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Initiation sous le signe du rétro

Meilleure chance la prochaine fois.

Véro Boncompagni

Le réalisateur Louis Bélanger signe, avec Vivre à 100 milles à l’heure, un long-métrage autofictionnel à saveur d’aventure et d’insouciance. Il vient d’ailleurs tout juste de rafler le prix du public au Festival de cinéma de la ville de Québec. On peut se rappeler que certaines de ses œuvres, Gaz Bar Blues (2003) et Les mauvaises herbes (2016) notamment, avaient aussi reçu un bel accueil critique et populaire. Il nous tardait donc de renouer avec son cinéma touchant et drôle. Son plus récent opus se donne des allures de récit initiatique et surfe habilement la vague rétro sans toutefois se démarquer outre mesure. 

De petits culs à petits bums

Un duo d’amis qui devient rapidement un trio, trois petits garçons qui grandissent un peu trop vite. On suit Louis, Daniel et Éric dans leurs frasques qui prennent rapidement de l’ampleur ; les premières amours, les premières bières, les premiers joints. Ils passent du commerce de dictionnaires à la vente de drogue. Les affaires vont bien, peut-être trop. C’est le Québec des années 1970 : le blues rock, les vinyles, les cheveux longs flottant sur les vestes en jean. Leur amitié sera inévitablement mise à l’épreuve. Ils ont commencé à vendre du pot pour se payer quelques joints, mais ils ont maintenant besoin de protection. Dénicher de nouveaux clients, se déplacer constamment ; des imprévus, des enjeux plus importants. 

Une originalité en demi-teinte

Le réalisateur réussit habilement à créer une atmosphère enivrante à coup de clins d’œil ludiques qui évoquent le cinéma de Ricardo Trogi (la voix hors champ du narrateur, le récit initiatique de jeunes garçons, les petites flèches politiques bien placées). C’est d’ailleurs ce qui donne aux cinéphiles un sentiment de déjà-vu. Il est vrai cependant que la trame narrative explore plus que la simple quête amoureuse adolescente. C’est plutôt le puissant désir de vivre intensément qui intéresse le réalisateur, qu’il exprime avec justesse dans son œuvre. C’est d’ailleurs le point fort de son film qui, autrement, manquerait un peu de substance. Avec ses amis, Louis se sent vivant ; c’est ce qui le pousse à les suivre dans cette aventure dont il fera lui-même les frais. Même si la première partie du long métrage insiste sur le comique — parfois de manière un peu trop appuyée — nous nous trouvons propulsé·e·s dans ce que le crime a de plus concret : la violence. La transition s’opère en douceur, permettant à l’histoire de respirer et aux personnages de vieillir, même si certains d’entre eux manquent cruellement de profondeur. 

Le film vaut le détour même s’il manque d’originalité. Les images sont belles, les costumes réussis et la musique contribue à la création d’une atmosphère enfumée. Même si la formule s’avère un peu éculée, la poésie de certaines scènes fait oublier les moments plus ternes. Ce n’est certainement pas le meilleur film du réalisateur, mais son talent lui a permis ici d’éviter le pire.

 


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