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Ce que l’argent ne peut acheter

Le Délit a assisté à un cercle de discussion organisé par Expanding Economics. 

Evangéline Durand-Allizé | Le Délit

Jeudi dernier, un groupe de lecture rassemblé par le club étudiant Expanding Economics s’est penché sur le livre Ce que l’argent ne saurait acheter de Michael J. Sandel. Les étudiant·e·s ont pu débattre sur le rôle de la marchandisation dans notre société et sur les limites morales d’une économie de marché. 

Pr Sandel, un spécialiste américain de la philosophie politique enseignant à Harvard, est connu pour son cours Justice, qu’il enseigne depuis plus de vingt ans avec un style vif et interactif qui engage les étudiant·e·s sur des questions d’éthique et de morale. Dans son livre Ce que l’argent ne saurait acheter, il présente des exemples suscitant des réflexions sur la société dans laquelle nous vivons. Devrions-nous payer les élèves d’écoles primaires pour chaque livre lu afin de les motiver à apprendre ? Est-il moral de rémunérer des gens pour vendre leurs organes ou pour tester des médicaments ? Qu’en est-il d’embaucher des mercenaires pour combattre à la place de nos armées ? Où et comment mettons-nous des limites au marché ? Il nous invite finalement à questionner les impacts de ces marchés potentiels en termes de justice, d’inégalité et de corruption par l’argent.   

Cercle de discussion

La discussion des élèves rassemblé·e·s la semaine dernière s’est centrée sur une situation fictive de marché d’adoption ouvert à tous·tes où les enfants pourraient être traité·e·s comme de simples commodités dont le prix fluctuerait avec l’offre et la demande. Les participant·e·s ont mis à contribution des idées tirées de l’économie comme de la philosophie pour débattre des implications de mettre un prix sur la vie humaine. Si, d’un côté, certain·e·s défendaient qu’un prix élevé pour un·e enfant favoriserait l’adoption par des parents motivés qui ont les moyens d’offrir éducation et santé, d’autres contre-argumentaient en démontrant que l’adoption privilégie déjà les familles aisées et qu’un système comme celui-ci aurait des conséquences psychologiques dévastatrices pour l’enfant. 

Finalement, l’aspect dystopique de la marchandisation a été apporté sur la table : ne vivons-nous pas déjà dans un monde où une valeur monétaire est mise sur l’être humain ? De l’esclavage d’hier au prix de l’adoption privée (avec période « d’essai » de 30 jours), en passant par le paiement de mères porteuses en Inde et le trafic d’organes, nous évoluons aujourd’hui dans un monde où tout s’achète — ou presque. 

Un nouveau club

Ce débat ouvert fait partie d’une série de groupes de lecture ouverts aux étudiant·e·s de toutes les facultés. Le club Expanding Economics, créé à l’hiver 2018, s’efforce de promouvoir une approche pluraliste de l’économie. Il dénonce l’approche trop orthodoxe du Département qui offre essentiellement des cours inspirés de l’école néoclassique. 

Le groupe organise depuis des tables rondes, des conférences et des discussions qui visent à donner accès et à promouvoir des approches variées à l’étude de l’économie. Pour Expanding Economics, « comme d’en toute science sociale, le pluralisme apporte différentes avenues pour l’étude d’une discipline, avec chacune leurs forces et leurs faiblesses. » 


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