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Jeu d’échecs bilingue

Au Cameroun, le Président tente d’apaiser les tensions après des mois de conflit. 

Matt Wolf

Depuis octobre 2016, les populations anglophones estiment être mal représentées d’autant plus que la plupart des communications se font dans la langue de Molière, dans un pays où le français et l’anglais sont considérés comme des langues officielles.

Ainsi, les minorités anglophones tentent de se faire entendre par un État à majorité francophone, qui orchestre des mesures de répression sévères en guise de réponse. Des dirigeants ont été emprisonnés, et des sanctions imposées, allant même jusqu’à couper l’électricité dans les régions anglophones. En conséquence, ces régions se sont retrouvées paralysées, autant par les multiples grèves, ayant dérivées vers une crise sociopolitique, que par les réponses gouvernementales. 

Alors que le conflit semblait s’enliser, le président Paul Biya a annoncé la fin des poursuites judiciaires contre les chefs de file anglophones le 30 août dernier. 

Une jeunesse à sauver

Le conflit durait depuis des mois. Pourtant, c’est à l’approche de la rentrée scolaire que le président Biya a décidé de lever le pied sur la repression du  mouvement de contestation anglophone. Cette mesure s’avérait inévitable, surtout à cette période. En effet, la crise a conduit à une déscolarisation des enfants, surtout dans les régions anglophones, ce qui inquiétait les parents, qui en venaient donc à soutenir les mouvements de grève, dans l’espoir que le gouvernement entende les revendications. Malgré les diverses arrestations des chefs de file anglophones, la principale victime de cette crise était la jeunesse anglophone, déscolarisée de force. Le gouvernement étant bien conscient de cette réalité, et voulant éviter que les enfants se retrouvent sans éducation une deuxième année consécutive, il a promulgué ce décret.

Différentes interprétations 

Il semblerait que les deux populations n’aient pas vu cette mesure de la même façon. En effet, libérer les meneurs anglophones ne signifie pas que le gouvernement est prêt à faire des concessions, ou que les pratiquants de la langue de Shakespeare s’inclineront devant le régime actuel. C’est pourquoi il est impossible de parler de résolution du conflit à l’heure actuelle. Dans les régions anglophones, la rentrée scolaire fut timide. Beaucoup de parents restent sceptiques devant la scolarisation de leurs enfants, convaincus de la légitimité de leur combat. 

De plus, les forces armées restent très présentes dans les zones anglophones, et deux personnes ont perdu la vie dans des affrontement opposant gendarmes et civils, dans une localité du Nord-Ouest.

« En effet, la crise a conduit à une déscolarisation des enfants, surtout dans les régions anglophones » 

Dialogue de sourds

Aussi, les anglophones ne voient pas forcément ce décret comme un acte de bienveillance de la part du gouvernement, car les figures principales des contestations restent derrière les barreaux, soutenues par le Hashtag #FreeAllArrested (libérez tous ceux qui ont été arrêtés, en français,  ndlr) C’est le cas de Mancho Bibixy, dit « BBC », emprisonné depuis janvier, un des chef du mouvement de contestation. Certains anglophones sont donc frustrés que M. Bibixy reste en prison, tandis que d’autres sont libérés. Malgré le décret du gouvernement Biya, la situation ne semble pas évoluer. Les anglophones restent très méfiants et il en faudra plus pour les convaincre.


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