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C’est reparti de plus belle !

Réunis en assemblée générale le 6 février, les membres de l’AFESH-UQÀM se sont positionnés en faveur du déclenchement d’une grève générale illimitée dès le 11 février.

Outre contester la hausse des frais de scolarité affectant l’ensemble des universités québécoises, la grève de l’Association facultaire étudiante des sciences humaines de l’UQÀM (AFESH-UQÀM) s’inscrit dans le contexte de la situation financière particulièrement difficile à laquelle l’UQÀM est confrontée. Suite à des investissements immobiliers expansionnistes, l’UQÀM s’est trouvée aux prises avec un déficit de l’ordre de 300 millions de dollars. Bien que le gouvernement du Québec en éponge une partie, l’UQÀM doit adopter un plan de restructuration visant à rééquilibrer son budget.

Dans sa lutte actuelle, l’AFESH-UQÀM défend trois revendications : l’abolition du plan de redressement financier de l’UQÀM, qui se traduirait par un réinvestissement massif du gouvernement québécois, la révocation de la hausse des frais de scolarité et l’instauration d’un réseau de garde public, accessible et adapté aux besoins des parents-étudiants.

Le plan de redressement, auquel l’AFESH-UQÀM s’oppose, compte notamment diverses mesures qui réduiront les services offerts à la population étudiante, des hausses de frais de scolarité et des réductions dans les salaires et conditions générales des employés de l’UQÀM. « Les mesures du plan de redressement menacent carrément la capacité de l’UQÀM de poursuivre sa mission éducative ; il est de notre devoir de la défendre », affirme Étienne Guérette, secrétaire aux affaires uqamiennes de l’AFESH-UQÀM.

La grève illimitée, qui a pris effet lundi dernier, fait suite à un débrayage de dix jours tenu la session dernière, articulé autour des mêmes enjeux –le plan de redressement de l’UQÀM, le sous-financement des universités québécoises et la hausse des frais de scolarité.

Suite à l’échec relatif de cette dernière grève, un certain doute planait chez les étudiants quant à la pertinence de se réengager dans une telle entreprise. « Pour l’instant, le mouvement manque d’ampleur, ce n’est pas assez solide pour ce qui est revendiqué. J’ai l’impression que le moyen de la grève est un peu épuisé, il faudrait le renouveler. Mais d’un autre côté, c’est le seul moyen efficace que l’on a », exprime Audrey Chaussé-Généreux, étudiante en travail social et membre de l’AFESH-UQÀM. L’assemblée générale a donc adopté un plan d’action détaillé visant à accentuer la pression à la fois sur l’administration de l’UQÀM et sur le gouvernement du Québec.

Outre la manifestation accompagnant le déclenchement de la grève ayant eu lieu lundi dernier, le plan d’action inclut notamment une audience publique sur le plan de redressement le 13 février —à laquelle le recteur de l’UQÀM, Claude Corbo, a été convié—, ainsi qu’une manifestation intersyndicale le 19 février. De plus, l’AFESH-UQÀM se propose de relever à nouveau le défi de l’Université populaire à Montréal (UPÀM), une série de conférences et d’ateliers sur des enjeux de société. L’UPÀM avait connu un franc succès lors de la grève de l’automne dernier.

Selon Alex Bourdon-Charest, l’objectif de ce déclenchement rapide d’une grève est entre autres de créer un effet d’entraînement. « Historiquement au Québec, dans l’éducation, la grève est ce qui a permis d’avoir le plus de gains, affirme-t-il. L’UQÀM a été créée suite à une mobilisation étudiante et si on a les frais les moins élevés en Amérique du Nord, c’est parce que des gens se sont battus avant nous ».

Une partie des revendications de l’AFESH-UQÀM est donc centrée sur la situation spécifique à l’UQÀM, mais d’autre part on cherche à créer un mouvement national pour contrer la hausse des frais de scolarité. « On ne cible pas uniquement l’UQÀM parce que ce que l’on combat, c’est une logique de marchandisation et de rentabilité qui a cours partout au Québec. Ça culmine à l’UQÀM, mais c’est une logique globale », poursuit Alex Bourdon-Charest. Trois autres associations facultaires de l’UQÀM tiendront des votes de grève au courant de la semaine. L’Association facultaire des étudiants en science politique et droit (AFESPED) et l’Association facultaire des étudiants en lettres, langues et communication (AFELLC) ont voté contre la grève hier lundi. Les membres de l’Association Facultaire des Étudiants en Arts (AFEA) voteront en assemblée jeudi.

Quant à savoir si l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ), qui regroupe dix-sept associations membres, emboîtera le pas au mouvement de grève initié par l’AFESH-UQÀM, il faudra attendre la tenue de son Congrès national les 16 et 17 février prochain. L’ASSÉ a toutefois déjà prévu une manifestation nationale à Québec le 21 février.

Pour sa part, la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) cible ses efforts sur le dossier des frais afférents [voir ci-dessous]. Alors que le gouvernement du Québec prévoit adopter prochainement une politique visant à encadrer les frais afférents, la FEUQ mobilise ses énergies pour convaincre la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) d’adopter rapidement des mesures restrictives. « Aucun moratoire n’a été imposé aux universités par le gouvernement et les frais explosent alors même qu’une consultation a eu lieu et qu’une politique est en cours d’adoption », dénonce Jean-Patrick Brady, président de la FEUQ. « Nous espérons que le gouvernement agira vite, et surtout que sa politique aura la force nécessaire pour empêcher les administrations d’imposer des frais injustifiables sans l’accord des étudiants ! », souhaite-t-il.

À propos des frais afférents

Que sont les frais afférents ? Ce sont tous les frais autres que les droits de scolarité imposés aux étudiants, qu’il s’agisse de frais institutionnels établis par les universités ou de frais déterminés par les associations étudiantes (cotisations). Ils peuvent être obligatoires, facultatifs, répétitifs, ponctuels ou avoir un caractère pénal, comme les suppléments de retard imposés par une bibliothèque.
Lors de l’élection de 2007, le gouvernement s’est engagé à encadrer les frais institutionnels obligatoires, après discussion avec les associations étudiantes et les universités. C’est dans cette perspective, en juin dernier, que la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport, Michelle Courchesne, a annoncé qu’elle soumettrait bientôt une proposition pour encadrer les frais institutionnels obligatoires dans les universités. Le MELS a tenu en automne dernier une consultation en ligne sur le sujet, lors de laquelle l’AÉUM a soumis un mémoire en faveur d’un encadrement plus strict des hausses de frais afférents.

Bien que les associations étudiantes appuient massivement l’adoption d’une politique-cadre dans ce dossier, une résistance persiste du côté de l’administration des universités francophones. On craint qu’une telle politique contribue à creuser l’iniquité entre les universités francophones, dont les frais sont généralement plus bas, et les universités anglophones, qui affichent les frais les plus élevés au Québec. C’est du moins l’avis du vice-recteur exécutif de l’Université de Montréal, Guy Breton.


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