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La chose principale

Mal de pierres est le dernier film de Nicole Garcia, à voir absolument pendant le festival du cinéma francophone Cinémania, qui a lieu à Montréal jusqu’au 13 novembre. Adapté du roman de l’Italienne Milena Agus, c’est un film bouleversant qui parle très bien d’amour, d’apprentissage et du désir féminin. C’est aussi un film esthétique avec des images superbes, et de belles prises de la Provence, des forêts suisses et de la Méditerranée. Les trois personnages principaux sont poignants et émouvants, joués à merveille par Marion Cotillard, Louis Garrel et Alex Brendemühl.

Marion Cotillard est parfaite dans ce rôle de femme complexe à la quête de la « chose principale », l’amour absolu. Elle est charnelle, fougueuse,  fiévreuse. C’est une femme à la fois très libre dans sa manière de ressentir la vie et pourtant soumise aux choix des autres. Son personnage Gabrielle épouse un homme qu’elle pense ne jamais pouvoir aimer mais, pendant sa cure dans les Alpes, son désir se cristallise alors autour d’un autre malade, interprété par Louis Garrel. Il s’agit d’un lieutenant rapatrié de la guerre d’Indochine qui a du mal à oublier le conflit. Proche de la mort, il commence à renoncer à l’amour. Le mari de Gabrielle, José, est joué par l’acteur catalan Alex Brendemühl. C’est un espagnol taiseux qui a fui la guerre civile, et dont les très grandes qualités, telles que la générosité, la patience et l’intelligence, se dévoilent progressivement. 

Marion Cotillard sublime le personnage de Gabrielle, et le rôle de l’officier blessé sied à l’élégance mélancolique de Louis Garrel. L’excellente surprise vient de l’acteur Alex Brendemühl. Tout en intériorité dans le film, son personnage intense dédie sa vie à essayer de conquérir Gabrielle, de la satisfaire, de croiser son regard. Gabrielle ne trouvera peut-être pas l’amour dont elle rêvait mais elle trouvera un amour. Les personnages masculins du film incarnent une déclinaison de cet amour qui lui manque et qu’elle va apprendre à apprivoiser. 

Il semblerait que l’amour ne se trouve pas forcément là où on aimerait qu’il soit. C’est un film extrême, chargé d’émotion, avec des personnalités très fortes et un twist final tragique et somptueux. 

Margaux Sporrer

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Carlotta Esposito

Quand la mort permet la vie

Réparer les vivants est l’adaptation par Katell Quillévéré du best-seller de Maylis de Kerangal. C’est l’histoire du cœur du jeune Simon (Gabin Verdet), mort dans un accident de la route. Un cœur qui, grâce à la science, se remettra à battre dans le corps de Claire, atteinte d’une maladie cardiaque. Un cœur amoureux et aimé : par sa petite amie Juliette (Galatéa Bellugi) et ses parents, Marianne (Emmanuelle Seigner) et Vincent (Kool Shen) chargés de prendre la lourde décision de donner ses organes. Un cœur qui offrira une seconde vie à Claire, magnifiquement interprétée par Anne Dorval, vivant désormais « comme une petite vieille », sa maladie l’ayant forcée à tourner le dos à la femme qu’elle aime (Alice Taglioni). Malgré la culpabilité de « vivre avec le cœur d’un mort », l’espoir d’être « réparée » lui redonne le goût de la vie et de l’amour. Enfin, c’est l’histoire d’un simple muscle pour les médecins, qui chamboulera cependant leur journée. Tahar Rahim est touchant de simplicité dans le rôle de Thomas Remige, véritable chef d’orchestre de la greffe.

Comme l’a déclaré Emmanuelle Seigner, « triste mais pas déprimant, c’est un film d’amour, doux, délicat ». L’apaisante bande son, signée Alexandre Desplat, et l’absence de dialogues superflus suffisent à nous bouleverser. Sans personnage principal, c’est l’histoire d’un tourbillon de vies autour d’un cœur, ce qui permet de s’identifier avec chacun des protagonistes. Une certaine pudeur se reflète aussi dans la douceur des tons choisis par la réalisatrice. Réparer les vivants transmet un magnifique message d’espoir, traitant de la mort tout en donnant l’envie de vivre. Pour Emmanuelle Seigner, « quand on sort du film on a envie de donner ses organes, […] c’est magnifique de pouvoir redonner la vie ».  Sans tomber dans le voyeurisme, ce film fera sûrement réfléchir les jeunes sur l’importance du sujet, à un âge où la mort semble abstraite. 

- Colombe De Grandmaison

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Madeleine Courbariaux | Le Délit

En scène

Le premier film de Stéphanie Di Giusto, La danseuse est une des projections phares de cette édition du Festival Cinemania. Il met à l’écran l’histoire de Loïe Fuller, une artiste franco-américaine dont les créations avant-gardes lui ont permis d’accéder à une gloire fulgurante mais éphémère. Nous suivons son parcours des étendues de l’ouest américain au Paris de la Belle Époque, au grè des rencontres qui façonnent sa vie.    

Le film est porté par une distribution artistique d’exception : dans le rôle de Loïe, Soko nous touche de par sa sensibilité brute, qui lui évite de tomber dans le mielleux. Elle est accompagnée à l’écran par Gaspard Ulliel qui donne vie au personnage de l’aristocrate ruinée, par Mélanie Thierry et François Damien qui excellent en directeurs artistiques des Folies Bergères, et enfin par Lily-Rose Depp, qui par contre ne nous convainc qu’à moitié dans son interprétation – très dans l’évidence – de la manipulatrice Isadora Duncan. 

    La danseuse se distingue aussi par sa photographie époustouflante. Elle participe à la dichotomie entre les efforts physiques et psychologiques que la vie d’artiste et la création artistique imposent à Loïe et sa légèreté sur scène. Les séquences de danse que Soko a réalisé sans doublure nous montre la transition entre Loïe et « la danseuse » : un être éthéré, perdu dans ses voiles et qui s’éloigne de l’humain pour rejoindre le naturel, voire le surnaturel. 

  En un peu moins de deux heures, c’est donc une belle expérience cinématographique que nous offre ce film. Avec ses sept nominations au Festival de Cannes, il révèle au grand jour le talent de sa réalisatrice et de son actrice principale. 

- Dior Sow

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La Danseuse le Film

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