiques, lorsque nous dépensons plus de 13 000 dollars canadiens par semaine en nourriture (avec 1 000 repas par jour) et que le loyer [de Résilience Montréal, ndlr] est de 20 000 dollars par mois. » Il est toutefois possible de faire des dons pour aider l’organisation.

La communauté mcgilloise mobilisée

Le 29 septembre dernier, la Faculté d’éducation de McGill s’est également mobilisée, comme chaque année depuis cinq ans, lors d’un petit rassemblement sur le campus pour la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation et la Journée du chandail orange. La cérémonie a été ouverte avec le discours de l’aîné invité, Ka’nahsohon Kevin Deer, suivi d’un événement interactif intitulé « Visite critique du campus », développé au sein de la Faculté et guidé par des étudiants autochtones en plein air sur le campus. Parmi les initiatives autochtones que l’Université met en place, il y a trois nouveautés cette année dans les ressources humaines, la reconnaissance de l’excellence autochtone et le renforcement des partenariats. Quinze nouveaux professeurs et employés autochtones ont été accueillis à McGill à l’hiver dernier. Trois membres des Premières nations, Inuits et Métis (PNIM) ont été décernés des doctorats honorifiques en mai et juin 2023. Enfin, McGill a créé un premier Comité consultatif autochtone dont la composition comprendra des leaders communautaires et des parties prenantes internes et externes à McGill.

Margaux Thomas | Le Délit

Les Mères Mohawks « trahies »

Deux jours après la marche de commémoration des survivants des pensionnats et de leur descendants, l’Université McGill ainsi que la SQI (Société des Infrastructures du Québec) ont entamé les travaux de construction du Nouveau Vic « dans une zone où les chiens renifleurs ont détecté des restes humains », d’après la représentante des Mères Mohawks lors d’une conférence de presse le lundi 2 octobre 2023. Il semblerait que McGill et la SQI refusent de coopérer en fournissant des informations de base permettant à l’enquête de conserver un minimum de crédibilité, « alors que les artefacts sont malmenés et que les preuves sont niées sans aucune explication », d’après un avis aux médias que les Mères Mohawks ont fourni pendant la conférence de presse. Les Mères Mohawks se sentent trahies, et affirment que malgré tout le soutien reçu il y a seulement deux jours, lors de la marche, « tout le monde s’en fiche, ils portent leurs chandails oranges, mais c’est tout ».

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La loi 96 : Entre unification et division https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/la-loi-96-entre-unification-et-division/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52635 Retour sur la manifestation du 28 septembre.

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Le jeudi 28 septembre, devant le portail Roddick de l’Université McGill, a eu lieu une manifestation contre la Loi 96, portant sur la langue officielle et commune au Québec. La manifestation a été organisée par le comité spécial contre la Loi 96, une organisation ayant pour but d’informer le public québécois sur la Loi 96 et sa juridiction. Le comité est actuellement en pleine bataille juridique devant les tribunaux afin de renverser la Loi 96. La manifestation s’est déroulée de 11h à 13h et était constituée d’une trentaine de manifestants pourvus de pancartes ainsi que de bénévoles distribuant des pamphlets décrivant la Loi et ses obstacles pour les Québécois.

La Loi 96 en bref

La Loi 96, adoptée le premier juin 2022 à l’Assemblée nationale, est une loi modificatrice qui réforme la Loi 101, aussi connue sous le nom de la Charte de la langue française. Cette dernière, adoptée en 1977 par le gouvernement de René Lévesque, a fait du français l’unique langue officielle au Québec et a imposé l’enseignement en français à tous les immigrants, sauf aux enfants dont l’un des parents a étudié dans une école anglophone dans le système scolaire québécois. En 2022, le gouvernement du premier ministre François Legault a souhaité renforcer le statut du français au Québec et dans toutes les sphères de services publics, en adoptant la Loi 96 qui réforme la Charte de la langue française.

Grâce à la Loi 96, le français devient le dénominateur commun entre tous les habitants du Québec. L’État a maintenant l’obligation d’offrir tous ses services publics aux citoyens uniquement en français, sauf exception les laissant être servis en anglais. Le système scolaire est lui aussi assujetti à cette Loi, puisque les cégeps anglophones sont maintenant dans l’obligation d’offrir trois cours supplémentaires en français, et sont, depuis septembre, limités à 30 854 étudiants cumulés. Cette Loi est, selon le gouvernement Legault, une façon concrète de protéger la langue française et de permettre davantage de cohésion entre les habitants du Québec par l’usage d’une seule et même langue.

Le dilemme de la Loi 96 pour les Québécois

La Loi 96 renforce le statut du français au Québec en rendant obligatoire l’usage du français au sein des services offerts par le gouvernement à tous les citoyens à quelques exceptions près : les immigrants arrivés il y a moins de six mois, les communautés autochtones, les personnes éligibles à l’enseignement en anglais, et quelques autres. Il est donc ici question des interactions dans les hôpitaux, dans les centres de services automobiles, dans les boîtes vocales téléphoniques, et tant d’autres.

Thea Borck et Olivia Bernath, deux bénévoles du comité spécial contre la Loi 96 présentes à la manifestation du 28 septembre, ont partagé les motivations de leur implication dans le comité. Thea Borck explique que, selon elle, la problématique des services uniquement en français limitent certaines minorités linguistiques : « Ce projet de loi vise en réalité
à vous empêcher d’accéder aux services essentiels dont vous avez besoin
. (tdlr) » Elle donne pour exemple les étudiants étrangers à McGill et les personnes âgées qui ne maîtrisent pas tout à fait le français, qui sont contraints de recevoir des services de santé en français malgré les obstacles que cela leur apporte.

« Le problème avec le projet de Loi 96, c’est qu’il tente de passer outre la Charte fédérale. »

Thea Borck
Layla Lamrani | Le Délit

Le débat constitutionnel

Les moyens d’adoption de cette Loi ont aussi été source de polémique puisqu’elle a nécessité l’utilisation de l’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés par le gouvernement Legault lors de son adoption en 2022. Aussi connue sous le nom de la clause dérogatoire, elle permet aux institutions politiques fédérales, provinciales et municipales d’adopter des projets de lois contournant certains droits protégés par la Charte pour une durée de cinq ans, et de ce fait, d’éviter des recours judiciaires. La Loi 96 a ainsi été adoptée à l’aide de la clause dérogatoire par mesure préventive afin d’éviter des mesures judiciaires qui pourraient empêcher son adoption. Le ministre de la justice Simon Jolin-Barrette s’est exprimé sur l’usage de cette clause, la qualifiant de nécessaire lorsque le français est en danger, car selon lui « ce n’est pas aux tribunaux à définir le contrat moral, le contrat de vivre-ensemble, c’est aux élus de l’Assemblée nationale à le faire ».

« Cette Loi est, selon le gouvernement Legault, une façon concrète de protéger la langue française et de permettre davantage de cohésion entre les habitants du Québec par l’usage d’une seule et même langue »

Thea Borck explique que selon elle : « Le problème avec le projet de Loi 96, c’est qu’il tente de passer outre la Charte fédérale. » Les deux jeunes femmes ont donc entretenu que l’usage de la clause dérogatoire par le gouvernement Legault afin d’adopter cette Loi est pour eux considérée comme inconstitutionnelle, et consiste en une grande problématique, qui est une raison de plus pourquoi le Comité Special Task Force est actuellement devant les tribunaux afin de renverser cette Loi.

Où en sommes-nous maintenant?

Le gouvernement québécois est dans une situation difficile en tentant de protéger la langue française par l’ajout de mesures linguistiques contraignantes qui exercent une pression sur les Québécois. De la Loi 101 à la Loi 96, les exigences augmentent monumentalement envers les citoyens, les entreprises privées et les organismes gouvernementaux afin de permettre davantage de cohésion entre les citoyens par l’usage d’une seule et même langue.

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Montréal en marche pour le climat https://www.delitfrancais.com/2023/10/04/lmontreal-en-marche-pour-le-climat/ Wed, 04 Oct 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52680 La manifestation de la rage climatique à la croisée des combats.

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Le vendredi 29 septembre dernier, à 14h au parc Jeanne-Mance, plus d’un millier de personnes, en grande majorité des étudiants, ont entonné des chants aux thèmes désormais familiers : « Et 1, et 2, et 3 degrés, c’est un crime contre l’humanité! » La Semaine de la Rage Climatique, organisée par le collectif du même nom dans les villes de Québec, Sherbrooke et Montréal, s’est achevée avec succès avec la manifestation de la Rage Climatique, qui a su rassembler la jeunesse pendant plus de trois heures à travers les rues de Montréal. Le Délit s’est rendu sur place pour vous rendre compte du déroulé de la manifestation.

Un écologisme radical?

L’événement était marqué par des revendications écologiques radicales. Rage Climatique affirme, sur son site Internet, que la semaine avait pour but de « mettre en avant une écologie radicale, anti-oppressive, anticoloniale et anticapitaliste ». Fini l”« éco-anxiété », les organisateurs de la marche ont appelé à transformer la peur du bouleversement climatique en « écofureur ». Cette colère idéologique se retrouvait dans les cortèges, notamment par la présence de plusieurs groupes anarchistes et communistes, comme Fightback. Le Délit s’est entretenu avec plusieurs manifestants, dont Justin, jeune militant indépendant, qui nous a expliqué ses motivations : « Le système économique dans lequel on vit nous mène droit dans le mur. La logique d’accumulation continue est en train de détruire la planète et de tous nous tuer. C’est aux riches de payer pour la crise qu’ils ont créée. » Les sensibilités politiques variaient, mais elles étaient réunies vendredi autour du combat climatique. Pour Joanie, manifestante du Front commun pour la transition énergétique, il s’agit de la meilleure stratégie : « L’important, c’est de multiplier les tactiques et d’être ensemble, au-delà des idéologies de chacun. »

La jeunesse (mais pas que) au rendez-vous

Hormis les groupes activistes, beaucoup de petits groupes d’étudiants du secondaire ou d’université étaient présents, participant à l’atmosphère gaie et bon enfant du cortège. Avant 15h, la foule réunie autour de la statue George-Étienne Cartier s’adonnait à la danse, aux chants et à la discussion. Côté pancartes, les militants allaient du plus direct « Capitalisme = Cancer de la planète (tdlr) » au plus décalé « La Terre devient plus chaude que Timothée Chalamet ».

Les motivations étaient également variées, entre lutte idéologique et revendications locales. Ludovic, étudiant originaire de Rouyn- Noranda, l’une des villes les plus polluées dans l’air du Canada, nous a raconté son combat : « J’allais à l’école à côté de la fonderie Horne. Chaque mercredi, une alarme sonnait et on devait se confiner et fermer les fenêtres en prévention d’une fuite de produits toxiques. […] J’ai envie, un jour, de pouvoir revenir fonder ma propre famille sans avoir peur de mettre en danger la vie de mes enfants. » Rappelons que la fonderie Horne rejette des tonnes de contaminants chimiques, dont l’arsenic, sur Rouyn-Noranda, si bien que la population de la ville court un risque accru de cancer du poumon.

Il reste néanmoins à préciser que les étudiants n’étaient pas seuls. Nous avons pu échanger avec Catherine et Isabelle, du groupe Mères au front : « On marche, on travaille avec les jeunes pour l’environnement. Les jeunes sont possiblement plus intéressés par le combat ; c’est leur avenir, ils ont peur et je les comprends. Mais leurs parents sont là aussi! » Mères au front est un groupe activiste spécialement dédié aux adultes révoltés face à la crise climatique. Le combat rassemble, à travers les générations.

Que faire de la convergence des luttes anticapitalistes et écologistes? Est-elle inévitable, ou contingente à l’inaction des gouvernements? La question reste ouverte. Pour les manifestants que nous avons interrogés, l’insuffisance des politiques environnementales canadiennes était claire. L’urgence climatique inquiète, à mesure que ses effets se font ressentir par les Québecois : des records absolus de température ont encore été battus en ce mois de septembre ( jusqu’à 35,8 °C à Waskaganish, au Nord-du-Québec). Au-delà des considérations idéologiques, cette manifestation a ainsi permis aux Montréalais engagés d’exprimer leur désir de réaction politique ferme et imminente, à l’échelle de la province, et du Canada.

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Séisme au Maroc : La communauté marocaine de Montréal se mobilise https://www.delitfrancais.com/2023/09/20/seisme-au-maroc-la-communaute-marocaine-de-montreal-se-mobilise/ Wed, 20 Sep 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=52234 Une récolte de matériel a eu lieu au Collège Lasalle du 11 au 19 septembre

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Dans la soirée du vendredi 8 septembre dernier, vers 22h11, un séisme de magnitude 6,8 a frappé le Maroc. Selon l’Observatoire Européen Copernicus, le séisme a principalement frappé la région de Marrakech-Safi, l’épicentre se trouvant à approximativement 72 km au sud-ouest de Marrakech, une des principales villes marocaines, qui compte plus d’un million d’habitants. Les provinces les plus touchées sont des zones rurales du massif du Haut Atlas qui n’en restent pas moins peuplées : selon l’Observatoire, 172 000 personnes ont été exposées aux secousses, notamment à Talat-Nyaaqoub, Tamarirt, Amizmiz et Imzilene. Les habitants de Marrakech ont eux aussi ressenti les secousses, subi des dommages matériels et déclaré plusieurs pertes humaines. Le 14 septembre, le bilan humain s’élevait à 2 946 morts et 5 674 blessés. Le nombre de personnes dont le logement a été détruit n’est pas encore connu, mais le Maroc a compté environ 50 000 bâtiments endommagés.

L’action de la communauté marocaine de Montréal

À Montréal, une action de solidarité s’est mise en place dès le lendemain, le samedi 9 septembre. Adib Lahlou, actuellement directeur de l’expérience étudiante du Collège Lasalle de Montréal, et Nadia El Hamiri, directrice adjointe aux soutiens administratifs, ont coorganisé une récolte de dons financiers et de matériel en collaboration avec le Collège Lasalle. Dans une entrevue avec Le Délit, Adib Lahlou nous a expliqué le fonctionnement de la collecte : « Avec la direction du Collège Lasalle, nous étions initialement partis sur l’idée de faire une collecte de dons en argent via la Croix-Rouge [canadienne, ndlr], et par la suite on a pensé faire une collecte de vêtements et de matériel. »

Lors de notre entrevue, Adib, lui-même d’origine marocaine, nous a fait part de l’engouement collectif à aider existant au sein de la diaspora marocaine : « On a fait un fichier Excel dans lequel on a 260 bénévoles inscrits et 96 actifs qui participent au triage. » Adib nous a notamment expliqué qu’ils ont rapidement été débordés et ont même dû changer de local : «On a été victime de notre succès […], dès le premier jour, lorsqu’on était à l’intérieur du Collège, on a reçu beaucoup [de matériel] et on ne savait pas où le stocker. » L’administration du Collège a donc ouvert un espace bien plus grand à quelques pas du local initial, au 2110 rue Sainte Catherine. Adib nous a confié que : « Étant Marocain et ayant vécu là bas, je n’en attendais pas moins de la solidarité marocaine, mais là, ça dépasse mes attentes […] tu n’as qu’à voir derrière toi : wow! »

« Nous les marocains, que ce soit au Maroc, au Canada, en Europe ou ailleurs, on est unis »


Mohammed Essaïdi

Au cours de notre passage dans le local de la récolte, nous avons croisé Mohammed Essaïdi, un étudiant à l’Université de Montréal (UdeM) venu donner du matériel. Il nous a raconté vouloir faire ça « par cœur ». « Je suis d’origine marocaine et j’en suis fier, je veux aider les gens qui sont affectés ». En le questionnant s’il s’attendait à une telle entraide, il nous a répondu « oui bien sûr, nous les Marocains, que ce soit au Maroc, au Canada, en Europe ou ailleurs, on est unis. »

Des complications pour transporter le matériel accumulé

Une fois le matériel récupéré et organisé, il faut désormais trouver un moyen de transport rapide vers le Maroc. Néanmoins, plusieurs des organisateurs ont dû faire face à de nombreuses complications : ils n’ont toujours pas trouvé de compagnie aérienne pour transporter le matériel gratuitement vers le Maroc. « Envoyer du matériel par avion représente un coût en milliers de dollars. C’est bête de payer dans ce genre de situation où il y a déjà un sinistre. » Les organisateurs de l’action semblent donc se tourner vers l’option du cargo : « Cela prendrait entre 3 à 5 semaines, donc c’est long, mais c’est l’option la moins chère et ce n’est pas demain que les plus démunis seront relogés, il y aura encore besoin de ce matériel. » Si cette option est choisie, les organisateurs de l’action lanceront une récolte de fonds pour financer le transport.

Un autre facteur limitant pour le moment est la décision marocaine de restreindre temporairement l’aide internationale. En effet, le Maroc n’a, en date du 17 septembre, accepté l’aide que de quatre pays : le Royaume-Uni, l’Espagne, le Qatar et les Émirats arabes unis. Adib comprend ces mesures : « Pour le moment les routes ne sont pas praticables, il faut s’organiser et déblayer. […] On attend toujours les autorisations pour envoyer tout cela […] le Maroc est actuellement en train de s’organiser sur le terrain pour certainement ouvrir dans quelques jours les dons internationaux de matériel », explique-t-il.

Lorsque l’aide internationale sera possible, le Collège Lasalle compte utiliser son réseau d’établissements pour affréter le matériel accumulé vers le Maroc. En effet, l’institution d’enseignement supérieur est québécoise, mais comporte 23 campus présents sur cinq continents. Adib raconte que c’est aussi pour cela que le Collège s’est rapidement impliqué. « Comme on a des campus au Maroc, notamment à Casablanca, à Marrakech, Tanger et Rabat, on va tout affréter vers le Collège Lasalle de Marrakech, et de là bas il y a un relais qui va se faire vers les zones plus lointaines. »

Une « diplomatie des séismes »?

Un événement surprenant a eu lieu en marge de cette catastrophe naturelle : l’Algérie a annoncé rapidement son soutien et a même proposé son aide. Les deux voisins ont des relations crispées depuis l’indépendance de l’Algérie en 1962, qui avait notamment été suivie d’un conflit ouvert avec le Maroc : la guerre des Sables de 1963. Depuis, le sujet du Sahara occidental catalyse ces tensions. D’un côté, le Maroc revendique sa souveraineté sur le territoire, et de l’autre, le groupe séparatiste du Front Polisario, appuyé et hébergé par l’Algérie, prône l’autodétermination des populations sur ce territoire. En raison de ces divergences, les relations entre le Maroc et l’Algérie ont récemment été au point mort. En 2021 par exemple, l’Algérie avait notamment fermé son espace aérien au Maroc et rompu les liens diplomatiques avec ce dernier.

La catastrophe du vendredi 8 septembre a donc laissé penser à un retour de la diplomatie des séismes : un réchauffement des relations diplomatiques entre deux pays à la suite d’une catastrophe sismique. Précédemment, le Maroc avait déjà marqué sa sensibilité envers son voisin lors de catastrophes naturelles.

Le royaume avait par exemple proposé une aide à l’Algérie lorsque le pays faisait face à des feux de forêts en août 2021. Cette fois-ci, c’est l’Algérie qui a fait un pas de solidarité envers le Maroc : le pays a rouvert son espace aérien – fermé depuis 2 ans – et a proposé d’envoyer des équipes de secouristes et du matériel destiné au sinistrés. Néanmoins, comme le pays l’a fait pour les États-Unis ou la France, le Maroc a refusé cette aide. Pour Adib Lahlou, cette proposition est « ridicule ». Il souligne le contraste entre cette proposition et les tensions existantes au Sahara occidental. Il mentionne notamment que peu après le séisme, « les milices du Polisario, basées en Algérie, ont commencé à frapper le sud du Maroc [territoire reconnu par l’ONU comme Sahara occidental, ndlr] en plein séisme et catastrophe naturelle […] alors que les Forces armées royales [marocaines, ndlr] sont mobilisées pour porter aide aux victimes ». Adib termine son propos en ajoutant : « Tendez-nous la main, mais une bonne main. »

« On se prépare déjà, on commence déjà à trier »


Adib Lahlou

Alors que la récolte devait initialement durer jusqu’au vendredi 22 septembre, celle-ci s’arrêtera prématurément le mardi 19 septembre. Adib explique cette décision : « On a récolté le double de ce que nous avions prévu. Il nous faut maintenant du temps pour s’organiser en interne pour trier et proposer une aide la plus efficace possible. » Par exemple, certains éléments récupérés ne sont pas adaptés au besoin des victimes du séisme (des vestes « trop » chaudes par exemple). Néanmoins ce matériel « inadapté » va garder son utilité : les organisateurs cherchent actuellement une action similaire à la leur, récoltant du matériel pour la Libye, qui fait actuellement face à des inondations dévastatrices. « Entre un séisme et des inondations, ce n’est pas le même besoin. Nous pouvons leur donner du matériel inadapté à nos besoins, mais adapté aux leurs : il est question de solidarité marocaine, mais aussi de solidarité arabe et musulmane. »

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Pornographie : différentes positions https://www.delitfrancais.com/2023/04/05/porno-derriere-la-camera/ Wed, 05 Apr 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=51505 Entrevue avec Charly Willinsky, un réalisateur et producteur de cinéma pour adulte montréalais, et Sofia, une intervenante sexuelle.

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La plupart d’entre nous regardons du contenu pour adulte, mais peu ont connaissance de ce qui se passe dans les coulisses du cinéma pornographique. Cette semaine, Le Délit s’est entretenu avec deux spécialistes de la pornographie. Dans un premier temps, nous avons rencontré le producteur de contenu gai et acteur montréalais Charly Wilinsky pour en savoir davantage sur ces vidéos créées pour des hommes attirés par des hommes. Le Délit a ensuite discuté des limites de la pornographie avec Sofia Ferguene, une ancienne étudiante de McGill en science politique, qui travaille aujourd’hui comme intervenante et animatrice en vie relationnelle et affective auprès de la jeunesse parisienne.

Le Délit (LD) : Je sais que tu es acteur et producteur, et j’imagine que tu endosses beaucoup de rôles. Que sont-ils?

Charly ( C ) : C’est ce qui est amusant, comparé aux industries plus grand public : l’industrie du porno nous permet de toucher à plein de choses. Mais mon quotidien ressemble beaucoup plus à un développeur web qu’à un acteur porno. Je vois continuellement du contenu X, mais il y a des journées où on filme du contenu, et d’autres, pas du tout. Ensuite, j’ai souvent la casquette de recruteur d’acteurs, avec des castings qui prennent énormément de temps étant donné que c’est une industrie qui consomme beaucoup de nouveaux visages. On voit justement une ouverture, il y a de plus en plus de gens qui viennent vers nous parce que « la société change » ou « fuck ça, j’ai envie de le faire, go ». Ça devient plus facile. Dernièrement, quasiment tous les jours, je reçois des candidatures, et ça prend 40 % de mon temps. Après ça, je réalise, mais vraiment peu. Je produis, je vois plus comment mettre tous les éléments ensemble pour qu’on ait un bon résultat, et pour rassembler les gens, les contacts et les ressources. Il faut mettre la casquette de réalisateur de temps en temps, mais c’est pour ça que je travaille avec des gars qui sont réalisateurs exclusivement.

LD : Montréal était la capitale du porno pendant assez longtemps.Je pense qu’elle l’est encore avec l’entreprise Pornhub, qui est établie à Montréal. Dans quelle mesure le scandale Pornhub (accusé d’avoir laissé du contenu illégal sur son site) a‑t-il impacté ce que vous faisiez?

C : Il y a un documentaire qui est sorti il y a peu de temps sur Netflix qui parle justement de ça, il s’appelle: Money Shot: The Pornhub Story. C’était quand même des choses qui étaient sues à l’intérieur de l’industrie, on connaît bien MindGeek et leurs pratiques, mais en même temps, c’est un collaborateur, c’est une compagnie qui est quand même pas mal au devant de la scène. Finalement, ce qui est intéressant dans ce documentaire, c’est que les gens qui paient pour les frasques des multinationales comme ça, c’est souvent les gens les plus vulnérables, les travailleurs du sexe. En fait, c’est nous aussi qui avons du mal à trouver des façons de se faire payer. On se fait fermer nos comptes en banque dès qu’ils comprennent que la rémunération est en lien avec l’industrie du sexe. Donc, on finit par ne rien dire. À l’ouverture de mon compte, j’ai clairement insisté auprès de la banquière que mes revenus viendraient de l’industrie X, mais heureusement, elle ne l’a même pas écrit. Donc, pour ma banque, je suis « producteur de contenu original » et « opérateur de plateforme de divertissement sur demande ».

« Finalement, ce qui est intéressant dans ce documentaire, c’est que les gens qui paient pour les frasques des multinationales comme ça, c’est souvent les gens les plus vulnérables, les travailleurs du sexe »


Charly Wilinsky

LD : Que penses-tu du porno de demain dans l’émergence de la technologie et du digital?

C : La technologie avance vite, la qualité s’améliore beaucoup. Mais en même temps, l’adoption des utilisateurs n’est pas non plus au rendez-vous. C’est comme il y a 20 ans, avec les téléphones portables, on ne pensait pas qu’on l’aurait tout le temps dans les mains, et qu’ Internet serait comme il est aujourd’hui. Donc avoir des rapports sexuels virtuels permettrait d’éviter ces inconvénients. Peut-être qu’on va arriver à un point où il serait plus simple et moins risqué d’avoir seulement des relations virtuelles.

LD : Est-ce que ton site internet proposerait des relations sexuelles avec un avatar à l’aide d’un casque de réalité virtuelle?

C : Ce qui est fait jusqu’à présent, c’est principalement dû au « POV » (point de vue),où le spectateur est incarné dans la scène. Je crois que ça nous limite quand même beaucoup dans le mouvement. Premièrement, les acteurs n’aiment pas filmer du contenu pour réalité virtuelle, parce que souvent, ils sont restreints dans leur mouvements avec une caméra qui est au niveau du front. Essaie de rester en érection si tu n’es pas vraiment capable de bouger, ce n’est pas évident. En revanche, moi, je crois fermement que tu n’es pas obligé d’être dans la scène. Tu peux être voyeur. La magie du cinéma, c’est d’amener les gens dans des situations qui ne seraient pas communes, pas courantes. On peut simuler n’importe quoi et faire ressentir au spectateur qu’il est présent, sans nécessairement être activement impliqué. Maintenant, le tabou qui persiste, c’est la demande de contenu trash, violent et extrême qui grandit.

« Peut-être qu’on va arriver à un point où il serait plus simple et moins risqué d’avoir seulement des relations virtuelles »

Charly Wilinsky

LD : Est-ce que selon toi l’industrie du porno est un monde d’opportunités, avec peu de concurrence et où il est facile de se faire connaître?

C : En fait, il y a énormément de concurrence, mais en même temps, c’est ça. C’est un monde qui a un esprit de famille, qui est tout de même très chaleureux. On a besoin des uns et des autres, on ne peut pas faire du contenu tout seul, sinon il n’y aurait pas de variété. Pour te permettre de rester populaire, il faut que tu réussisses à avoir des gens avec qui tu peux collaborer. Je te dirais que ce qui est difficile, c’est d’aller trouver ce premier contact qui va t’ouvrir la porte de ce monde-là, mais après ça, si tu es quelqu’un qui est facile d’approche, ça roule tout seul.

LD : Sinon, as-tu un compte OnlyFans? Quels sont les avantages d’OnlyFans à ton avis? Pourquoi cette plateforme est aussi populaire et glamorisée?

C : C’est pertinent. En fait, je te dirais, OnlyFans est bien particulier. Le gars qui a lancé OnlyFans, c’est un gars qui avait un site de webcam avant et qui était dans l’industrie pour adultes, mais sa plateforme était censée être pour les influenceurs. C’est-à-dire qu’il s’agit d’une plateforme où tu peux vendre des cours de fitness, des cours de yoga, à peu près n’importe quel contenu, et le contenu pour adultes est toléré. Donc, ils ont réussi à faire exécuter leurs paiements par des fournisseurs de services qui d’habitude ne travaillent pas pour des sites pour adultes.

LD : Quels sont les salaires de ceux qui travaillent dans l’industrie?

C : J’ai des amis qui font 55 000 $ US par mois. Ensuite, si on va dans les extrêmes, j’en connais un qui, en un an, a fait 1 200 000 $ US sur OnlyFans. Celui-là, par exemple, c’est une des plus belles histoires d’OnlyFans. C’était un influenceur qui avait des millions d’abonnés sur YouTube, qui s’est ensuite lancé dans le contenu pour adultes et a fait le saut vers OnlyFans par curiosité. C’est sûr que quand tu as déjà des millions de fans, s’il y en a juste 10% qui te suivent sur OnlyFans, ça va vite. Toutefois, ce n’est pas la norme. Ce qui est intéressant avec ces plateformes, c’est que ça met le pouvoir dans les mains des acteurs, comparé à l’industrie du porno habituelle, où ils étaient à la merci des studios, et où ils pouvaient se faire engager deux ou trois fois par an, ce qui est peu. Ils avaient des gros contrats, mais à l’époque, les studios – qui pour la plupart n’étaient pas indépendants – payaient bien. Ce qui est beau, c’est que n’importe qui, tant que c’est quelqu’un qui est dédié, qui aime ce qu’il fait, qui est régulier et assidu, il va se faire de l’argent. Il faut trouver son truc, mais après ça va.

« Moi [Isabelle Hamon, ndlr], dans une journée, je suis toute seule avec un assistant, je fais de l’éclairage, je filme, je fais un peu de montage »

Charly Wilinsky

LD : J’ai entendu dire que certains profitent d’une gaffe ou d’une connerie pour se lancer dans l’industrie X plutôt que de se faire cancel, qu’en dis-tu?

C : Tu te souviens de la fille à l’UQAM qui avait montré sa poitrine pour sa photo de graduation? C’est une vedette maintenant et elle fait beaucoup d’argent sur OnlyFans. Il y a aussi le cas de la fille de Sunwing, l’avion avec des influenceurs qui ne respectaient pas les restrictions sanitaires. Elle s’est lancée sur OnlyFans et dès le premier mois, elle a dévoilé s’être fait 19 000 dollars. Donc Vanessa Cosi, après avoir vapoté dans le vol des influenceurs, s’est dit : « OK, qu’est ce que je fais? » Et la réponse a été de créer un compte OnlyFans pour publier du contenu pour adultes et bénéficier de sa notoriété.

LD : Est-ce qu’on voit souvent des gens qui étudient le cinéma et qui, finalement, choisissent le cinéma pour adulte?

C : Alors, c’est plus fréquent qu’on le pense. Par exemple, Isabelle Hamon est la réalisatrice qui fait le plus de tournages de porno gai à Montréal. Elle est lesbienne et elle a étudié en cinéma. Au début, un de ses amis l’a recrutée pour un projet et elle voyait ces tournages comme un travail étudiant. Finalement, elle a fait ça pendant toutes ses études. Puis à la fin, elle s’est dit : « J’aime ce que je fais, je vais arrêter de me mentir, je fais du gros cash, et surtout je touche à tout. » Elle dit : « Moi, dans une journée, je suis toute seule avec un assistant, je fais de l’éclairage, je filme, je fais un peu de montage. » Donc, elle est restée dans ce domaine, et elle excelle. Quand elle a commencé à travailler pour les plus grands studios de porno gai, l’obstacle principal pour elle c’était la misogynie, mais elle a ouvert bien des portes. La preuve? On en parle aujourd’hui.

« Je te dirais que le domaine est assez inclusif. On essaye quand même de l’être de plus en plus, parce qu’on voit que ça marche sur les plateformes indépendantes. Il y en a pour tous les goûts et pour tout le monde, sachant que les standards de beauté, communs pour un, ne sont pas nécessairement ceux d’un autre »

Charly Wilinsky

LD : Est ce que tu peux me dire un mot sur l’inclusivité dans le milieu du porno?

C : Je te dirais que le domaine est assez inclusif. On essaye quand même de l’être de plus en plus, parce qu’on voit que ça marche sur les plateformes indépendantes. Il y en a pour tous les goûts et pour tout le monde, sachant que les standards de beauté, communs pour un, ne sont pas nécessairement ceux d’un autre. Mais effectivement, c’est quand même une industrie de l’image. En revanche, pour l’âge, je dirais qu’il n’y a pas vraiment de limites, surtout que chez les gais, la figure du « daddy » fonctionne super bien. Je pense que ce qu’il faut retenir, c’est simplement qu’il s’agit d’être le meilleur dans ce que tu fais.

Rose Chedid | Le Délit

Le Délit a aussi rencontré une intervenante travaillant dans le milieu de l’éducation sexuelle à Paris pour offrir une autre perspective sur le domaine de la pornographie. Le milieu de la pornographie est réputé pour les multiples abus subis par les travailleurs et travailleuses du sexe. En tant qu’intervenante en vie relationnelle et affective, Sofia Ferguene nous son opinion sur l’industrie pornographique.

Le Délit (LD) : D’après tes interventions dans des établissements scolaires, quel est le rapport des jeunes avec la pornographie?

Sofia (S) : C’est indéniable que le porno a une place centrale dans l’éducation et la sexualité des jeunes, puisqu’il représente encore aujourd’hui un tabou. Aborder le thème de la sexualité avec sa famille et ses amis pendant la préadolescence et l’adolescence reste un sujet sensible. Dans les associations féministes ou de santé sexuelle, l’éducation relationnelle et affective passe par la déconstruction des idées reçues qui sont véhiculées par le porno « populaire » (dit mainstream en anglais, ndlr) qui met en scène des rapports stéréotypés.

LD : Peux-tu m’en dire davantage sur les stéréotypes qu’on retrouve dans le porno?

S : Même si on trouve dans le porno « populaire » des représentations de personnes issues des minorités, handicapées, racisées, grosses ou minces, c’est sous la forme de fétiches et dans des catégories particulières que ces minorités sont représentées. C’est intéressant de voir comment le porno illustre profondément les tensions politiques qu’on a en France, notamment sur les questions de race, parce qu’il y a encore beaucoup d’islamophobie. Ironiquement, la catégorie pornographique la plus visitée en France, c’est « beurette » (verlan pour une femme arabe, c’est un mot péjoratif associé à la vulgarité, (ndlr)). La liste des catégories les plus populaires est souvent le reflet du spectre des désirs des hommes blancs hétéros et de ce qu’ils érotisent. C’est rarement représentatif de ce qui excite vraiment les personnes en général, dans leur diversité. Toutefois, c’est un discours que j’ai et qui est propre au porno dit « populaire ».

LD : Peux-tu m’en dire davantage sur les femmes dans le milieu du X « populaire »?

S : Oui. Il y a de tout. J’ai l’impression qu’en ce moment, on donne de plus en plus la parole à des femmes qui ont le pouvoir sur leur carrière dans le X. On leur donne un petit peu plus de place pour parler de leur expérience dans les médias, sur les réseaux sociaux. Je regarde des entrevues, je vois des femmes qui s’expriment sur leur carrière et ce qu’elles disent souvent, c’est que la profession a changé avec le capitalisme. Je pense qu’il y a cette compétition entre les actrices qui revient souvent, qui va plus loin qu’au début, quand c’était une plus petite industrie. Au début, elles avaient des contrats clairs, avec des pratiques définies, et maintenant, elles se retrouvent sur un tournage où au dernier moment on leur dit quoi faire. En tout cas, c’est vrai pour le porno « populaire ».

« La pornographie féministe se démarque de la pornographie traditionnelle et agit pour une pluralité normalisée et non plus fétichisée »

LD : Enfin, y a‑t-il des avenues pour produire un contenu hétérosexuel ou lesbien plus éthique?

S : Oui, l’une des solutions est la production de porno féministe. C’est donc dans la diversité de
ses acteurs, de ses actrices, de ses réalisateurs et de ses réalisatrices que la pornographie féministe se démarque de la pornographie traditionnelle et agit pour une pluralité normalisée et non plus fétichisée. La pornographie féministe jouit d’une diversité nécessaire à l’illustration réaliste de l’éventail des pratiques sexuelles. Pour cela, elle met en scène différentes orientations, morphologies, identités, communautés et scénarios. Mais si elle est difficile à définir par la multiplicité de ses formats, on peut préciser la définition de la pornographie éthique par ce qu’elle n’est pas. Contrairement à ce que l’industrie pornographique et les stéréotypes assignés à la féminité nous laissent parfois penser, la pornographie féministe ou éthique ne capture pas le sexe sous l’angle exclusif des sentiments, de l’affection, de la douceur ou encore du sexe dit « vanille ». Elle aborde la diversité non seulement des portraits qu’elle met en scène, mais aussi des désirs et des orientations sexuelles. Ce qui différencie la violence que l’on peut retrouver dans l’industrie traditionnelle de celle que l’on retrouve dans la pornographie éthique et féministe, c’est le consentement, la sécurité et le désir qui encadrent et motivent les acteurs et actrices dans la réalisation de ce type de scène.

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EndoCARES: l’endométriose est enfin prise en main https://www.delitfrancais.com/2023/04/05/endocares-lendometriose-est-enfin-prise-en-main/ Wed, 05 Apr 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=51593 Ouverture du premier centre pour l’endométriose à McGill.

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Le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) a lancé, le 28 mars dernier, l’ouverture d’un centre pour l’endométriose, le premier de ce genre dans la province. Il est aussi affilié à la Faculté de médecine des sciences de l’Université McGill et continue de modeler, entre autres, le cours de la médecine pédiatrique en attirant des «sommités » cliniques et scientifiques du monde entier. Le centre EndoCARES comprend une équipe de recherche et un service de soins chirurgicaux, dont le but est d’offrir aux patient·e·s atteint·e·s de douleurs et d’infertilité causées par l’endométriose un « accès accéléré à des services d’imagerie diagnostique opportuns et spécialisés ». À cela s’ajoutent aussi des soins multidisciplinaires « fondés sur les besoins individuels ».

Parlons de l’endométriose

D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il s’agit d’une « maladie qui se caractérise par le développement de tissu semblable à la muqueuse utérine en dehors de l’utérus, provoquant ainsi des douleurs et/ou une infertilité ». Elle touche les femmes en âge de procréer, provoquant souvent la stérilité. Dr Togas Tulandi, professeur titulaire et directeur du Département d’obstétrique et de gynécologie de McGill, spécialiste de l’endométriose, a affirmé l’an dernier que la maladie est courante, et que beaucoup de femmes en souffrent à travers le monde. En effet, l’OMS affirme aussi que près de 10% des femmes en âge d’enfanter sont touchées par cette maladie, soit 190 millions de personnes à travers le monde. D’autres statistiques montrent que jusqu’à 50 % des femmes souffrant d’infertilité et 70 % de celles souffrant de douleurs pelviennes chroniques sont atteintes d’endométriose, selon le Dr Togas Tulandi.

« À ce jour, il n’y a toujours pas de traitement contre l’endométriose »

La création du centre EndoCARES répond aussi à un manque de recherches sur le sujet. À cet égard, EndoCARES vise à optimiser la recherche « fondamentale, épidémiologique et clinique » sur la maladie en établissant une base de données à partir de patients, pouvant servir pour les prochains projets de recherche. En même temps, l’objectif du centre est également de créer un réseau international où des recherches peuvent être menées en collaboration avec d’autres centres grâce à « l’échange d’idées et d’expériences ».

« Jusqu’à 50 % des femmes souffrant d’infertilité et 70 % de celles souffrant de douleurs pelviennes chroniques sont atteintes d’endométriose »


Dr Togas Tulandi

À ce jour, il n’y a toujours pas de traitement contre l’endométriose. Toutefois, les patientes soignées chez EndoCARES bénéficient de « pratiques chirurgicales novatrices et spécifiques à l’endométriose » qui n’ont jamais été offertes auparavant au Québec. Les efforts du CUSM vont en ce sens : comme il est indiqué sur son site, les soins cliniques et les futures recherches d’EndoCARES sont financés en partie grâce aux donations généreuses faites à la fondation du CUSM, qui a reçu jusqu’à 700 000 dollars en soutien au personnel hospitalier afin d’acquérir le matériel nécessaire pour le programme EndoCARES.

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La Nuit des sans-papiers https://www.delitfrancais.com/2023/03/22/la-nuit-des-sans-papiers/ Wed, 22 Mar 2023 11:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=51354 Solidarité sans frontières réclame un statut pour tous.

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Du samedi 19 mars au dimanche 20 mars dernier, l’association Solidarité sans frontières a organisé un campement devant les bureaux d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) pour dénoncer la lenteur du processus de régularisation promis par le premier ministre Justin Trudeau en décembre 2021. De nombreuses personnes sans-papiers ont témoigné de leur situation, et ont réclamé la fin de l’attente pour enfin vivre librement et dignement. Les participants se sont réunis derrière le slogan scandé tout au long de l’évènement : « Un statut pour tous et toutes ! »

La nuit des sans-papiers

La Nuit des sans-papiers organisée par Solidarité sans frontières a été menée en parallèle de l’appel pan-canadien à la mobilisation lancé par le Réseau pour les droits des migrants (Migrants Right Network). De nombreuses autres actions ont aussi eu lieu ailleurs au Canada, notamment à Vancouver, Toronto, Victoria…

L’événement organisé devant le complexe Guy Favreau, abritant les bureaux Québécois de l’IRCC, a commencé le samedi à 20h, et s’est terminé le lendemain matin à 9h. À l’occasion de cette action de solidarité, plusieurs intervenants se sont succédés au micro, et Solidarité sans frontière a organisé des projections de films, un concert et une distribution gratuite de repas pour les participants et les sans-abris.

Une première intervenante a commencé son discours par un appel : « Nous [les sans-papiers, ndlr] sommes des citoyens à part entière! Nous demandons de pouvoir vivre librement, sans peur d’être arrêté ou déporté. » L’intervenante a souligné le flou de la condition des sans-papiers, où tout au long de l’attente de leur régularisation, ils voient leur droits d’accès au système de santé, à la réunion familiale, à la protection légale face aux employeurs et aux logeurs bafoués. Elle a ensuite interpellé le premier ministre Justin Trudeau : « Qu’est-ce que vous attendez pour nous mettre dans la case de vos humains? »

« Nous [les sans-papiers, ndlr] sommes des citoyens à part entière ! Nous demandons de pouvoir vivre librement, sans peur d’être arrêté ou déporté »

Plusieurs personnes se sont ensuite succédées pour témoigner de leur situation de sans-papiers. Mamadou, arrivé au Canada en 2001, a perdu son statut de résident temporaire en 2003, et vit depuis dans des conditions qu’il qualifie de « précaires ». Victime d’un accident de travail il y a quelques années où il s’est cassé les deux bras, il a dû attendre 18 jours avant de pouvoir être hospitalisé. La Nuit des sans-papiers a montré que cette situation est loin d’être une exception. Maria, ayant fui le Mexique il y a 14 ans avec son mari, travaille dans une clinique médicale à Montréal. Malgré sa proximité quotidienne avec le système de santé, elle ne peut pas accéder aux soins. Elle nous a résumé sa situation : « L’ironie de la vie : faire le ménage dans une clinique de santé et ne pas pouvoir être soignée. » Maria a aussi dénoncé la vulnérabilité des personnes sans-papiers face aux abus des employeurs et des logeurs : « On ne peut même pas se défendre en dénonçant l’employeur à cause du besoin de survivre et d’aller de l’avant. » Yasser, citoyen marocain arrivé au Canada en 2020 lors de la Covid-19 a vu son permis de travail refusé au poste frontière à cause de l’entreprise d’accueil qui avait annulé son contrat sans le prévenir. Il raconte : « J’avais un rêve qui s’est transformé en cauchemar. »

Lucy Tymezuk

Malgré la précarité de leur situation au Canada, le retour n’est pas une option pour ces intervenants. La plupart ont laissé une famille sur place, dépendante de leurs transferts d’argent et dans l’attente de pouvoir être réunis. Aussi, l’insécurité et le manque d’opportunités de travail dans leur pays d’origine rendent le retour impossible.

Selon IRCC, les estimations de la population de personnes sans-papiers au Canada varient entre 20,000 et 500,000. Ces derniers, contrairement à l’image véhiculée par de nombreux médias et politiciens, qui décrivent une personne sans-papiers comme un individu entré illégalement sur le territoire – image renforcée récemment avec la polémique du chemin Roxham – sont majoritairement des personnes qui ont perdu leur statut après être entré légalement sur le sol canadien. Selon un rapport de Solidarité sans frontières publié en octobre dernier, le nombre de personnes sans-papiers serait bien supérieur à 500,000 – des chiffres qui diffèrent des rapports officiels.

L’action du gouvernement

La première intervenante a souligné dans son discours que cela fait bientôt un an et demi que Trudeau a mandaté Sean Fraser, ministre de l’Immigration, de se pencher sur un programme de régularisation des travailleurs sans-papiers. Le gouvernement Trudeau a aussi annoncé vouloir régulariser plusieurs centaines de milliers de travailleurs sans-papiers en octobre dernier, mais l’absence d’échéances et de détails de ce programme ont été critiqués par l’intervenante. Alors que le Parlement fermera pour l’été dans 10 semaines, et ne reprendra ses travaux qu’à la mi-septembre, l’intervenante souligne que « l’attente est longue, et en attendant nos droits sont confisqués ».

Lucy Tymezuk

L’intervenante a alors directement interpellé le premier ministre : « C’est l’occasion M. Trudeau, de faire ce que votre père avait fait, en réalisant le vœu de milliers de sans-papiers. » En effet, Pierre Eliott Trudeau avait lancé en 1973 l’un des plus important programme de régularisation canadien des sans-papiers. L’association Solidarité sans frontières a appelé lors de l’événement à la mise en place d’un programme similaire, sans restriction ni exclusion, pour offrir la résidence permanente à toute personne migrante.

« Le gouvernement Trudeau a aussi annoncé vouloir régulariser plusieurs centaines de milliers de travailleurs sans-papiers en octobre dernier »

Malgré l’attente d’un tel programme, qui continue depuis près d’un an et demi, une femme sans-papier a demandé le micro pour affirmer son optimisme :« Nous sommes déjà tous des citoyens, n’est-ce pas ? Les papiers, on les aura! »

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Crise du logement à Montréal https://www.delitfrancais.com/2023/02/22/crise-du-logement-a-montreal/ Wed, 22 Feb 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=51012 Des problèmes structurels qui n’épargnent pas les étudiants.

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Depuis maintenant plusieurs années, le Québec est victime d’une importante crise du logement et de nombreux ménages font face à des difficultés pour se trouver un toit. Selon une étude de Radio Canada, ce problème ne fait que s’aggraver, alors que le nombre de ménages locataires qui ne trouvent pas de logement s’élevait à 420 au 1er juillet 2021, et atteignait 750 un an plus tard.

Des problèmes structurels

L’inflation n’a pas seulement des répercussions sur le coût de la vie, mais également sur le marché de l’immobilier. D’après Radio Canada, l’augmentation drastique de 4,3% entre 2022 et 2023 de la taxe foncière imposée aux propriétaires se répercute aussi sur les locataires. L’ensemble des prix du loyer à Montréal ont donc poursuivi leur ascension cette année. Le journal Le Devoir décrit même la situation comme « la plus forte hausse des loyers en 20 ans dans la région ». En parallèle à ce phénomène général de hausse des prix de l’immobilier, on note de nombreuses critiques dénonçant des hausses abusives des loyers de la part des propriétaires. La clause F, permettant aux propriétaires de modifier le montant des loyers qu’ils imposent à leurs locataires jusqu’à cinq ans après la construction de leur immeuble, est notamment fortement contestée. Déjà en 2022, le journal 24 heures avait mis en avant les effets négatifs de cette clause, forçant parfois des locataires à quitter leur logement. Récemment, le 16 février 2023, Québec Solidaire a déposé une motion afin de demander une nouvelle fois la mise en place d’un mécanisme de contrôle des loyers ainsi que l’élimination totale de la clause F des baux, qui est selon eux « responsable de nombreuses hausses abusives ». Le parti Québec Solidaire avait déjà tenté de réviser cette clause début 2022, mais sans succès.

L’accroissement des taux de location à court terme constitue aussi un problème qui suscite de fortes tensions. Ces locations à court terme – mises en place notamment via des plateformes comme AirBnB – sont appréciées par les propriétaires en raison de leur aspect lucratif. D’après le journal La Presse, le changement d’usage d’un logement « est un motif d’éviction permis par la loi », poussant de nombreuses personnes à trouver un autre logement.

Cette problématique inquiète, puisque le logement touristique de court terme limite l’offre conventionnelle de logement, s’étendant sur une plus longue période. Cela contribue par conséquent à l’augmentation générale des montants des loyers. Les conséquences de cette crise du logement touchent particulièrement les personnes financièrement vulnérables, comme celles occupant des emplois précaires, ou encore les familles monoparentales. Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer l’impact de cette crise sur les étudiants.

« 60% des étudiants locataires allouent plus de 30% de leur budget annuel au loyer »

Quelles conséquences sur les étudiants?

L’Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant (UTILE) est une organisation spécialisée dans la question du logement étudiant au Québec. Plusieurs fois au cours des dernières années, cette organisation a mis en place des campagnes de sondages pour comprendre quels étaient les problèmes de logement des étudiants.

Dans un rapport de recherche publié en janvier 2022, l’UTILE met en avant le fait que les étudiants ne sont pas épargnés par cette crise. 77 % des étudiants universitaires sont locataires au Québec, soit environ 245 000 personnes, et font face aux mêmes problèmes que le reste de la société. Selon l’enquête menée par UTILE, 60% des étudiants locataires allouent plus de 30% de leur budget annuel au loyer, ce qui implique donc que le moindre changement des coûts du loyer modifie totalement leur plan de dépenses et peut chambouler leur quotidien. La crise du logement s’exprime aussi à travers l’insalubrité et l’état dégradé des logements à Montréal. D’après le rapport d’UTILE, 44% des étudiants répondant au sondage ont considéré que leur logement avait besoin de réparations majeures ou mineures.

La crise du logement est particulièrement présente à Montréal depuis de nombreuses années, forçant
la population à s’adapter au fil du temps. Au cours de la semaine dernière (13 février 2023), UTILE a lancé une nouvelle campagne de sondage en collaboration avec l’AÉUM, afin de suivre l‘évolution de la situation étudiante et leur ressenti face à cette crise qui perdure. 

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COP15 : une avancée «historique» critiquée https://www.delitfrancais.com/2023/01/11/cop15-une-avancee-historique-critiquee/ Wed, 11 Jan 2023 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=50334 La COP15 pour la biodiversité s’est tenue du 7 au 19 décembre à Montréal.

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Du 7 au 19 décembre dernier a eu lieu à Montréal la Conférence internationale sur la biodiversité (COP15), organisée par la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique. L’événement réunissait les délégations de 196 pays sur la question de la protection de la biodiversité. Un accord qualifié d’«historique» par Steven Guilbeault, ministre canadien de l’Environnement et du Changement climatique, a été conclu le 19 décembre, mais a été largement critiqué pour son manque de vision et d’ambition par certaines délégations et groupes de la société civile. En parallèle de la COP15, l’Université McGill s’est engagée pour la protection de la biodiversité en signant l’engagement Nature Positive.

L’accord Kunming-Montréal

Au terme de 12 jours de négociations, les délégations mondiales se sont arrêtées sur 23 cibles pour endiguer la perte de biodiversité. Le «30 pour 30» a été l’une des mesures phares de cet accord, appelé Kunming-Montréal. Les 188 pays signataires se sont engagés à protéger 30% des terres, eaux intérieures et océans d’ici 2030. À l’heure actuelle, cette protection ne concerne que 17% des aires terrestres et 10% des aires marines. Les pays signataires ont également établi comme objectif la réduction des subventions gouvernementales néfastes à la biodiversité de 500 milliards US$ par an, et la diminution du gaspillage alimentaire de moitié pour 2030.

De plus, avec les cibles cinq et neuf, les pays signataires s’engagent à «respecter et protéger l’usage traditionnel et durable [de la biodiversité, ndlr] par les populations autochtones (tdlr)». En effet, les populations autochtones, représentant 5% de la population mondiale, assurent la gestion de territoires où l’on trouve 80% de la biodiversité mondiale.

La dernière COP pour la biodiversité, qui avait eu lieu au Japon en 2010, s’était soldée par un échec, aucun des objectifs annoncés n’ayant été mené à terme. L’arrivée à un accord lors de la COP15 répondait à des alertes urgentes de la communauté scientifique prévenant que nous serions en train de vivre la sixième extinction de masse. En effet, entre 1970 et 2018, la faune sauvage a chuté de 69% en moyenne, et plus d’un million d’espèces sont aujourd’hui menacées d’extinction.

La question du financement de l’accord a été source de conflits. Les délégations ont convenu d’une contribution des pays développés de 20 milliards US$ par an d’ici 2025 et de 30 milliards US$ par an d’ici 2030 au fond pour l’environnement mondial (FEM) des Nations Unies. La délégation camerounaise a qualifié cet accord de «fraude», tandis que celle de l’Ouganda a dénoncé un «coup d’État». Ces pays demandaient un financement plus important, et à l’instar de la République Démocratique du Congo, la création d’un fond indépendant du FME, dont les principaux dépositaires sont la Chine, l’Inde, l’Indonésie et le Brésil.

«Les 188 pays signataires se sont engagés à protéger 30% des terres, eaux intérieures et océans d’ici 2030. À l’heure actuelle, cette protection ne concerne que 17% des aires terrestres et 10% des aires marines»

Les étudiants à la COP15

La COP15 a aussi été l’occasion de faire entendre la voix des jeunes sur la question de la préservation de la biodiversité lors d’événements annexes. Le Délit s’est entretenu avec Ambrine Lambert, une étudiante mcgilloise en sciences politiques et développement international qui s’est rendue à l’un de ces événements parallèles organisé par Youth Climate Lab. Les étudiants réunis en groupes ont discuté sur la question de l’éducation climatique, thématique présente dans les cibles 16 et 21 de l’accord Kunming-Montréal. Il s’agit «d’améliorer notre rapport à l’environnement par l’éducation», nous a expliqué Ambrine. Un point de désaccord rencontré lors des discussions étudiantes a été le «problème d’universaliser l’éducation» environnementale.

Interrogée sur l’aboutissement de la COP15, Ambrine a souligné que l’accord représente un «pas révolutionnaire pour la biodiversité», mais a déploré «l’absence de mécanismes de suivi» des 23 cibles de l’accord et une «temporalité qui manque d’urgence» face aux menaces pesant sur la biodiversité. Ambrine a aussi dénoncé le «manque de synergie» entre la COP15 sur la biodiversité et la COP27 sur le climat organisée en Égypte en novembre dernier. En effet, alors que cette dernière avait réuni des chefs d’États du monde entier, la COP15 n’a accueilli aucun président ou premier ministre à l’exception de Justin Trudeau.

Une COP contestée

Tout au long de la COP15, de nombreuses manifestations contre sa tenue ont eu lieu dans le centre de Montréal. Des centaines de protestataires étaient réunis le 9 décembre, arborant des banderoles «Pour la biodiversité, contre la COP» pour dénoncer l’« hypocrisie » de la COP15. Au sein de McGill, la COP15 a fait l’objet d’une résolution de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM), prenant position contre sa tenue.

Contacté par Le Délit, Divest McGill a accepté de nous livrer sa lecture de l’accord Kunming-Montréal. «Nous souhaitons que cet accord apporte des avancées sérieuses pour la préservation de la biodiversité, mais l’histoire de ces conférences nous rend sceptiques (tdlr)», nous a confié Divest McGill, avant de critiquer les «conséquences néfastes» que pourraient avoir certains objectifs. «Des mesures comme celles-ci [30 pour 30, ndlr] ont historiquement légitimé la saisie de terres autochtones et d’autres violations des droits humains», souligne le groupe activiste environnemental.

En effet, l’objectif de protéger 30% des terres et océans d’ici 2030 pourrait passer en partie par un système de conservation-forteresse, transformant des aires terrestres ou marines en sanctuaires naturels interdits à l’humain, expulsant ainsi les communautés vivant sur place, expliquait Fiore Longo, responsable de recherche pour l’organisation non gouvernementale Survival International au journal Libération.

McGill s’engage à son tour pour l’environnement

Le 8 décembre dernier, l’Université McGill, à l’instar de 117 universités à travers le monde et 11 au Québec, a signé l’engagement Nature Positive. Lancé par l’Université d’Oxford et le programme des Nations Unies pour l’environnement afin de coïncider avec le début de la COP15, cet engagement souligne l’importance du rôle des universités dans la protection de la biodiversité. Contactée par Le Délit, Frédérique Mazerolle, agente des relations avec les médias de McGill, a accepté de nous expliquer ce que cet engagement signifie pour l’Université. «En adhérant au mouvement, les universités québécoises reconnaissent […] qu’elles ont une responsabilité au regard de la crise de la biodiversité et, surtout, qu’elles font partie des solutions», nous a écrit Mme Mazerolle. L’engagement Nature Positive de McGill, qui s’inscrit dans la stratégie climat et développement durable 2020–2025 de l’Université, vise à «intégrer la durabilité dans tous les secteurs clés de l’Université». McGill devrait publier sa stratégie officielle pour la biodiversité en 2023, afin d’accroître le financement de recherches et projets liés à la biodiversité.

Interrogé sur l’engagement Nature Positive de l’Université, Divest McGill n’a pas hésité à le qualifier de «présentation trompeuse de l’Université comme étant progressiste et respectueuse de l’environnement ». Pour eux, les prises de position et les programmes de l’Université en faveur de la protection de la nature «sont de bons projets en apparence, mais ils sont loin de respecter l’engagement de l’Université envers une véritable “nature positive», prenant pour exemple le refus de l’université de « désinvestir des énergies fossiles, ignorant les dommages environnementaux et sociaux infligés» malgré les demandes répétées du groupe. 

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John A. MacDonald réinstallé? https://www.delitfrancais.com/2022/11/30/john-a-macdonald-reinstalle/ Wed, 30 Nov 2022 12:00:00 +0000 https://www.delitfrancais.com/?p=50239 Le socle doit demeurer vide, statue un comité.

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Un comité d’experts indépendant a rendu ses recommandations à la Ville de Montréal quant à l’avenir de la statue de l’ancien premier ministre John A. Macdonald, déboulonnée le 29 août 2020 lors de manifestations pour le dé-financement de la police. Le comité ad hoc s’est ainsi positionné contre une réinstallation de la statue à l’identique sur son socle, place du Canada, au centre-ville de Montréal.

Les recommandations du comité

Dans un avis préliminaire rendu public le 21 novembre dernier, le comité exclut «une réinstallation à l‘identique de la statue […] comme avant son déboulonnement», et considère «qu’il est nécessaire de se distancer » de l’héritage de John A. Macdonald en raison des «politiques assimilatrices et génocidaires qu’il a mises en œuvre à l’endroit des peuples autochtones et des actes discriminatoires qu’il a perpétrés envers plusieurs groupes de personnes».

Toutefois, les membres du comité soulignent « l’importance du devoir de mémoire entourant ce monument et son histoire ». Ils recommandent de « laisser sur place la structure du monument, constituée du socle et du baldaquin, mais sans la statue », avec l’ajout d’une plaque commémorative. Les recommandations du comité seront débattues le 7 décembre lors d’une séance d’étude publique où la population montréalaise sera invitée à venir partager son avis.

Un héritage controversé

La découverte de milliers de tombes d’enfants autochtones anonymes à proximité de pensionnats fédéraux a jeté un nouvel éclairage sur l’héritage de John A. Macdonald. En effet, ce dernier est considéré comme le père de la Loi sur les Indiens, qui a permis l’établissement du système des pensionnats autochtones, basé sur un modèle d’assimilation. La redécouverte de son rôle dans ces politiques assimilatrices, qualifiées de «génocide culturel» par la Comission de vérité et réconciliation en 2015, a créé une controverse sur sa place dans la mémoire collective canadienne. Sa statue avait déjà été recouverte de peinture rouge à multiples reprises, avant d’être déboulonnée il y a deux ans. D’autres statues de John A. Macdonald ont été déboulonnées ou retirées au Canada. Dans l’avis préliminaire rendu par le comité, ce dernier recommande la mise en place d’un «programme d’interprétation renouvelée qui pourrait prendre différentes formes pour rendre compte de l’importance et de la complexité des enjeux».

« On ne veut pas effacer l’histoire, on veut en tirer des leçons »

Terri Givens, professeure de sciences politiques à l’Université McGill

Afin de comprendre les enjeux liés aux héritages historiques controversés et au devoir de mémoire, Le Délit s’est entretenu avec Terri Givens, professeure de sciences politiques à l’Université McGill spécialisée dans les politiques anti-discrimination et la politique raciale comparative. Pre Givens nous a expliqué qu’«il s’agit d’un débat plus large que nous avons, en tant que société, sur ce qui devrait être valorisé dans le contexte historique». «On ne veut pas effacer l’histoire, on veut en tirer des leçons», ajoute-t-elle. Selon la professeure, « tout cela s’inscrit dans un dialogue plus large,[…] au Canada, autour de personnes comme James McGill, qui maintenait dans l’esclavage des personnes noires et autochtones, et sur comment nos valeurs d’aujourd’hui influencent la façon dont nous voulons gérer la valorisation de ces personnes dans le présent».

La statue de James McGill sur le campus sujette à la controverse avait été retirée par l’administration en juillet 2021 afin d’effectuer des réparations après qu’elle ait subi des dégradations. Depuis, son socle est resté vide, et l’Université ne s’est pas encore prononcée au sujet de son futur.

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