Dans une lettre livrée au président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, Emmanuel Macron annonçait le 24 juillet son intention de reconnaître l’État de Palestine à l’Assemblée générale de l’ONU à New York. Ce geste, avant tout symbolique, a ensuite été imité par neuf États occidentaux – dont le Canada, l’Australie et le Royaume-Uni – à la suite de la conférence sur la question palestinienne, initiative conjointement présidée par la France et l’Arabie saoudite à l’ONU les 28 et 29 juillet 2025.
Les officialisations de ces multiples reconnaissances de l’État de Palestine ont eu lieu les 21 et 22 septembre, à l’occasion du sommet sur la question palestinienne lors de la 80e session de l’Assemblée générale de l’ONU. Emmanuel Macron a ouvert la session en procédant à la reconnaissance de l’État de Palestine, devant les délégations du monde entier qui comptait deux absences notables : Israël et les États-Unis. S’en est suivi le discours du premier ministre du Canada, Mark Carney, qui a à son tour reconnu l’État de Palestine : « Le Canada reconnaît l’État de Palestine et offre de travailler en partenariat afin de porter la promesse d’un avenir pacifique pour l’État de Palestine et l’État d’Israël (tdlr). »
Les réactions de la communauté internationale
Le tonnerre d’applaudissements qui a résonné dans la salle, en réponse aux divers discours de soutien envers la Palestine, n’a pourtant pas effacé les tensions marquant cette session de l’Assemblée générale. Celles-ci ont atteint leur sommet à l’apparition de Benjamin Netanyahu à la tribune de l’assemblée, lorsqu’une foule de 77 délégations ont quitté la salle en guise de protestation.
Le discours du premier ministre d’Israël a vivement condamné les multiples reconnaissances de l’État de Palestine. « C’est une marque de honte », a‑t-il déclaré, « Vous savez quel message ceux qui ont reconnu l’État palestinien cette semaine ont envoyé aux Palestiniens ? Tuez des Juifs et vous en serez récompensés ».
Interrogé à ce sujet, Rex Brynen, professeur de science politique à McGill spécialisé dans les conflits du Moyen-Orient, réfute cette conclusion. Il précise que « le Canada a explicitement identifié l’Autorité palestinienne dans sa reconnaissance. Alors à bien des égards, la réaction d’Israël a en quelque sorte donné raison au gouvernement canadien ». Pourtant, cette interprétation n’est pas partagée par tous au Canada.
À la maison, une réaction pas moins clivante
Si une majorité de la population canadienne est favorable à la reconnaissance de l’État de Palestine, plusieurs la déplorent. Interrogé à ce sujet, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA) a communiqué que « cette décision encourage le Hamas, sape les efforts de paix, prolonge les souffrances des Palestiniens sous le régime du Hamas et alimente l’incitation mondiale à la haine contre le peuple juif ». Les préoccupations internationales sont alors associées à la crainte de l’augmentation de l’antisémitisme au Canada. Sur ce point, la CIJA affirme que « depuis que le gouvernement a annoncé en juillet son intention de reconnaître l’État palestinien, les crimes haineux anti-juifs ont augmenté dans le pays » ; illustration des tensions qui traversent la société canadienne autour de la question palestinienne.
Si les reconnaissances de la Palestine sont tout d’abord un geste symbolique, elles ne sont tout de même pas anodines. Selon Brynen, « cela exprime l’idée que le gouvernement israélien actuel tente de rendre impossible l’autodétermination palestinienne et que les États occidentaux n’apprécient pas cela ». On y voit donc une volonté de ces derniers d’agir comme frein au moteur expansionniste d’Israël, jouant le rôle de contre-pouvoir pour nuancer un soutien américain quasi inconditionnel. Pour Brynen, ce changement de politique internationale transmet que « plus Israël parle d’annexion, plus il y aura une certaine résistance de la part des principaux pays occidentaux ».
Symbole politique controversé, la reconnaissance de l’État de Palestine par plusieurs puissances occidentales envoie alors un message d’avertissement envers Israël.