Ce n’est pas toujours facile à entendre, mais il va falloir s’y faire. Nos parents avaient peut-être raison : « C’est la faute des écrans. » Une étude de Statistique Canada parue le 17 octobre dernier semble le suggérer. Celle-ci s’intéresse à l’activité physique des jeunes adolescents canadiens (de 12 à 17 ans), sur la période de 2022 à 2024, ainsi qu’à leur temps sédentaire notamment consacré aux écrans, c’est-à-dire sans la moindre activité physique. La conclusion : il y a de quoi s’inquiéter.
La sédentarité règne
Tout d’abord, seulement 21 % des jeunes de 12 à 17 ans suivent les taux d’activité physique quotidiens recommandés par le gouvernement, un déclin considérable par rapport à la période entre 2018 et 2019, où ce chiffre atteignait 36 %. Claire LeBlanc, professeure au Département de pédiatrie de McGill, et co-auteure des recommandations canadiennes sur l’activité physique pour les enfants et les adolescents, explique ces chiffres : « Les jeunes ont du mal à retrouver un rythme sportif depuis la pandémie. Plusieurs athlètes n’avaient plus la capacité mentale de se réintégrer dans leur sport, et cela a eu un grand impact (tdlr). »
Dans cette tranche d’âge, le temps sédentaire, qui prend notamment en compte le temps de loisir consacré aux écrans, est également fortement en hausse. Il représente en moyenne 10,6 heures par jour, contre 9,3 heures pour les adultes, et 7,6 heures chez les enfants. Pour LeBlanc, ce sont encore les effets persistants de la pandémie qui en sont la cause : « Les enfants de la COVID-19 se sont retrouvés avec toutes sortes de problèmes de santé mentale, limitant leur volonté de bouger. Mais c’est surtout le déclin dans la qualité du sommeil, avec pour cause le temps passé sur les écrans, barrière à l’activité physique, qui est à la source de la sédentarité croissante. »
Des conséquences graves
La baisse de régime sportif dans cette tranche d’âge a des conséquences, notamment sur la santé physique. LeBlanc rappelle que « le sport est nécessaire pour renforcer ses muscles, sa structure osseuse, son profil lipidique, éviter l’hypertension, et tant d’autres choses dans le domaine de la prévention et du bien-être physique ». Au-delà de cela, cette baisse présente des risques importants pour la santé mentale des jeunes : elle explique que « le sport est la clé pour réduire la dépression et l’anxiété, et contribue aussi grandement à la performance académique ».
Avec cette considération en tête, on comprend d’autant plus pourquoi les inégalités des genres dans cette tranche d’âge en matière d’activité physique peuvent avoir des conséquences sérieuses dans le monde académique et professionnel. En effet, alors que 33 % des jeunes garçons font suffisamment d’activité physique, ce chiffre se situe à 8 % pour les jeunes filles. LeBlanc explique que « l’intérêt pour le sport chute à l’arrivée dans l’adolescence, et cela est particulièrement le cas pour les jeunes filles. Elles développent d’autres intérêts [ce qui diminue le temps qu’elles accordent aux activités sportives, ndlr], et c’est très dommage ». L’activité physique est fondamentale au développement d’une vie saine, à la fois pour le corps et pour la vie sociale et professionnelle. Un effort considérable est donc nécessaire pour l’encourager.
Maintenant, il faut se bouger
Il existe alors plusieurs solutions. Pour sa part, LeBlanc rappelle l’importance des comportements sociologiques dans le développement d’une vie plus active : « Dès le jeune âge, il faut instaurer un aspect sportif dans la famille, en faisant du vélo ou des randonnées ensemble, par exemple. À l’adolescence, cela doit se transmettre dans les groupes d’amis. » Elle ajoute que « balader ses enfants en poussettes les empêche de développer de bonnes habitudes physiques ». Certes, pour vous lecteurs cherchant à devenir plus actifs, il est peut-être trop tard pour demander à vos parents de ne pas vous balader en poussette. En revanche, il ne l’est pas pour se tourner vers le sport. À McGill, par exemple, la ligue intra-muros est faite pour cela.
Offrant une variété de sports individuels et collectifs, pour les débutants comme pour les habitués, la ligue intra-muros de l’Université cherche à promouvoir l’accès au sport pour tous. Ryne Bondy, directeur des sports récréatifs à McGill, rappelle que « des ligues féminines, mixtes ou ouvertes rendent nos sports accessibles à tous ». Les ligues de niveau inférieur, ou les « PLAY-FUN » (juste pour le plaisir) existent d’ailleurs pour faciliter l’accès au sport. Pour Bondy, ce type de sport récréatif offre une opportunité aux McGillois, car pour les adolescents, « le sport devient plus une affaire de compétition et d’hyper-spécialisation ». Il présente donc la ligue intra-muros comme un lieu de réintégration sportive pour ceux à qui le sport a manqué pendant l’adolescence. Et c’est un succès. Selon Bondy, le nombre de participants continue d’augmenter, avec 6 515 participants ce semestre, contre 6 467 il y a un an. De quoi rester optimiste pour relancer la génération COVID-19.



