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Un an, et après ?

Mahaut Engérant | Le Délit

KHALED BELKACEMI

AZZEDDINE SOUFIANE

ABDELKRIM HASSANE

BOUBAKER THABTI

MAMADOU TANOU BARRY

IBRAHIMA BARRY

Il y a un an déjà que ces hommes tombaient assassinés sous les balles d’Alexandre Bissonnette. L’horreur et l’effroi de cet attentat sordide dans la mosquée de Québec ont choqués la province et le Canada entier. Il y a un an déjà l’équipe du Délit, dans son éditorial du 31 janvier 2017, se promettait de ne pas céder à la terreur et de ne pas succomber à la haine et de rester solidaire. Certains espéraient que cet effroi secouerait la conscience nationale et alimenterait une réelle conversation sur les dérives de notre société québécoise et de son « vivre-ensemble ». En effet, cette attaque prit place deux semaines après l’instauration de la première journée nationale du vivre-ensemble, le 15 janvier 2017. Malheureusement, force est de constater que les mois ont passé et que les choses n’ont pas changé. L’espoir auquel les Québécois ont tenté de s’accrocher s’est peu à peu transformé en amertume. 

Et après ?

Pour la plupart, il semblerait que cet événement n’eut pas les conséquences espérées ; une alerte à la bombe au mois de mars ciblait les étudiants musulmans de Concordia ; l’échec d’un projet de cimetière musulman à Saint-Apollinaire en juillet ; l’adoption en octobre de la Loi 62, considérée par beaucoup comme islamophobe ; un reportage erroné en décembre de la part de TVA avançait que certaines mosquées à Montréal avaient demandé à ce que les femmes soient exclues des chantiers, ce qui entraîna une montée de sentiments anti-musulmans sur les réseaux sociaux ; puis encore cet incident étrange en octobre, où un partenariat entre le Centre de jeunesse à Montréal et La Meute —groupe xénophobe et ouvertement anti-musulman d’extrême droite créé en 2015— fut mis en lumière. Le centre s’est par la suite distancé du groupe suite au backlash. Tout cela est-il symbole d’une intolérance qui se normalise ? 

En souvenir

La mémoire est la manière qu’a un peuple d’écrire entre parenthèses son passé afin de mieux envisager les prochains tracés de son futur. Compte tenu de cette dernière année pour laquelle nous ne pouvons que dénombrer de toujours plus nombreux et sinistres actes islamophobes, devons-nous croire que les prochaines lignes de notre histoire seront malheureuses ? Le processus commémoratif ne peut se résumer au simple souvenir, et doit aller plus loin. Le cas du Québec ne tient évidemment pas du tragique et il serait aberrant de croire que nous ne pouvons rien y faire. Nous avons le pouvoir d’y changer quelque chose et notre statut d’étudiant nous confère d’autant plus le devoir de le faire. Ce devoir de mémoire, auquel l’attentat de la mosquée de Québec nous appelle, est placé dans la main que nous tendrons aux uns et dans les mots que nous porterons aux autres. Dans le silence que nous respecterons à la mémoire des victimes se dessinera aussi la voix qui nous entraînera à ne plus jamais demeurer silencieux face à l’intolérable.


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