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En colère, ensemble

Un rassemblement de solidarité a eu lieu le premier mai dernier à Parc-Extension. 

Juliette De Lamberterie | Le Délit

À l’ancienne gare Jean-Talon s’est déroulée la manifestation du Premier Mai à l’occasion de la Journée Internationale des Travailleurs et Travailleuses. Ce grand rassemblement, organisé par un grand nombre d’associations locales, telles que le Syndicat Industriel des Travailleurs et des Travailleuses (SITT), Bouffe contre le Fascisme, Solidarité Sans Frontières, le Syndicat des Travailleuses et Travailleurs du Communautaire, le Comité d’Action du Parc Extension (CAPE), et bien d’autres, visait à unir, pour un après-midi, une impressionnante et joyeuse diversité d’individus, partageant pourtant tous un puissant besoin de protester.

Plusieurs groupes, des revendications diverses

« Souligner et encourager les luttes d’ici », c’est l’objectif du rassemblement, énoncé dès le début. Les représentantes du SITT affirment que personne n’est seul dans ses revendications, que chacun devrait être capable de mener sa propre lutte. On dirige notre attention sur la situation des infirmières du Québec, ainsi qu’à celle des préposées aux bénéficiaires et travailleuses sociales ; celles-ci manifestent depuis plusieurs mois contre des conditions de travail déplorables, en partie dues à leurs heures supplémentaires obligatoires, qui mettent en danger leur santé et celle de leurs patients. Dans d’autres pays, tels que la France, la Nouvelle-Zélande, ou le Zimbabwe, des milliers d’entre elles ont été renvoyées pour avoir haussé la voix ; on dénonce ainsi un système patriarcal qui tend à rabaisser les professions historiquement féminines, et que l’on refuse de rémunérer adéquatement.

 

On milite aussi contre le racisme, particulièrement mis en lumière dans le quartier de Parc-Extension. Constitué à 60% d’immigrants, les conditions de vie et de travail difficiles semblent être un dénominateur commun de la vie d’une grande majorité de ses habitants. Le taux de chômage y est élevé, beaucoup ne sont payés qu’au salaire minimum, peinant à vivre confortablement, parfois même dans des conditions d’insalubrité. L’opinion est simple : « C’est la loi ! L’égalité pour tout le monde ! Les immigrants veulent juste leur part égale ».

Le quartier du Parc-Extension menacé

La situation actuelle de Parc Extension est un élément important de la manifestation. Les organisateurs ont délibérément choisi d’y manifester pour encourager les luttes actuelles de groupes locaux. « Parc-Extension est un quartier de transition », et est donc un quartier crucial, souligne un jeune porte-parole. Les nouveaux immigrants et réfugiés s’y installent souvent en premier, y attendant une amélioration de leurs conditions de vie pour déménager ailleurs.

Pourtant, y vivre devient de plus en plus difficile. Le Comité de Soutien de la Plaza Hutchison travaille en ce moment à protéger l’immeuble qui, depuis des années, servait de centre communautaire aux habitants, de lieu de rencontre aux associations d’immigrants et à certains cultes religieux, et qui permettait aux commerces locaux de se développer. L’année dernière, celui-ci a été racheté en vue d’y créer des condominiums. « Nous avons besoin de logements sociaux, pas de condos ». Face à la résistance de plusieurs locataires, des menaces, des coupures d’électricité ont été effectuées. Parc-Extension, considéré comme l’un des quartiers les plus pauvres du Canada, où près de 50% des jeunes décrochent pendant le secondaire, et foyer d’une intersection de nombreux types d’oppressions, telles que le racisme, le classicisme, l’impérialisme blanc, est de nouveau menacé. Selon le représentant, la gentrification devrait être vue comme fruit du colonialisme, il s’agirait en quelque sorte de « terres volées ».

Une lutte en continu

L’évènement s’est prolongé jusqu’à la soirée, tout d’abord avec une marche dans le quartier, suivie de la manifestation de la Coalition des Luttes Anticapitalistes, qui s’est terminée avec l’arrestation de six personnes. Un nouveau rassemblement prévu pour juin prochain dans le cadre du sommet du G7, dans la région de Charlevoix, afin de protester contre la concentration de la richesse, les menaces environnementales ainsi que les fortes montées de l’extrême droite, du racisme et du protectionnisme.


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