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Le train

Ligne de fuite 

Six heures du matin dans la grisaille bruxelloise. Les gouttes de pluie continuent de tomber, imperturbables. Leur longue descente, ballet humide du ciel, les amène à s’écraser contre les vitres d’une voiture roulant à toute vitesse en direction de la gare. Bruxelles-Midi se réveille à peine. Les quelques clochards ayant occupé les bancs pendant la nuit se lèvent en faisant craquer les os de leur dos. Les escalators dorment encore, il faudra monter à la force des muscles. Les quais sont presque déserts ; l’ambiance y est encore brumeuse, une fumée invisible ralentit tout ce qui est autour de vous, et donne l’impression d’évoluer au travers d’un flux répétitif et inhibant.

Rentrer dans un train, c’est rentrer dans une atmosphère. Celle-ci est paisible.

Chacun toise du regard l’autre, non par crainte mais plutôt par acquis de conscience, par habitude, histoire de voir avec quel genre de personnes nous allons partager un tronçon de vie, un fragment de temps délimité par deux gares.

Quelques coups de sifflet, les derniers au revoir, et  les portes se ferment sur une mélodie d’air compressé. Au fur et à mesure que le train prend de la vitesse, les gouttelettes, éparpillées sur ses vitres, empruntent un chemin horizontal. Le train n’avance plus, il vole.

Il perfore les zones industrielles, il perfore la carapace humide des chemins qu’il emprunte. Cologne. Architecture de fer au milieu des pierres gothiques grisâtres, noircies en vert par le temps et les intempéries. Escale d’une journée qui ne fait que commencer. Et puis, les vastes plaines de la Ruhr s’étendent à nouveau sous nos yeux. Le temps file, et le train essaye de le rattraper.

Non daté.


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