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Exposition sur l’histoire de l’activisme LGBTQIA2S+ à McGill

Une collection d’archives relate l’histoire de l’activisme queer à McGill.

Alexia Leclerc | Le Délit

Le 27 octobre dernier, dans une salle pratiquement comble de la section Livres rares et collections spéciales (ROAAr) de la bibliothèque McLennan, a eu lieu le vernissage de l’exposition sur l’activisme de la communauté LGBTQIA2S+ à l’Université McGill, du milieu du 20siècle jusqu’à aujourd’hui. Cette exposition met en scène une panoplie d’archives qui relate l’histoire de l’activisme LGBTQIA2S+ sur le campus. En plus d’être exposée au premier étage de la bibliothèque McLennan, l’exposition est accessible en ligne sur la plateforme airtable pour une durée de dix ans au moins.

Les portes des Livres rares et Archives ouvertes

L’instigatrice du projet, Dre Alexandra Ketchum, chargée de cours à l’Institut sur le genre, la sexualité et les études féministes de McGill (Institute for Gender, Sexuality, and Feminist Studies ou IGSF, ndlr) et son assistant de recherche et étudiant au premier cycle à l’Institut, Jacob Williams, en compagnie de ses co-commissaires, incluant entre autres les Archives lesbiennes du Québec, Queer McGill, les Archives gaies du Québec et la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), ont organisé un vernissage pour aller à la rencontre de la communauté et lui présenter le projet. « L’objectif de cette exposition est non seulement de mettre en valeur les collections d’archives, mais aussi de les rendre plus accessibles et de briser les barrières entre la communauté et cet espace de la bibliothèque. Le quatrième étage [de la bibliothèque] étant fermé, ce vernissage est une façon d’ouvrir les portes et de le rendre moins effrayant », a débuté Dre Ketchum lors de sa présentation du projet au public. « Je souhaite que les chercheur·se·s et les étudiant·e·s puissent connaître les ressources qui sont à leur disposition et que ça puisse les inciter à en profiter », a‑t-elle ajouté.

Mettre en valeur la force et la résilience

En entrevue avec Le Délit, Dre Ketchum a expliqué sa démarche de création du projet. Son émergence est motivée par deux raisons principales. D’abord, la pandémie a étiolé les liens existants entre les étudiant·e·s, les organisations, le personnel, et le corps enseignant sur le campus. D’ailleurs, les nouveaux·lles étudiant·e·s avaient moins de ressources pour apprendre à connaître les organisations, les ressources et les services sur le campus durant cette période. Ensuite, la professeure souhaitait mettre en valeur la force et la résilience des activistes tout en célébrant la joie queer (queer joy) sur le campus. À ces deux raisons s’ajoute la frustration exprimée par Dre Ketchum face au manque de ressources concernant l’histoire queer à McGill. Le mandat des Archives de McGill se limite à l’histoire institutionnelle, laissant ainsi de côté les archives étudiantes, fait ressortir Dre Ketchum. D’ailleurs, les discours institutionnels de diversité, d’équité et d’inclusion tendent à laisser de côté les expériences queers sur le campus, ajoute-elle.

« C’est très important de garder une trace et de colliger du matériel sur l’activisme queer pour l’histoire institutionnelle et plus encore »

Dre Alexandra Ketchum

Cumulant plus de 400 heures de travail, la mise sur pied de l’exposition a consisté à collecter le matériel d’archives, à l’examiner, à le catégoriser et finalement à le numériser. Le contenu de l’exposition est séparé en cinq thèmes : programmes académiques ; contre-coups (backlash); joie queer ; événements, organisations et clubs LGBTQIA2S+ ; VIH/Sida et santé. Pour Dre Ketchum, le plus difficile de la recherche résidait dans l’identification des sources d’information. Plusieurs organisations étudiantes ne disposaient pas d’informations à jour, poussant donc son équipe et elle à passer par des connexions personnelles pour accéder aux archives des organisations. Bien que ce travail de recherche ait demandé énormément de travail émotionnel, confrontant parfois les commissaires à des moments douloureux de l’histoire LGBTQIA2S+, il a offert des moments de joie à l’équipe en révélant les efforts, les luttes, le courage et la joie des étudiant·e·s. En plus de collecter les archives, il était important pour Dre Ketchum de rendre l’accès à l’information facile. Ainsi, l’exposition contient des tutoriels pour les chercheur·se·s et enseignant·e·s qui voudraient utiliser le matériel pour leurs cours, ainsi que des questions de recherche pour guider les étudiant·e·s qui seraient intéressé·e·s à mobiliser ces ressources.

Kit, candidat·e au doctorat en communications à McGill, partage son impression de ce projet : « L’exposition en ligne est géniale, car elle nous fait réfléchir aux manières possibles de faire vivre ces ressources au-delà de l’exposition physique. J’aime aussi beaucoup l’onglet “choix des commissaires”, car il aide à naviguer à travers la grande quantité et variété des ressources ».

Reconstituer l’histoire par le travail d’archives

Après le discours de Dre Ketchum lors du vernissage, Jacob Williams, assistant de recherche qui a contribué au projet, a enchaîné sur son expérience de numérisation des archives collectées : « Ce fut une belle expérience de parcourir en profondeur cette histoire dont personne ne se souvient et de la faire vivre à nouveau ». « C’est très important de garder une trace et de colliger du matériel sur l’activisme queer pour l’histoire institutionnelle et plus encore », renchérit Dre Ketchum. Lors de la présentation de sa contribution au projet, Adria Seccareccia, archiviste et bibliothécaire de liaison aux Livres rares et collections spéciales de l’Université McGill, a brièvement détaillé comment ce type de travail d’archives arrive à raconter une version différente de l’histoire : « Le travail d’archivage consiste à tomber sur des histoires documentées de façon non intentionnelle. Dans ce cas-ci, nous ne pouvions pas entrer directement dans l’histoire queer, car elle n’avait pas été écrite. Quelques collections en sont démonstratives, comme les journaux étudiants qui constituent une bonne source pour retracer des versions alternatives de l’histoire de l’Université McGill », a‑t-elle expliqué.

L’exposition à la bibliothèque McLennan est en cours jusqu’au 22 décembre 2022 ainsi qu’en ligne pour au moins 10 ans sur airtable.


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