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Le taureau et lui

Toro y moi s’invite à la SAT pour un concert plutôt commun.

Éléonore Nouel

Le taureau, c’est sa musique. Lui, c’est Toro y moi. Né en 1986, ce jeune musicien originaire de Caroline du Sud était de passage à la Société des Arts Technologiques (SAT) samedi. Aux dires des spectateurs, une étape à Montréal semblait la bienvenue dans le cadre de la tournée nord-américaine de l’artiste qui prendra fin le 10 novembre à Vancouver.

Emma, étudiante à l’UQAM, raconte au Délit avant l’entrée en scène de l’artiste : « J’écoute sa musique depuis qu’il a commencé et j’aime beaucoup son style. Quand j’ai su qu’il passait ici, il n’a pas fallu me forcer pour acheter mon billet. »

Dans la petite salle remplie d’une centaine de personnes, on s’attendait donc à un rassemblement jovial entre un musicien et ses fans, entre un toréador et son audience.

La première partie du spectacle est assurée par le groupe indie rock The Sea and Cake, composé de trois quadragénaires ainsi qu’un quinquagénaire américains. Leur musique est étudiée, sans faille et semble plaire à la salle, pourtant nettement plus jeune que le quatuor. Leur expérience se fait ressentir et le public apprécie les talents d’un batteur enjoué et d’un chanteur tranquille.

Vers vingt-deux heures, Toro y moi et ses quatre musiciens prennent le relais. Ce dernier entame sa prestation par « So Many Details », chanson harmonieuse issue de son album Anything in Return sorti en janvier. Le rythme est soutenu, le son est puissant et la mélodie ferme. Cependant, leur manque d’expérience contraste avec celle du groupe qui les a précédés et Toro y moi nous livre quelque chose de plus flou, moins détaillé.

À l’image de la coiffure afro impressionnante du chanteur, les chansons sont explosives et légèrement désordonnées. Cela dit, la délicatesse de sa voix et la technicité d’un « Rose Quartz » ou d’un « Still Sound » font forte impression. Le taureau est lancé, l’arène applaudit.

On note également une parfaite synchronisation entre la musique et les jeux de lumières. La qualité du son est excellente et le service irréprochable. La Société des Arts Technologiques remplit donc admirablement son contrat d’hôte et peut porter son nom haut et fort.

L’ambiance, néanmoins, est loin de celle que l’on peut trouver dans une corrida madrilène un joli jour de juillet. Le public est attentif et complaisant. Certains spectateurs s’adonnent à quelque pas de danse endiablés lorsqu’une de leur chanson préférée retentit, mais le tout reste frileux. L’ouïe est satisfaite mais le cœur n’y est pas. D’ailleurs, pas de rappel lorsque les ultimes notes du dernier morceau retentissent dans la pièce. Toro y moi nous dit : « Goodbye Montréal » à travers son microphone et nous lui rendons la pareille.

Chaleureuse mais sans extravagance, la représentation donnée par l’artiste émergeant et plein de potentiel ne dégageait cependant pas la puissance d’une corrida bien rôdée. Le manque de soleil en cette fin d’octobre est une explication possible, une musique encore naissante en est une autre, un public paisible une dernière. Malgré tout, le taureau vit encore, et on suivra de près son chemin vers le déclin, ou la gloire.


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