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Neuilly sa mère

Petites histoires de grands vandales

14 heures de garde à vue pour avoir tagué un mur bien vilain près de la gare de la ville où j’habitais. Mon ami et moi n’en revenions pas : nous, deux adolescents de seize ans à la mèche impeccable, polo Ralph Lauren sur les épaules, étions désormais ex-taulards classés dans les fichiers de la Police nationale. En sortant j’avais presque envie de dire au capitaine qu’il y a une légère différence entre une bombe de peinture et une bombe nucléaire.

À travers cette petite anecdote, j’aimerais attirer votre attention sur le débat incessant concernant la légalité du graffiti, les limites que l’on se doit d’imposer à ce genre d’expression artistique et celles qui, selon moi, n’ont pas lieu d’être. Effectivement, quand on sait que la ville de Montréal dépense plus de quatre millions de dollars par an pour le nettoyage de graffiti, deux questions se posent : ce nettoyage en vaut-il vraiment la peine ? Que pourrait-on faire avec cet argent à la place ? À la première, je dis oui. Je peux vous assurer que si rien n’était fait, la ville serait couverte de coups de marqueur et qu’il serait difficile d’y voir clair. Sans oublier les particuliers qui voient leur garage vandalisé.

Cependant, certains nettoyages opérés sur des murs délabrés ou sur de superbes fresques me désolent. J’ai notamment en tête une magnifique machine à sous tagguée dans un hangar de notre métropole et datant de 1991 qui vient d’être « toyée » [repeinte NDLR]. C’était un bijou, c’était une merveille. Et encore, Montréal est loin d’être un enfer en ce domaine. La ville de Paris fait preuve d’une véritable obsession en la matière pour essayer de décourager de futurs graffeurs.

À la seconde question, je me disais qu’il pourrait être intéressant de payer de bons street artists pour recouvrir des tags sans intérêt ou embellir de grands murs en béton immondes. Idéaliste, me direz-vous ? Peut-être. Mais ce genre d’artiste n’est pas connu pour rouler sur l’or et « il faut combattre le mal par le mal ».

Pour terminer, je dois dire que les mesures légales prises concernant le graffiti me dépassent un peu. Le montant des amendes est généralement exorbitant et beaucoup de graffeurs se voient ouvrir un casier judiciaire, ne serait-ce qu’après quelques tags illégaux. En ce qui me concerne, j’en suis sorti indemne, car le mur que nous avions peint appartenait à une enseignante en arts plastiques qui a décidé de ne pas porter plainte, malgré l’insistance – à mon goût vicieuse – des policiers. Bien que cela se limite à un cas particulier, j’ai entendu des histoires bien pires concernant le traitement réservé aux graffeurs et la proportion démesurée entre leurs méfaits et les conséquences judiciaires.


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