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Cheveux crépus et droits humains

Retour sur la conférence d’ouverture du Mois de l’Histoire des Noir·e·s à McGill.

Anaïs Régina-Renel

À l’occasion de la cérémonie d’ouverture de la quatrième édition du Mois de l’Histoire des Noir·e·s (MHN) à l’Université McGill, la Faculté de droit de McGill recevait la professeure Wendy Greene, le 3 février dernier. Figure reconnue mondialement dans le domaine du droit du travail et de l’emploi, Greene a donné une conférence à guichet fermé, intitulée Rooted : Locking Black Hair to Human Rights Activism, portant sur les liens entre les cheveux crépus et les droits humains.

Greene a débuté la conférence en relatant l’histoire de son père, « un fervent militant pour la justice sociale ». En 1963, alors étudiant au Benedict College, un établissement d’enseignement postsecondaire en Caroline du Sud, il participe avec d’autres étudiant·e·s à un sit-in pour protester contre la ségrégation raciale. Il est arrêté et accusé d’intrusion criminelle. Wendy a cinq ans lorsque sa mère lui raconte cette histoire. « L’activisme a toujours fait partie de ma vie », a‑t-elle dit pour conclure cette anecdote.

Dans ses travaux académiques, la professeure Greene interroge les façons dont les constructions sociojuridiques de l’identité, notamment la définition légale du concept de « race », forment et limitent les protections légales contre les inégalités aux États-Unis. Son travail a influencé la position de la Commission pour l’égalité des chances dans l’emploi (Equal Employment Opportunity Commission en anglais, EEOC), de juges de droit administratif, de tribunaux fédéraux et d’organisations de défense des droits civiques dans différentes poursuites judiciaires. Il est également utilisé dans des modules éducatifs pour des programmes de formation professionnelle sur la diversité et l’inclusion au travail. 

Dans sa conférence, Greene a abordé le manque de protection sociale contre la discrimination en matière de coiffures, expliquant comment celles-ci sont rarement couvertes par les protections contre la discrimination raciale ou religieuse. Plusieurs États aux États-Unis ne considèrent appartenant à la « race » que les traits « immuables » d’un individu. Ainsi, un employeur qui mettrait à la porte un·e employé·e parce que celui ou celle-ci porte des tresses, des dreadlocks ou des vanillés ne pourrait, dans ces États, ne pas être accusé de discrimination raciale. 

Le CROWN Act (Create a Respectful and Open Workplace for Natural Hair, Créer un environnement de travail ouvert et respectueux de la chevelure naturelle, en français) représente la première loi adoptée par un État américain à interdire la discrimination fondée sur la coiffure et la texture des cheveux. Elle étend la protection légale à la texture des cheveux et aux styles protecteurs dans la loi sur l’emploi et le logement équitables (FEHA) et les codes de l’éducation de l’État. Mentionnée par Matthew A. Cherry, producteur du court-métrage Hair Love, lors de son discours d’acceptation pour le prix du meilleur court-métrage d’animation, lors de la cérémonie des Oscars du 9 février 2020, cette loi a d’abord été adoptée en Californie, puis à New York et au New Jersey, et a également été introduite dans plus de 20 autres États américains. La professeure Greene, qui milite actuellement pour son adoption, a terminé sa conférence en invitant le public à soutenir son travail en signant la pétition de la Coalition CROWN sur le site thecrownact​.com, pour aider d’autres États à se munir d’une telle législation.


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