Aller au contenu

Usually Beauty Fails

Le Beau selon Frédéric Gravel

« La beauté, on la cherche même si on sait qu’elle échoue, on aimerait qu’il y ait une vérité mais c’est subjectif. » Avec Usually Beauty Fails, Frédéric Gravel veut nous débarrasser de la partie superficielle de la beauté afin d’en toucher l’essence dans les relations humaines. En effet, son spectacle projette l’incapacité humaine à vivre simplement la beauté et met en question cette quête universelle. Dans la continuation de Gravel Works et Tout se pète la gueule, chérie, le danseur-musicien-chorégraphe a pris l’option d’une danse légère et d’une mise en scène qui assume avec entrain son étiquette de « concert chorégraphique ».

On entre dans une salle à l’éclairage déjà tamisé sur une musique électro aux basses saisissantes qui font monter la tension dans la salle. Les huit interprètes, musiciens et danseurs (dont Gravel), sont déjà sur scène. Le spectacle a déjà commencé. En effet, le regard prenant des danseurs sur le spectateur intègre ce dernier dans la performance où il devient sujet d’envoûtement. S’établit ainsi un jeu réciproque de séduction entre la scène et son public.
Cette performance contemporaine atypique, où la place du musicien est aussi importante que celle du danseur, est une succession de numéros, comme des saynètes de théâtre, avec une diversité de genres musicaux allant de l’électro au baroque. Les musiciens mènent parfois leur propre show et sont mis en avant tandis que les danseurs se contentent de les accompagner. Frédéric Gravel change allègrement de casquette en jonglant ainsi entre les rôles de danseur, musicien et humoriste au fil des numéros.

Le chorégraphe réserve l’un de ces numéros pour faire honneur au mythe du rockeur. Il se met en spectacle et orchestre une danse charnelle et frénétique interprétée par ses cinq compagnons. La scène s’achève sur ces derniers qui affrontent le public en leur exposant leur nudité crue. Un contraste criant avec la scène qui s’ensuit. Au son d’une musique printanière, dans un jeu à la Vaudeville, le couple découvre et se découvre. Une rencontre dénudée homme-femme pleine de poésie. Un jeu sans séduction, presque naïf en comparaison avec l’exhibitionnisme, voire même le voyeurisme des nus de la scène précédente.
Usually Beauty Fails met en avant ces mécanismes de séduction systématique représentatifs des rapports humains ; une séduction qui se veut adulte mais qui reste maladroite, inappropriée et proche du ridicule. Frédéric Gravel exacerbe le décalage entre les acteurs de ces jeux de séduction de manière humoristique et légère, laissant au spectateur la liberté d’interpréter. En effet, c’est le but que s’est donné Gravel dans cette pièce : « Le défi est de laisser les gens créer du sens, plutôt que de vouloir en créer nous-même absolument. »
Notre unique reproche serait la tentative de scène finale allongée. Frédéric Gravel exprime au public qu’il a voulu se « renouveler », mais en fin de compte, cela n’ajoute pas tant à l’appréciation de ce dernier numéro. 


Articles en lien