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Porno Manifesto : sans complexe

Dans Porno Manifesto, Ovidie transgresse tous les tabous et traite sans gêne ni culpabilité du monde pornographique.

Ovidie, figure bien connue en France, ne supporte plus la gêne des journalistes qui la présentent en évoquant son discours intellectuel, sa démarche quelque fois féministe ou encore ses études en philosophie. Elle commence d’ailleurs son témoignage en réaffirmant avec assurance le métier qu’elle exerce : « Je suis une travailleuse du sexe ». Il est vain d’y chercher les raisons qui expliqueront son choix de carrière ou qui excuseront le fait qu’elle traite ainsi de sexualité. Elle oeuvrait et oeuvre toujours dans le milieu de la pornographie.

Porno Manifesto se veut une réponse aux maintes critiques qui s’opposent à la représentation de la femme-objet dans les films pour adultes. Dans ses jeunes années, l’auteure a même fait partie des groupes féministes qu’elle dénonce, le revirement de situation étant survenu lorsqu’elle a vu un film pornographique pour la première fois. Désirant elle aussi incarner l’image forte et assumée que ces femmes y présentaient de leur corps et de leur sexualité, elle a dès lors décidé de devenir actrice porno.

Ovidie s’efforce d’abord de réfuter tous les reproches adressés à l’endroit du marché de la pornographie, dont le plus redoutable concernerait l’illégalité de certaines de ses pratiques. À cette accusation, voulant que les actrices soient pour la plupart des mineures et que leurs films encouragent, par conséquent, la pédophilie, l’auteure répond que la moyenne d’âge des actrices est en fait de 25 ans et que le fantasme motivant la production des films X n’implique que des adultes entre eux. La paranoïa qui règne dans le milieu et la peur de recevoir une interdiction de diffusion amène justement les producteurs à prendre, selon elle, maintes précautions concernant l’âge et l’apparence des acteurs. Sans jamais basculer dans la fiction, Porno Manifesto dresse un portrait inédit du monde de la pornographie par un regard vigoureusement critique de l’aspect bien moralisateur du « monde extérieur ».

Ovidie, qui reconnaît être elle-même une spectatrice passionnée de films pour adultes, expose dans son oeuvre les difficultés qu’entraîne son statut de pornstar. Elle permet aussi à d’autres protagonistes du milieu de faire valoir leur opinion sur le métier et sur la perception de celui- ci dans la vie publique. Il est alors possible de découvrir cet univers à travers des gens « d’expérience » ayant une connaissance accrue de la culture du X.

Guidé par la plume d’une femme qui prend la parole autant dans ses livres que dans ses films, le lecteur ne regrettera pas d’avoir outrepassé tant de tabous et d’interdits pour mettre à nu un univers souvent jugé mais peu sondé.


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