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Remettre les pendules à l’heure

La pratique du changement d’heure arrive-t-elle à sa fin ?

Laura Tobon | Le Délit

Aux petites heures du matin, le dimanche 6 novembre dernier, les cadrans de nos téléphones intelligents sont passés de 1h59 à 1h00. Après plus de six mois sous le régime de l’heure avancée, nous voilà ainsi de retour à l’heure normale. Le Délit s’est penché sur les origines de cette pratique ainsi que sur ses perspectives d’avenir.

La petite histoire

L’idée de l’heure avancée est souvent erronément attribuée à Benjamin Franklin. Bien que le Père fondateur des États-Unis ait promu les rayons du soleil comme alternative économique aux chandelles dès 1784, Franklin défendait la thèse d’une modification de l’horaire de sommeil plutôt qu’une modification de l’heure elle-même. Il faudra attendre la Première Guerre mondiale pour la première implantation de l’heure avancée. En 1916, en vue d’économiser son énergie électrique, l’Allemagne est le premier pays à adopter « l’heure d’été », suivie de près par l’Angleterre. Ce n’est que deux ans plus tard, en 1918, que le Canada et les États-Unis emboîteront le pas à ces nations européennes. Toutefois, en Amérique du Nord, la mesure est abandonnée à la fin du conflit pour n’être réinstaurée qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale. Pendant cette période, l’heure avancée sera en vigueur à l’année longue au Canada.

Et aujourd’hui ?

Depuis la fin des années 1980, le changement d’heure est réglementé par les gouvernements provinciaux et fédéral en vue d’éviter des disparités régionales. Aujourd’hui, l’heure avancée commence toujours le deuxième dimanche de mars et se termine le premier dimanche de novembre. Or, le changement d’heure n’est pas une pratique à laquelle adhère l’ensemble du pays : la Saskatchewan et le Yukon ne touchent pas à leurs horloges.

L’idée d’abandonner l’heure avancée fraye son chemin dans les sphères politiques canadiennes, mais elle dépend largement du choix que feront les États-Unis. À titre d’exemple, la Colombie-Britannique a légiféré en vue de mettre fin au changement d’heure, à condition de voir un changement en ce sens de la part des États voisins de la Californie, de l’Oregon et de Washington.

En effet, les gouvernements semblent reconnaître que la pratique du changement d’heure est de moins en moins justifiable au vu des connaissances scientifiques actuelles. Alors que sa vocation première était la conservation énergétique, certaines études démontrent que l’heure avancée aurait plutôt entraîné une augmentation des dépenses d’énergie. Effectivement, malgré une réduction de la consommation énergétique dédiée à l’éclairage, la pratique entraînerait une hausse des dépenses énergétiques liées à la climatisation.

À cette absence de bénéfices environnementaux s’ajoutent les effets néfastes du changement d’heure sur notre rythme circadien. La manipulation artificielle de nos pendules deux fois par an interfère avec nos besoins de lumière (en novembre) et de sommeil (en mars). En effet, en limitant la clarté du matin et l’obscurité de la nuit, l’heure avancée rend le réveil difficile et repousse le moment de s’endormir, en raison de changements à notre production de mélatonine. Plusieurs associations scientifiques penchent donc en faveur de la réinstauration permanente de l’heure normale, mieux alignée avec la progression du soleil, et donc avec notre horloge biologique.


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