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Marche dénonciatrice

Une manifestation autochtone qui sert de tremplin pour critiquer le gouvernement.

Éléonore Nouel

La 9e marche et veille pour les femmes disparues et assassinées s’est déroulée le samedi 4 octobre dernier. C’est en scandant divers slogans contre les abus commis à l’égard des femmes autochtones que quelques centaines de manifestants ont défilé de la Place Émilie-Gamelin au parc des Amériques sur le boulevard Saint-Laurent. Selon un rapport de la Gendarmie royale du Canada (GRC) publié en mai dernier, 1181 femmes des Premières Nations ont disparues ou ont été assassinées entre 1980 et 2012. Des manifestations similaires ont eu lieu dans bon nombre de villes en cette fin de semaine.

L’événement a commencé avec un discours du collectif Justice pour les femmes autochtones disparues et assassinées, plus souvent appelé Missing Justice, rappelant que l’événement prend place sur le territoire mohawk. L’organisme vise à sensibiliser le public à la violence et à la discrimination contre les femmes autochtones québécoises. Pour Monica van Schaik, l’agent de liaison médiatique de Missing Justice, le but de la manifestation était de « sensibiliser le public à ce problème, et d’exposer comment le gouvernement fédéral refuse de faire enquête et d’écouter les revendications des communautés amérindiennes ». Elle explique que cette marche marque le début de la Marche mondiale des femmes, et que c’est la première fois que le collectif coorganise l’événement avec Femmes Autochtones du Québec, qui collabore également avec Amnistie internationale depuis dix ans. 

La semaine dernière, à la Colline du Parlement à Ottawa, le rapport d’Amnistie internationale On a volé la vie de nos sœurs, rédigé il y a dix ans, a été publié. Il énumère les sources, incluant les causes criminelles, mais aussi économiques et sociales, qui contribuent à ce problème. Un représentant d’Amnistie internationale remarque le grand nombre de participants cette année, et annonce au Délit «[qu’il] y a plus de conscience des femmes autochtones disparues et assassinées. Sur un niveau international, on s’est tenu devant le Comité de l’ONU contre la torture pour éliminer la discrimination raciale et sexiste ainsi que devant plusieurs autres comités. De nombreuses organisations internationales, dont les Nations unies, implorent le Canada d’exécuter ses engagements internationaux et de défendre les femmes autochtones au Canada ». 

Missing Justice a élaboré sur ce même thème en déclarant «[qu’une] enquête nationale est importante, mais c’est [primordial] de souligner que nous connaissons la cause de ces violences. La Loi sur les Indiens de 1876 [qui définit encore aujourd’hui les droits et le statut des Premières Nations au Canada, ndlr], […] a compromis la sécurité et le bien-être des femmes autochtones au Canada. Nous devons changer l’attitude apathique […] des policiers et des politiciens, et exiger une enquête et un plan d’action national. Ça doit être enseigné à chaque école, et ça doit être obligatoire que les politiciens soient sensibilisés culturellement ». 

Jacinthe Gagnon, une militante du Nouveau Parti démocratique (NPD), est partisane des droits autochtones et a participé à sept des neuf marches. « Les autorités tirent des conclusions hâtives et supposent que ces femmes se sont enfuies de leurs maisons, ou qu’elles sont des prostituées, ivrognes, etc. Il y a beaucoup de racisme envers les femmes autochtones, et beaucoup d’idées préconçues. Ce n’est pas juste ». Elle affirme qu’elles ne peuvent pas travailler, posséder leurs territoires ou emprunter de l’argent, et que les lois envers les Premières Nations sont souvent injustes. Elles contribuent même à un cercle vicieux de pauvreté. « Le pire, c’est que les autorités le considèrent normal. Si c’est une jeune femme blanche du Québec qui s’est enfuie et a disparu, les autorités s’impliquent. On parle [d’elles] chaque année, mais pas des femmes autochtones qui disparaissent de leurs maisons. »


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