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À table avec Solange

Solange nous propose un nouvel hymne musical pour la cause Afro-Américaine.

Webmestre, Le Délit

Le 30 septembre dernier sortait A Seat at the Table, troisième album studio de Solange Knowles. 51 minutes pendant lesquelles nous sommes invités à nous asseoir à table avec Solange, sa famille, et ses amis. Elle fait ainsi référence à la culture afro-américaine où la table est vue comme lieu commun, un endroit où la famille se réunit le soir et partage les gains de la journée. Solange nous invite donc à partager, écouter et explorer sa féminité, ses luttes, ses peines, ses joies, et surtout sa réalité en tant que femme de couleur. 

Un engagement social à travers l’art

La mobilisation pour la cause des Noirs aux États-Unis est récurrente dans les médias, et pour cause : brutalité policière, incarcération de masse et racisme systémique ne sont qu’une partie des fléaux touchant les Africains-Américains. L’album de Solange nous offre donc une nouvelle forme de mobilisation : une mobilisation par l’art.

C’est un album d’activiste et il ne s’en cache pas. Solange le dit elle-même, c’est un album « pour les femmes noires fait par une femme noire » . Chaque morceau adresse à sa manière une question affectant la communauté afro-américaine, et plus particulièrement les femmes.

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Carlota Guerrero

Le meilleur exemple est le fameux « Don’t Touch My Hair », une des chansons les plus médiatisées de l’album. Cette chanson qui pose la question des cheveux afro et la façon dont beaucoup (de blancs) se pensent autorisés à les toucher comme une attraction touche toutes les femmes de couleur d’une façon ou d’une autre. Cette chanson envoie aussi un message fort qui replace les cheveux en tant que partie intégrante de la femme noire. À travers ce morceau, Solange réaffirme son identité et celle des femmes noires avec fierté et dignité.

For Us By Us

Cependant cet album n’est pas qu’une célébration de la beauté noire, c’est aussi un album qui valorise la culture afro-américaine et qui ne s’en excuse pas. Il offre enfin un espace à des personnes qui ont trop souvent été réduites au silence et oubliées. Dans une culture dominée par le regard blanc, que ce soit au niveau de la mode, au niveau institutionnel, ou encore politique, A Seat at the Table rend hommage à la culture noire, et les personnes constituant cette culture. C’est un espace où la culture dominante n’a pas sa place, elle est invitée à écouter et c’est tout. 

Les chansons comme Mad (avec Lil Wayne), F.U.B.U. (avec The-Dream, et BJ The Chicago Kid), ou encore Don’t You Wait font partie de ces chansons dans lesquelles Solange ne s’excuse pas d’être noire. Mad valide les sentiments des Africains-Américains d’être mad (fâché, ndlr) et ce, peu importe le point de vue de la culture dominante sur la question. F.U.B.U de son côté est vraiment un hymne noir, qui valorise la personne Noire, c’est une chanson « For Us, By Us » qui ne laisse aucune place aux autres. À travers ce morceau, le « N‑word » est explicitement utilisé dans l’objectif de créer un espace réservé aux personnes noires. Effectivement, les personnes blanches ont comme « devoir » de ne pas utiliser ce mot lié au passé colonial. En effet, elle chante : « don’t feel bad if you can’t sing along / just be glad you got the whole wide world » (ne te sens pas mal de ne pas pouvoir chanter, mais soit content d’avoir le monde entier pour toi), faisant référence à ce mot et à la prépondérance de la culture dominante. Cette idée est récurrente dans son album, un album noir pour les noirs. Avec Don’t You Wait, Solange adresse ses critiques à propos du succès de son dernier album — succès porté par un public majoritairement blanc. Elle affirme qu’il ne faut pas attendre d’elle qu’elle chante sur les mêmes sujets qu’avant, surtout dans ces moments où la cause des afro-américains est si importante.

Dans une culture dominée par le regard blanc, que ce soit au niveau de la mode, au niveau institutionnel, ou encore politique, A Seat at the Table rend hommage à la culture noire, et les personnes constituant cette culture.

Les interludes, aussi importants que les morceaux dans l’expérience musicale et artistique offerte par l’album, appuient cette dimension de valorisation et validation de la culture noire. En effet, plusieurs artistes sont invités dans ces interludes comme les parents de Solange, Master P, ou encore Kelly Rowland. Ces interludes permettent aux auditeurs de mieux comprendre les chansons, mais offrent aussi un espace à des personnalités noires pour exposer leurs expériences, et ainsi mieux compléter cet album. Par exemple, dans Tina taught us, Tina Knowles, la mère de Solange, raconte comment sa fierté d’être une femme noire était vu à tort comme du « racisme anti-blanc » alors qu’elle le dit elle-même, célébrer la culture noire ne veut pas dire rejeter la culture blanche.

A Seat at the Table résonne fort aujourd’hui car il n’attend pas la validation du Blanc pour exister. Il redéfinit les codes et la place des Afro-Américains dans le contexte actuel, et offre une nouvelle façon de s’engager. 


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