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AÉUM : Dossier Spécial Élections

Que les jeux commencent.

Luce Engérant

Que les jeux commencent !

Mercredi dernier, dans la salle de bal du bâtiment Shatner, les candidats aux postes exécutifs de l’Association des Étudiants de l’Université McGill (AÉUM) se sont réunis pour les débats médiatiques, lançant ainsi le début de leur campagne. Celle-ci commence d’ailleurs sur les chapeaux de roue, et la presse étudiante déplore qu’au moment des débats, il manque encore une plateforme accessible pour certains candidats.

À la lumière de la candidature, puis du retrait non-officiel puis du retour de M. Simakov au poste de v.-p. aux Affaires externes, on pourrait s’attendre à une période d’élections haute en rebondissements. Toutefois, l’ancien opposant de M. Ibrahim — aujourd’hui président de l’AÉUM — ne s’est même pas rendu au débat, laissant ainsi la parole à M. Aird , que l’on sait désormais officieusement seul prétendant à la couronne des Affaires externes. 

Peu d’opposition

Il est intéressant de remarquer que la plupart des postes sont sujets à une seule candidature. Les seuls sièges qui impliquent une compétition cette année seront ceux de président, et de v.-p. à la Vie étudiante (précédemment v.-p. Clubs et services, ndlr). Lors des débats de mercredi, ce sont donc les seuls qui ont présenté un véritable intérêt et des nouveautés. La pierre angulaire du débat entre les potentiels v.-p. à la Vie étudiante a été la question de leur gestion du temps pour jongler entre l’avancement de la question de la santé mentale sur le campus et le reste des fonctions qui leur incomberaient. Dushan Tripp a mis l’emphase sur la présence de représentants des clubs et services. Son opposante Elaine Patterson, elle, s’est dite confiante en sa capacité à gérer une telle quantité de travail. Mentionnant, par la même occasion, que les difficultés rencontrées par l’actuelle v.-p., Kimber Bialik, s’expliquent par les multiples démissions qu’a vécues l’AÉUM au cours de l’année.

Débat présidentiel

Le mot final a été donné par les deux candidats à la présidence, Ben Ger et Jordan Sinder. Les deux candidats se sont dits opposés à la motion pour amender la constitution afin de bloquer les motions « divisives » lors des Assemblées générales (dont le conseil législatif a discuté pour la première fois le 25 février, ndlr): l’exécutif se doit de rester neutre face aux débats d’ordre politique sur le campus. Ger de conclure : « Je suis entièrement pour la démocratie directe !».

C’était cependant un des seuls points d’accord entre les deux candidats. Quand M. Ger a corrigé M. Sinder qui parlait de la gestion des clubs, lui disant que cette tâche ne relève pas du rôle du président, il a provoqué le départ furieux d’un membre de l’assemblée. M. Sinder en a profité pour relever « le grand problème dans notre institution : les clubs et associations étudiants sont la force directrice du campus », et méritent l’attention de l’AÉUM. ‑Esther Perrin Tabarly


L’étrange campagne d’Alexei Simakov

Le candidat au poste de v.-p. Externe Alexei Simakov s’est retiré de façon officieuse de l’élection du conseil exécutif de l’AÉUM. Dans un message humoristique publié sur sa page Facebook, M. Simakov a ironiquement déclaré vouloir se présenter aux élections présidentielles américaines devant la vague de soutien envers Donald Trump. 

Alors qu’il a souhaité bonne chance à son adversaire David Aird pour l’élection à venir, il ne s’est toutefois pas retiré de la course, selon Elections SSMU, mais ne mène pas campagne pour autant. 

Certains étudiants y voient une tactique électorale de la part de M. Simakov, qui n’en est pas à son premier coup d’éclat dans sa carrière politique étudiante. L’année passée, il s’était incliné avec un écart de 225 voix face à l’actuel président de l’AÉUM Kareem Ibrahim. Il avait décidé quelques temps plus tard de déposer une plainte auprès de la commission juridique pointant les dysfonctionnements du comité des élections de l’AÉUM.

Au semestre dernier, M. Simakov s’était présenté au poste de v.-p. aux Affaires internes de l’AÉUM laissé vacant par Lola Baraldi, démissionnaire. Sa concurrente Céleste Pagniello s’était retirée le matin même de l’élection, et une campagne du « Non » contre M. Simakov avait été organisée dans la foulée par Ben Ger, candidat cette année au poste de président et proche de Kareem Ibrahim.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, un dernier rebondissement dans les élections de cette année a lieu : M. Simakov a publié une lettre ouverte à l’AÉUM sur le site de la version mcgilloise du Tab — une plate-forme dédiée au journalisme étudiant — dans laquelle il dénonce « le cirque SSMU » et la faillite de représentativité de l’Association étudiante. Il a aussi annoncé en privé au Délit qu’il était encore candidat. Tous ces coups d’éclat ont bien l’air d’une campagne électorale rondement menée. ‑Baptiste Rinner


La politique a‑t-elle sa place à l’AÉUM ?

La motion « anti-polémique » proposée au référendum est controversée.

La dernière assemblée générale de l’AÉUM qui s’est déroulée le 22 février dernier s’est fait remarquer par son caractère polémique. En effet, la motion concernant le soutien au mouvement BDS McGill avait fait controverse durant les semaines précédant l’assemblée et ne fut adoptée qu’au terme d’un long et virulent débat.

Suite à cela, Adam Templer, Matthew Sattherthwaite et François-Paul Truc — trois étudiants représentants à l’AÉUM — ont proposé un amendement soutenant la création d’un comité de directeurs externes à l’Association qui auraient la responsabilité de poser un droit de véto sur les motions jugées controversées et extrinsèques à la vie étudiante. Lorsqu’interrogé sur la composition d’un tel comité Adam Templer nous répond que ce dernier « devrait inclure des membres de l’AÉUM en général qui s’ajouteraient au comité directeur actuel (en charge des révisions grammaticales des motions et de la conformité de ces dernières avec le règlement intérieur, ndlr).»

De plus, ils proposent que ce type de motion doive nécessiter l’obtention des deux tiers du vote étudiant par la suite. Templer ressent aussi la nécessité d’apporter une clarification sur l’amendement en lui même : «[…]qualifier certaines motions comme étant polémiques et externes est juste une mise en garde au corps étudiant de McGill pour s’assurer que de telles motions bénéficient d’un large soutien plutôt que d’une simple majorité. »

Mahaut Engérant

Une proposition qui fait polémique

Cette éventualité divise au sein même de la direction de l’Association. En effet, si la résolution a aujourd’hui obtenu assez de soutien pour être présentée au référendum, elle est aussi fermement rejetée par une partie des exécutifs. Emily Boytinck, v.-p. aux Affaires externes, s’explique : « L’Assemblée générale est l’un des seuls endroits où les membres de l’AÉUM peuvent participer de manière démocratique et directe, il est donc très important que nous soyons capables de discuter et de débattre d’un large éventail de questions.» Boytinck, ainsi que Kareem Ibrahim et Chloé Rourke, ont donc constitué en vue du référendum un comité en faveur du « Non ». 

Face à la contestation, Adam Templer défend néanmoins le projet et réfute les accusations de censure et d’atteinte au processus démocratique : « Il ne s’agit pas là de couper court au débat mais plutôt de le favoriser. Les motions concernant des questions externes à la vie étudiante sont bénéficières d’un soutien financier supérieur à la moyenne, en conséquence les étudiants deviennent victimes d’un effet de mode et prennent parti sans savoir. D’autre part, il y a des moyens bien plus probant pour défendre une cause que l’Assemblée générale : une campagne de sensibilisation par exemple est bien plus efficace qu’une discussion d’un exécutif de l’AÉUM avec un responsable de l’université à huit clos ». Il ajoute que les divisions qui résultent de certaines motions ont un impact qui dépasse la simple controverse : « Certains incidents m’ont été reportés par des étudiants, des actes antisémites, islamophobes ou racistes. Le jeu en vaut-il la chandelle ?»

La nécessité d’une politique étudiante engagée

Pour certains exécutifs tels que Rourke, ce discours est trompeur et extrêmement problématique. Pour elle, le fait de qualifier une motion comme étant « politique » ou « controversée » est un acte politique en lui-même. De plus, elle s’interroge sur la pertinence du terme externe : « Est ce que manifester sa solidarité envers les femmes indigènes disparues et assassinées est un problème externe à l’université ? Qu’en est-il d’une motion qui se pose en faveur du mouvement Black Lives Matter ? S’agit-il là de questions externes à la vie des étudiants indigènes ou noirs ?» Elle affirme que faire de l’AÉUM une organisation fermée aux débats d’opinions revient à ignorer la diversité du corps étudiant et refuser à certains la possibilité de faire entendre leur voix. Cette vision d’une AÉUM « plus représentative » et « moins politique » devient problématique lorsqu’elle est appliquée aux principes d’équité et de justice sociale. 

L’amendement reçoit un accueil tiède, parmi les étudiants : si certains nous ont confié qu’ils voyaient dans cette motion un geste raisonnable et justifié, certains comme Mary (U2) trouvent cela « aberrant » ou encore comme Reem (U0), « à l’encontre de l’esprit de l’université ». Reste donc à savoir quelle sera l’issue du référendum qui approche à grand pas. ‑Dior Sow


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