Faut-il absolument avoir un verre à la main pour profiter d’une soirée étudiante ? Pour Benji, étudiant à la faculté des arts de McGill, la réponse est claire : « Oui ! Tu ne peux pas aller en boîte de nuit sans boire, on apprécie beaucoup mieux pompette ! » Pourtant, de plus en plus de jeunes ne boivent plus – ou du moins, plus autant qu’avant. Selon une enquête réalisée par le gouvernement canadien, il y aurait eu une diminution de 74 % par rapport au cycle 2019–2020 concernant la consommation d’alcool au cours des 30 derniers jours.
D’après le rapport, il y a plusieurs causes à cette récente baisse. Une des principales raisons invoquées est la diminution des rendez-vous sociaux (79 %), ou encore une volonté d’économiser de l’argent (16 %). D’autres arguments qui sont apparus au cours des entretiens pointent vers une question de goût, et une certaine appréhension de perdre le contrôle.
Pendant longtemps, boire en soirée était une norme sociale implicite. Rien de mieux qu’un shot pour entamer la fête. Mais qu’en est-il maintenant ?
Boire pour socialiser
Pia, une autre étudiante à McGill, donne son avis : « Ça dépend surtout de combien tu veux t’intégrer dans un groupe, et de combien ce groupe boit », explique-t-elle. Selon Pia, l’alcool peut jouer un rôle dans la socialisation, pas différent de celui de la cigarette. « Quand tu es dans un groupe de fumeurs et qu’ils partent en pause, mais que toi tu ne peux pas supporter l’odeur du tabac, tu perds des moments importants et c’est plus dur de s’intégrer. C’est similaire avec l’alcool, ajoute-t-elle, si tous les autres membres du groupe boivent, il y a une certaine pression à se conformer ». Elle admet cependant n’avoir jamais été victime d’une telle pression.
Même lors de la semaine d’intégration, Frosh – pourtant un événement où la consommation d’alcool est mise en avant – les organisateurs offraient toujours des alternatives. Aujourd’hui, il n’est pas exceptionnel qu’un étudiant décide de passer une soirée sans alcool. Les témoignages recueillis sur le campus auprès de telles personnes attestent que ce choix est généralement respecté par leurs amis.
Apprécier la soirée sobre
Un sentiment récurrent chez les étudiants interrogés est que boire avant d’aller en boîte de nuit leur permet de se sentir moins gênés, de relâcher la pression. Il sert aussi, pour certains, à mieux apprécier la musique et le cadre. Mais cet argument cache un certain paradoxe. Comme le souligne Pia, « si mes potes arrivent en boîte sobres, ils vont trouver la musique médiocre et vont vouloir partir ». Elle s’esclaffe, un peu exaspérée : « Moi, je sais très bien que c’est exactement la même chose qu’ils trouvent “trop cool” quand ils sont bourrés. » Selon elle, choisir de rester sobre oblige au contraire à porter davantage attention à l’environnement et à l’expérience de la soirée. Cela permet, avec le temps, d’apprendre à profiter réellement du moment sans dépendre de l’alcool. Une compétence que, d’après Pia, beaucoup d’étudiants négligent, faute d’oser affronter la boîte de nuit sans ce coup de pouce préalable.