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Newburgh le retour

L’ancien président exige la liste des 21 000 membres de l’AÉUM.
L’exécutif contraint par la loi de s’exécuter.

Webmestre, Le Délit | Le Délit

Dans son rapport au Conseil législatif, Maggie Knight, présidente de l’AÉUM (SSMU) a expliqué jeudi dernier avoir reçu une requête de la part « d’un membre » de l’Association étudiante lui demandant de produire une liste des quelques   21 000 étudiants adhérents ainsi que leur adresse.

À la demande d’un élu, la présidente a révélé l’identité de la personne à l’origine de la demande. L’étudiant n’est autre que de Zach Newburgh, l’ancien président de l’Association (2010–2011) qui avait été formellement blâmé par le conseil législatif pour ce qui se révéla être l’un des plus gros conflits d’intérêts que l’AÉUM eût connu ces dernières décennies.

Zach Newburgh avait accepté pendant son mandat une compensation financière pour un emploi auprès de Jobbook, une start-up qui cherchait par ailleurs à faire affaire avec l’association qu’il présidait, l’AÉUM. En outre, Zach Newburgh avait voyagé lors de son mandat pendant ce qu’il qualifiait comme étant son “propre temps libre” pour vendre le concept jobbook à d’autres présidents d’association au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Il a été révélé par la suite que le président avait également utilisé son adresse de courriel president@​ssmu.​mcgill.​ca pour entrer en contact avec les autres leaders étudiants et qu’il avait fait usage de sa position de président de l’Association étudiante de McGill pour arranger des rendez-vous avec eux. Le président de l’association des étudiants de Princeton avait regretté la façon dont Monsieur Newburgh avait « prétendu vouloir parler de vie étudiante » et avait utilisé l’intégralité de la rencontre pour « vendre » Jobbook.

Ayant été à la tête de l’AÉUM, Zach Newburgh connaît bien le fonctionnement de l’Association et il entend faire plein usage de la loi sur les corporations canadiennes qui s’applique à l’association des étudiants de premier cycle de McGill. Cette loi permet à « toute personne […] d’obtenir, d’une compagnie […] dans les dix jours […], une liste indiquant les noms de toutes les personnes qui sont actionnaires de la compagnie […] et leur adresse » (chapitre C‑32, Article 111.1). En l’occurrence, les noms et adresses physiques personnelles de 21 000 étudiants de McGill.

Maggie Knight explique que sa première réaction a été la surprise. « Autant que je sache, l’AÉUM n’avait jamais reçu une telle requête. » Elle a également fait part de sa préoccupation vis-à-vis du respect de la vie privée par une personne qui n’est pas assujettie aux mêmes niveaux de confidentialité que les responsables de l’AÉUM ou les employés de McGill amenés à traiter des données personnelles.

Micha Stettin, conseiller représentant les étudiants de la Faculté des Arts auprès de l’AÉUM trouve la demande « pour le moins inquiétante ». « Ce n’est pas parce que la loi l’autorise que c’est pour autant acceptable. Les implications de cette affaire sont effrayantes. »

Maggie Knight prévient : « Il nous faut réaliser que la demande de Zach crée un précédent pour la manière dont l’AÉUM traitera toute éventuelle demande future. »

Certains conseillers s’inquiétaient en effet des conséquences potentielles si l’AÉUM devait commencer à accéder à ce genre de requête. Un certain nombre d’étudiants sont employés par des entreprises cherchant pour les unes à promouvoir leurs produits, pour d’autres à recruter de futurs diplômés. Une telle liste a une valeur commerciale conséquente et attire les convoitises.

Se pose donc la question de l’usage des données. La loi prévoit que quiconque se sert de cette loi « aux fins de communiquer à des actionnaires des renseignements relatifs à des marchandises, des services, des publications » est passible « d’une amende d’au plus mille dollars [et/ou] d’un emprisonnement d’au plus six mois ».

À cet effet, la présidente de l’AÉUM a donc exigé de Zach Newburgh une lettre garantissant que les données ne seront utilisées qu’aux fins prévues par la loi.

Maintenant que l’équipe exécutive a porté l’affaire sur la place publique et que Newburgh est au centre de l’attention, il semble difficile d’imaginer qu’il tente de faire un usage illégal de ces données. Outre la présentation des faits par la présidente au conseil législatif, les dirigeants de l’AÉUM étudient actuellement la potentielle légalité de l’envoi d’un courriel à tous les étudiants leur signalant que leurs informations personnelles sont sur le point d’être communiquées à Zach Newburgh.

La start-up Jobbook serait-elle la finalité de la requête de Zach Newburgh ? Difficile à dire, l’intéressé refusant de répondre à nos sollicitations tout comme à celles du Tribune et du Daily. Selon ce dernier, quand Maggie Knight lui a demandé quel usage il souhaitait faire de la liste, il a répondu que la question n’était pas pertinente.


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