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L’aide sociale en danger au Québec

Le projet de loi 70 précarise la situation des jeunes.

Une loi est en préparation à l’Assemblée nationale du Québec, et elle n’augure rien de bon. Baptisé « Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l’emploi ainsi qu’à favoriser l’intégration en emploi », le projet de loi 70 est en réalité bien plus problématique que sa description ne laisse présager : alors qu’il promet une meilleure réinsertion dans la vie active pour les bénéficiaires de l’aide sociale, ce projet représente en réalité un véritable risque de mise à la rue desdits bénéficiaires.

Réduire l’aide sociale aux personnes en détresse

Le principal objet de discorde dans cette loi se trouve dans le Chapitre V « Programme Objectif Emploi », et se présente ainsi : « 83.1. Toute personne visée par règlement qui aurait droit de bénéficier d’une prestation en vertu du Programme d’aide sociale […] doit d’abord participer au Programme objectif emploi. » De plus, la loi stipule au paragraphe 83.4. que « le participant est tenu d’accepter tout emploi convenable qui lui est offert ». Aujourd’hui, une personne bénéficiant de l’aide sociale doit déjà survivre avec 623$ par mois. Le projet de loi 70 promet de couper de moitié cette aide sociale si le bénéficiaire ne peut pas prouver qu’il fait partie d’un programme de formation ou s’il refuse un emploi « convenable ». 

De nombreuses associations et organisations ont hurlé au scandale et ont très efficacement démontré les nombreux problèmes que présente cette loi. Grâce à elle, le gouvernement québécois et son nouveau ministre de l’Emploi et de la Solidarité Sociale, François Blais, espèrent économiser 50 millions de dollars. M. Hamad, son prédecesseur, était conscient des conséquences d’un tel projet, surtout pour les jeunes de moins de vingt-neuf ans, déjà dans une situation plus que précaire. Mais il assurait que grâce à cette loi les jeunes bénéficieraient « des cours, des études et de l’accompagnement » nécessaires.

Un gouvernement qui abandonne sa jeunesse pauvre

Voici donc le prix de 50 millions de dollars économisés : couper l’aide sociale de moitié, c’est condamner les jeunes à une vie dans la rue et à une vie d’itinérance. D’une certaine manière, ce projet présume qu’une personne bénéficiant de l’aide sociale a en réalité (et depuis toujours) le choix d’aspirer à une vie meilleure. C’est presque trop simple : il suffit d’un emploi. 

En somme, cette loi est complètement détachée de la réalité. Cécile Arbaud, la directrice générale de « Dans la Rue », une ONG montréalaise visant à aider les jeunes en situation de détresse et d’itinérance, a prit le temps de critiquer cette loi dans le Huffington Post Québec. Selon elle, ce projet ne prend pas véritablement en compte la situation des jeunes. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les jeunes ont besoin de cette aide : « la détresse psychologique, la dépendance, les troubles de la santé mentale, le manque de support social ou familial. » Ce projet de loi n’est rien d’autre qu’un acharnement sur les pauvres, plutôt qu’une solution à la pauvreté elle-même. Il marginalise des groupes déjà à risques, dans l’espoir vain de les « responsabiliser ». Avec ce projet, l’État promet de se détacher de son devoir de protection de sa population. 

Comme Mme Arbaud l’explique : « La simple tâche de remplir et finaliser la demande est un défi, pour qui n’est pas hyper organisé ou équipé pour affronter le langage et les exigences des fonctionnaires. » En plus de cela, certains programmes de formation ne sont pas reconnus par l’État, ce qui en d’autres termes veut dire que des jeunes participant à des formations seront récompensés par une coupe radicale de leur aide sociale. 

Abandon plus que motivation, les critiques de cette loi ont soulevé des questions très importantes, qui font de cette loi le coup de grâce envers les plus démunis. À l’heure actuelle il n’y a pas assez d’emplois pour tous les demandeurs. Un excès de demande peut pousser à des abus de la part des patrons, qui pourront alors prendre avantage du fait que le gouvernement n’ait pas défini ce que représente un emploi « convenable ». Les deux cibles principales de cette loi, les femmes et les jeunes, se feront jeter à la rue par leur propre État. 


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